l'occupation est - elle pour l'Egypte un bienfait ou un malheur ?
Lord Cromer et ses collègues affirment qu'elle est un bienfait, vous et
vos confrères ne cessez de dire que c'est le malheur du pays.
Après avoir parcouru votre patrie d'Alexandrie jusqu'à Khartoum et
m'être entretenu avec des officiers, des étudiants , des négociants , des
paysans et des Soudanais . j'ai vu, à mon grand regret, qu'en dépit
des assertions contraires de lord Cromer, vous ne dites que l'exacte
vérité en proclamant en toute occasion que le mécontentement des
populations nilotiques va toujours croissant et que leurs revendications
sont légitimes, et je n'ai pas craint de le dire à notre haut commissaire
et à ses collègues.
J'ai noté pour vous, et afin de tenir la promesse que je vous avais
faite, mon cher Professeur, quelques-unes des conversations les plus
instructives que j'ai eues avec vos compatriotes et je vous en envoie
un aperçu avec l'autorisation de lui donner toute la publicité que vous
désirerez.
Les étudiants m'ont dit:
« Que les Anglais nous obligent â apprendre leur langue, c'est leur
droit de conquérants; mais pourquoi suppriment - ils le turc et le
français, qui ont toujours été avec l'arabe la base de nos études? Et
puis, comment nous attacher à ceux qui médisent sans cesse de notre
grand Prophète, qui paient grassement les professeurs et fonctionnaires
anglais et ne rétribuent pas les indigènes. Là où les uns reçoivent
cinquante guinées, à peine en donne-t-on cinq aux autres. »
Les négociants m'ont dit :
« Depuis que les Anglais ont envahi notre malheureux pays, notre
commerce et même notre industrie périclitent, tandis que les leurs
prospèrent. Ils tiennent en main l'importation et l'exportation. Ce sont
eux qui nous vendent cher leurs marchandises et achètent à vil prix nos
produits. Ils ont même accaparé la vente en détail, dont nous béné-
ficiions. Ils ont ouvert des magasins partout. Quant à notre industrie,
elle est devenue anglaise, puisque c'est à Manchester, à Birmingham et
à Liverpool qu'on la contrefait , et nos malheureux ouvriers ne peuvent
pas lutter contre les machines. Nous sommes à plaindre. Nous qui
nagions dans la prospérité, c'est dans l'adversité que l'occupation
anglaise nous plonge. »
Les fellahs, les résignés et paisibles paysans égyptiens, m'ont dit :
« Les traîtres qui nous ont vendus aux Anglais, nous assuraient que
les nouveaux maîtres feraient notre bonheur. Les menteurs ! Nous
sommes plus malheureux que sous le règne du Khédive Ismaïl. Nous
ne sommes plus propriétaires 11s nous ont obligés à vendre les quelques
feddans de terre que nous possédions, pour payer les impôts et les taxes
dont ils nous ont accablés. Nous voici donc à leur service, car ce sont
eux qui, sous main, ont acheté nos terrains et ceux de beaucoup de nos
pachas, de nos beys, de nos notables et de nos riches propriétaires aux-
quels ils ont appris les deux choses que le saint Coran défend : la
boisson et le jeu; de sorte que beaucoup de nous sont obligés de tra-
vailler chez les étrangers. Et puis, ils ont déchiré nos entrailles en faisant
mourir nos frères et nos enfants dans des guerres contre les Soudanais,
qui sont des Musulmans comme nous. »
Les Soudanais m'ont dit :
« Ne prononcez pas le nom des Anglais devant nous, ô fils de
l'Amérique; il nous suffit de voir leur maudit drapeau flotter sur nos
demeures et la statue de l'infidèle Gordon debout d ns notre ville
sainte Mais nous ne désespérons pas de la miséricorde de Dieu, car il
est tout-puissant. Le jour viendra où nous vengerons les vingt mille
derviches qu'ils ont foudroyés par leurs machines infernales, et nous
leur infligerons le châtiment qu'ils méritent pour le crime qu'ils ont
commis N'ont-ils pas ouvert le Saint Sépulcre du premier Mahdi et
profané son corps en le touchant de leurs mains immondes? L'heure
longuement attendue sonnera bientôt et nous nous vengerons de nos
tyrans et de nos ennemis. »
Les officiers m'ont dit :
« Nous ne sommes pas rancuniers. Nous avons oublié tout le mal
qu'ils nous ont fait pour s'emparer, contre le droit des gens, de notre
pays. N'ont-ils pas organisé le massacre d'Alexandrie pour avoir un
prétexte d'envahir l'Egypte d'abord, et conquérir le Soudan ensuite?
