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Le Journal d'Abou Naddara = Abū Naẓẓāra = The Man with the Glasses = garīdat abī naẓẓāra = The Journal of the Man with the Glasses = Journal Oriental Illustré — Paris, 1906

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Issue 2 (28.02.1906)
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https://doi.org/10.11588/diglit.56682#0007
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rez en voir quelques-uns à cette heure-ci au jardin de l’hôtel où ils
demeurent. Allons-y, je vous y conduirai.
— Et moi je prierai Dieu de vous accorder tout ce que votre cœur
désire. Allons.
Après un quart d’heure de marche, nous fûmes à l’hôtel Maria-
Christina et mon aimable compagnon me présenta aux principaux
délégués de la conférence et prit congé de moi.
Je me suis vu alors en présence du Duc d’Almodovar, ministre des
affaires étrangères d’Espagne et président de la Conférence, M. Révoil
(France),M.de Radowitz (Allemagne), Sir Arthur Nicholson(Angleterre),
Comte Cassini (Russie), Sidi Mohammed el Torrès (Maroc) et le
Marquis Visconti Venosta (Italie).
Ces hauts personnages ont bien voulu me faire un très gracieux
accueil et agréer mes sincères souhaits pour le succès de leur
conférence. Puis ils m’ont permis de parler.
Je serai bref, leur dis-je, pour ne pas abuser de la bienveillante
attention de Vos Excellences. Je suis Egyptien.
« Nous vous connaissons bien, s’écrièrent-ils et nous lisons souvent
vos journaux satiriques... »
Sir Arthur Nicholson (souriant). — Dans lesquels vous ne nous
ménagez pas
Sidi Mohammed el Torrès. — Il défend les droits de sa patrie. Il
n’a pas tort.
M. Révoil. — Mais il est moins dur depuis quelque temps dans ses
attaques.
Sidi Mohammed el Torrès. — Si le vénérable Cheikh Abou Naddara,
l’ami dévoué de l’Islam, est moins violent dans ses attaques contre
l’Angleterre, c’est parégardpourlaFr ince, dont il est l’hôte (à M. Révoil).
Ah! si vous lisiez le bien qu’il dit de votre pays en arabe dans son
journal, vous l’embrasseriez.
M. Révoil. — Je connais le Cheikh ; il est très gentil pour nous.
Le Duc d’Almodovar. — Il est très gentil pour l’Espagne aussi et
LL. MM. le Roi et la Reine mère l’aiment beaucoup.
Le Marquis de Visconti Venosta. Mon Auguste Maître a aussi
beaucoup d’amitié pour lui à cause de son amour pour l’Italie, où il fit
son éducation.
Moi. — Je remercie sincèrement Vos Excellences de leurs gracieux
compliments et je tâcherai de les mériter en continuant de combattre
par la plume et la parole les superstitions populaires, le fanatisme
religieux et les aversions nationales, les trois fléaux qui divisent les
mortels.
Sir Arthur Nicholson. — Mais Abou Naddara était notre ami aussi.
Il a célébré nos héros et nos grands savants et poètes. Il écrit notre
langue en prose et en vers comme s’il était né en Angleterre. Ce n’est
que depuis notre occupation de son pays qu’il nous en veut, et pourtant
il devrait nous aimer, car nous avons civilisé et enrichi la Vallée du Nil.
Moi (au Duc d’Almovodar). — J’aime la nation britannique quoique
je sois l’adversaire de son gouvernement. Sir Arthur Nicholson vient
de dire que les Anglais, par leur occupation de ma patrie, ont civilisé et
enrichi mes compatriotes. Celui qui a civilisé ma terre natale est le
grand Mehmet AU, le chef de la dynastie khédiviale actuelle, qui s’était
entouré de savants français pour guider son peuple dans la voie du
progrès. Je ne nie pas que les Anglais ont enrichi et fait prospérer la
Vallée du Nil ; mais c’est pour l’exploiter à leur prolit. Ils ont les plus
belles propriétés, les terrains les plus fertiles et, les compagnies agri-
coles et industrielles les plus productives de l’Egypte et du Soudan.
Sidi Mohammed el Torrès. — C’est Dieu qui l’a voulu.
Moi. — Et c’est pour cela que nous tâchons d’oublier tout ce que
nous avons souffert pendant les premières vingt années de la domina-
tion britannique. Mais aujourd’hui que le pays est tranquille et que
nous,avons un bon Khédive, nous prions le gouvernement de S. M. le
Roi Édouard VII de remplir ses engagements en retirant ses troupes
de la Vallée du Nil, et nous promettons de traiter les nombreux rési-
dents britanniques en véritables frères. Nous les aiderons dans toutes
leurs entreprises agricoles, commerciales et financières, et protégerons
leurs biens. Vous proclamez, Excellences, l’intégrité de l’Empire
Ottoman et vous permettez à l’Angleterre d’occuper deux de ses belles
provinces, l’Egypte et le Soudan, qui sont les joyaux les plus brillants
de la couronne de son Souverain. Daignez prendre en considération
cette question importante et vous vous attirerez les sympathies des trois
cents millions de Musulmans pour qui S. M. I. le Sultan est le vrai,
l’unique successeur de leur Prophète Mohammed, l’envoyé de Dieu.
Sidi Mohammed el Torrès. — Ces nobles représentants des grandes
Puissances d’Europe sont animés de bons sentiments. envers l’Islam ;
Leurs Excellences vous ont attentivement écouté et parfaitement
compris. Allez, bon Cheikh, et dites à vos compatriotes que le Très-
Haut ne les abandonne pas. Le sage Souverain anglais ordonnera
bientôt l’évacuation de la Vallée du Nil. »
J’ai remercié les aimables délégués de ce qu’ils vont faire en faveur de
mon pays et me voici de retour à Paris en me disant : Si tout cela n’est
qu’un rêve, que Dieu clément et miséricordieux le réalise !
Abou Naddara .
Conférences et discours du Cheikh Abou Naddara
(5b, 6«, et 8« après le mille)
Depuis Je mois de Juillet igo5, l’abondance des matières ne nous a
pas permis d’enregistrer les discours faits par le Cheikh jusqu’à ce jour.
Nous allons donc les mentionner sans en rendre compte ; nos aimables
confrères parisiens ont eu la bonté d’en parler dans leurs journaux et
revues. Le Cheikh a prononcé pendant ces huit mois quatre discours
seulement ; il est si occupé ! Ce fut donc aux banquets du Syndicat de
la Critique littéraire, à l’Athénée de France, au Syndicat de la Presse
périodique et à la fête des Sauveteurs du Dernier Adieu que le Cheikh
a pris la parole et fut chaleureusement applaudi.
La Rédaction.
 
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