MÉLANGES HULIN DE LOO
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à la conclusion que le manuscrit de Cambrai n’a pu être
le seul consulté par l’artiste. Sans doute, à cause de la
simplicité de leurs compositions, lui ou tout autre de la
même famille (1) ont-ils eu souvent la préférence du peintre
parce que fournissant des modèles plus susceptibles d’être
exécutés en tapisserie.
De tout ce débat, l’œuvre personnelle de Jean de Bruges
est sortie considérablement amoindrie.
Pour M. Guiffrey, l’artiste aurait seulement « agrandi »
les miniatures; M. de Farcy considère les tableaux de la
tapisserie comme « calqués » sur les compositions du
manuscrit de Cambrai, et va jusqu’à envisager la possi-
bilité de reproduire d’après ce dernier, les pièces manquant
à la série d’Angers. M. Gobel, lui aussi, ne voit dans les
tapisseries d’Angers, « rien de plus qu’une collection de
miniatures agrandies gigantesquement » (nichts weiter als
eine ins riesenhafte vergrosserte Miniaturensammlung).
Jean de Bruges, le peintre en titre de Charles V, s’est-il
vraiment borné à ce rôle de copiste ?
Dans son cours de 1928, M. Hulin de Loo pose la question
et y répond négativement. Pour lui, Jean de Bruges n’a
cherché dans les manuscrits que la tradition iconographique
et toutes les qualités esthétiques des cartons d’Angers lui
reviennent en propre.
Ces qualités sont sensibles à un très haut degré dans le
pouvoir décoratif des compositions dont plusieurs d’entre
elles correspondent précisément à des représentations
naïves et même grotesques de la part des enlumineurs. Les
types empreints d’une majesté totalement absente dans le
manuscrit ne sont pas rares dans les tapisseries. Une
science beaucoup plus avancée préside à la représentation
des architectures, parmi lesquelles on trouve des édifices
à deux travées dessinés selon une perspective déjà très
satisfaisante à l’œil.
(1) L'extrême parenté de certains manuscrits entre eux rend particulière-
ment délicate la détermination des modèles de Jean de Bruges.
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à la conclusion que le manuscrit de Cambrai n’a pu être
le seul consulté par l’artiste. Sans doute, à cause de la
simplicité de leurs compositions, lui ou tout autre de la
même famille (1) ont-ils eu souvent la préférence du peintre
parce que fournissant des modèles plus susceptibles d’être
exécutés en tapisserie.
De tout ce débat, l’œuvre personnelle de Jean de Bruges
est sortie considérablement amoindrie.
Pour M. Guiffrey, l’artiste aurait seulement « agrandi »
les miniatures; M. de Farcy considère les tableaux de la
tapisserie comme « calqués » sur les compositions du
manuscrit de Cambrai, et va jusqu’à envisager la possi-
bilité de reproduire d’après ce dernier, les pièces manquant
à la série d’Angers. M. Gobel, lui aussi, ne voit dans les
tapisseries d’Angers, « rien de plus qu’une collection de
miniatures agrandies gigantesquement » (nichts weiter als
eine ins riesenhafte vergrosserte Miniaturensammlung).
Jean de Bruges, le peintre en titre de Charles V, s’est-il
vraiment borné à ce rôle de copiste ?
Dans son cours de 1928, M. Hulin de Loo pose la question
et y répond négativement. Pour lui, Jean de Bruges n’a
cherché dans les manuscrits que la tradition iconographique
et toutes les qualités esthétiques des cartons d’Angers lui
reviennent en propre.
Ces qualités sont sensibles à un très haut degré dans le
pouvoir décoratif des compositions dont plusieurs d’entre
elles correspondent précisément à des représentations
naïves et même grotesques de la part des enlumineurs. Les
types empreints d’une majesté totalement absente dans le
manuscrit ne sont pas rares dans les tapisseries. Une
science beaucoup plus avancée préside à la représentation
des architectures, parmi lesquelles on trouve des édifices
à deux travées dessinés selon une perspective déjà très
satisfaisante à l’œil.
(1) L'extrême parenté de certains manuscrits entre eux rend particulière-
ment délicate la détermination des modèles de Jean de Bruges.
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