Mais nous exigeons d'eux l'accomplissement de leurs engagements. Ils
ont solennellemenl promis d'évacuer la Vallée du Nil. qui est une pro
vince de l'Empire Ottoman, ausstôt l'ordre établi. Il l'est aujourd'hui,
et louange à Dieu, nous avons un jeune et intelligent Khédive, capable
de nous gouverner et de marcher à la tête de nos populations dans la
voie de la civilisation et du progrès. Qu'ils s'en aillent donc. Mais, non;
ils nous outrag nt et nous humilient afin que nous nous soulevions
contre eux pour dire à l'Europe : « L'Egypte est un foyer de rébellion,
il faut le pacifier ». Et voilà un bon prétexte pour continuer leur occu-
pation de notre malheureuse patrie. Mais nous ne leur fournirons pas ce
prétexte. Nous trouverons le moyen de nous affranchir : Man saber,
zafer, qui patiente triomphe ».
Lord Cromer et le sirdar, à qui j'ai communiqué les justes réclama-
tions des indigènes, m'ont dit :
« Il y a beaucoup d'exagération dans tout ce que vous avez entendu;
néanmoins, nous allons tâcher d'améliorer le sort du peuple, pour vous
être agréable. Quant à l'évacuation, elle n'aura jamais fieu. La Vallée
du Nil nous est nécessaire, tant pour notre empire indien que pour
celui que nous sommes en train de former en Afrique, en dépit de nos
ennemis ». ,
Je n'ai pas ju é utile de lui répondre, et je l'ai laissé savourer avec
son ami le wisky-soda et se préparer à une belle partie de tennis.
La vérité que je n'ai pu faire entendre à Leurs Seigneuries, je veux
vous la résumer en quelques mots. Ce système de gouvernement est
déplorable et l'antipathie des habitants contre les occupants ne fait que
croître; leur hostilité est évidente. Dans toutes les bouches, dans
tous les organes, on entend proclamer la souveraineté du Sultan,
successeur du Prophète: pour lui, et contre les Anglais, s'unissent toutes
les forces de la nation égyptienne.
Un Diplomate.
Conférences et Discours du Cheikh Ahou Naddara
(14", 15% 16° et 17% depuis janvier 1903)
C'est hors Paris que le Cheikh a fait ces quatre discours à Ville-
d'Avray, à Fontainebleau, à Montlhéry et à Nogent-sur-Marne.
Comme toujours, ses aimables auditeurs l'ont chaleureusement
applaudi , et ses confrères de Paris et des départements l'ont loué dans
leurs journaux.
Dans ses discours, Abou Naddara n'a pas oublié les quatre pays qui
lui sont chers : la Turquie, l'Egypte, la France et l'Italie.
Et maintenant voici les vers français et italiens par lesquels le Cheikh
a terminé ses diverses allocutions :
A l'anniversaire de la naissance de Garibaldi célébré par
la Lyre Garibaldienne Nogentaise, à Nogent sur Marne.
1 nemici tuoi fuggivano,
Della voce tua. al fragor.
Tu, gli oppressi , festi liberi,
Festii, schiavi, gli oppressor.
La tua mano fu benetica
Verso i figli del dolor.
