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l’idée de chevalerie 87
Ce culte des héros à la fin du moyen-âge a trouvé sa forme
littéraire dans les biographies de chevaliers parfaits. Parfois,
ce sont des figures légendaires, comme Gilles de Trazegnies ;
les plus intéressantes, toutefois, sont celles des contemporains,
comme Boucicaut. Jean le Meingre, communément appelé
le maréchal Boucicaut, avait servi son pays en des temps
de détresse. Il s’était trouvé avec Jean de Nevers à Nico-
polis en 1396, où l’armée française, partie pour chasser les
Turcs de l’Europe, avait été anéantie par le sultan Bajazid.
Il fut de nouveau fait prisonnier à Azincourt en 1415 et
mourut après six ans de captivité. En 1409 déjà, un de ses
admirateurs écrivit ses exploits, de sources très certaines,
mais avec l’intention de produire, non pas une page d’his-
toire contemporaine, mais une image du parfait chevalier (1).
Les réalités de cette vie mouvementée disparaissent sous
les apparences de l’héroïsme idéal. La terrible catastrophe
de Nicopolis n’a, dans le Livre des jaicts, qu’une couleur
bien pâle. Boucicaut est présenté comme le type du chevalier
sobre, pieux, et pourtant courtois et lettré. Le mépris des
richesses, propre au chevalier, est exprimé par le père de
Boucicaut, qui n’avait jamais voulu ni augmenter ni di-7
minuer ses possessions, disant : Si mes enfants sont honnêtes^
et braves, ils auront assez ; et s’ils sont indignes, ce serait^
dommage de leur laisser tant de fortune (2). La piété de
Boucicaut a un caractère puritain. Il se lève tôt et passe
bien trois heures en prières. Quelque pressé ou occupé qu’il
soit, il entend chaque jour deux messes, à genoux. Le ven-
dredi, il s’habille de noir ; le dimanche et les jours de fête,
il fait à pied un pèlerinage, écoute la lecture de vies de saints
ou des histoires des « vaillans trespassez, soit Romains ou
autres », ou bien s’entretient de sujets dévots. Il est sobre,
parle peu et, s’il parle, c’est de Dieu, des saints, de vertu
et de chevalerie. Il a accoutumé ses serviteurs à la décence
et à la dévotion et les a déshabitués de jurer (3). Il est un
des zélés partisans du culte de la femme, et fonde l’ordre
(1) Le livre des faicts du mareschal Boucicaut, éd. Petitot, Coll, de mémoires,
lre série, t. VI, VIL
(2) Le livre des faicts, VI, p. 379.
(3) Le livre des faicts, VH, pp. 214, 185, 200, 201.
 
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