Vivrà il nome tuo fra i posteri
Pien di gloria e di splendor,
A noi sacra é tua memoria,
O, d'Italia , luce e onor.
ALI.' ITALIA
Il tuo cielo azzurro e timpido,
Tue fiorite e amené sponde,
Del tuo mar le lucide onde;
Quando, o Italia, rivedrô?
I tuoi tigli or f tti liberi
Cal lor senno e colla mano,
Sur magnanimo Sovrano;
Quando, o Italia. rivedrô?
Le tue figlie che non douane
Lor gent I. sublime core
Che a chi outre patrio amore ;
Quando. o Italia, rivedrô ?
Verra il gior o; io'l veggo giungere
Che lia page tal disio
E del genio il suol hatio
Tant' amato rivedrô.
TOAST AUX DAMES PRÉSENTES
Pour la Lyre Garibaldienne,
De vers coquets, j'offre un bouquet
A la Française, à I Italienne
Qui rendent brillant ce banquet.
C'est leur radieuse présence
Qui charme et réjouit mon cœur.
Quelle grâce! quelle élégance!
Quelle bonté! quelle douceur!
Elles inspirent le poète
Par leur esprit , par leur beauté,
Et font de cette grande fête
L'entrain, la joie et la gaîté,
Mes compliments sont très sincères;
Sans ces Dames, pas de succès,
Levons donc, chers Messieurs, nos
Au beau sexe italo-français! [verres
à Ville d'Avray.
Du peintre couronné de gloire.
Qui des Beaux Arts est le soleil.
Le nom de Corot, je vénère,
Nom digne d'immortalité.
Amis, je leve a lui mou verre
Et le bois a votre santé.
Mille grazie Signor Pègnri,
Presidente prediletto,
Dell' invito ch' E'la fecemi
Di presiedere il banchetto
Della Lira patriotica,
Poich' ell' è Garibaldien ;
Di cuor dunque la ringrazio
E la Musa mia cairina,
Sulla lira egizia, un cantico
Scioglier và nelle favelle
Della Francia e dell' Italia,
Nazïoni ognor sorelle ,
Cari amici, empite i calici
D'esto vin spumante e bon
Onde berli alla memoria
Del gran Prode di Digion.
Chers fils d'Italie et de France,
Glorifiez l'immortel héros.
Le soldat de l'indépendance
Qui fit trembler des Généraux!
Plus d une éclatante victoire,
11 remporta sur les tyrans.
Garibaldi! en or. l'histoire
Inscrit ton nom parmi les Grands
Je chante depuis mon jeune àge,
Sur mon doux luth oriental,
Ta haute valeur, ton courage
Et ton esprit juste et loyal.
Mais à ta fête, sur ta Lyre,
Te célèbre Abou Naddara .
Et c est ta langue qui m inspire
Un chant qui jamais ne mourra.
ODE ITALIENNE
Tu di guera fosti il fulmine,
Degli eserciti il terror;
Il tuo braccio fu d'un Ercole,
Di Leone fu il tuo cor.
Fosti l'idol del tuo popolo ,
Dei tuoi prpdi il solo amor
Giusto, nobile e magnanimo
Fosti, o eroico difensor.
Nei due mondi ognor si celebra
Il tuo senno e il tuo valor.
E i guerrieri lor t'appellano,
Delle pugne il vincitor.
Qual eroc poté resistere,
Della spada tua, al furor?
A la Fête de Corot.
Quoique je ne sois ni Racine,
Ni Musset, ni Clément Marot,
Ni Richepin, ni Lamartine,
Je veux chanter le grand Corot.
Je veux célébrer la mémoire
De cet artiste sans pareil,
Au déjeuner champêtre de l'Athénée, à Montlhéry.
Bonneval, je vous entends dire,
Et vous, Mesdames et Messieurs,
« Le pauvre Cheikh, rien ne l'inspire;
Il n'est plus jeune ; il est si vieux. »
Vous avez tort; car, malgré l'âge.
Je trouve toujours un quatrain
Pour en faire au beau sexe hommage.
Le beau sexe est mon souverain.
Au banquet des
Rousseau . cher confrère de France,
Reçois mes vits.remerciments.
A toi,je dois la connaissance
Des 1, artistes et savants.
Depuis dix ans je les fréquente,
Ils sont vraiment délicieux ;
Leur compagnie est si charmante!
Leur accueil est si gracieux!
Immense plaisir, j'éprouve
Dans leur douce société;
Car ma jeunesse, je retrouve
Avec sa verve et sa gaîté.
En l'honneur des t, dont j'admire
Le talent, la vertu, l'esprit
Je veux célébrer sur ma lyre
Le splendide et joli Paris.
Salut, Paris, Ville Lumière,
Sol natal d'hommes éminents!
Je suis son dévoué poète
Et son sincere admirateur.
C'est lui qui donne a votre fête
L'entrain, la joie et la splendeur.
De ses tilles la France est tiere,
Ce sont des anges de beauté.
Je lève a h ur bonheur mon verre
Et je le bois à leur santé.
1, à Fontainebleau
Pour toi mon amour est sincère
El mes vœux sont toujours ardents.
Loin de toi mon cœur et mon âme
Soup rent comme l'amoureux
Apres la belle qui l'enflamme
Et d'un regard ie rend b ureux.
Les souffrances de ma patrie
Et les chagrins de mon exil,
J'oublie en toi, ville chérie,
Dont la Seine devint mon Nil.
Tes braves fils, tes chères filles,
M'honorent de leur amitié.
Au sein de leurs bonnes familles,
Je suis toujours fête , choyé.
Paris! que Dieu donne a ta France
La paix et la prospérité!
Qu'en Elle règne la Science
Et triomphe la Liberté!
Lord Cromer et ses collègues affirment qu'elle est un bienfait, vous et
vos confrères ne cessez de dire que c'est le malheur du pays.
Après avoir parcouru votre patrie d'Alexandrie jusqu'à Khartoum et
m'être entretenu avec des officiers, des étudiants , des négociants , des
paysans et des Soudanais . j'ai vu, à mon grand regret, qu'en dépit
des assertions contraires de lord Cromer, vous ne dites que l'exacte
vérité en proclamant en toute occasion que le mécontentement des
populations nilotiques va toujours croissant et que leurs revendications
sont légitimes, et je n'ai pas craint de le dire à notre haut commissaire
et à ses collègues.
J'ai noté pour vous, et afin de tenir la promesse que je vous avais
faite, mon cher Professeur, quelques-unes des conversations les plus
instructives que j'ai eues avec vos compatriotes et je vous en envoie
un aperçu avec l'autorisation de lui donner toute la publicité que vous
désirerez.
Les étudiants m'ont dit:
« Que les Anglais nous obligent â apprendre leur langue, c'est leur
droit de conquérants; mais pourquoi suppriment - ils le turc et le
français, qui ont toujours été avec l'arabe la base de nos études? Et
puis, comment nous attacher à ceux qui médisent sans cesse de notre
grand Prophète, qui paient grassement les professeurs et fonctionnaires
anglais et ne rétribuent pas les indigènes. Là où les uns reçoivent
cinquante guinées, à peine en donne-t-on cinq aux autres. »
Les négociants m'ont dit :
« Depuis que les Anglais ont envahi notre malheureux pays, notre
commerce et même notre industrie périclitent, tandis que les leurs
prospèrent. Ils tiennent en main l'importation et l'exportation. Ce sont
eux qui nous vendent cher leurs marchandises et achètent à vil prix nos
produits. Ils ont même accaparé la vente en détail, dont nous béné-
ficiions. Ils ont ouvert des magasins partout. Quant à notre industrie,
elle est devenue anglaise, puisque c'est à Manchester, à Birmingham et
à Liverpool qu'on la contrefait , et nos malheureux ouvriers ne peuvent
pas lutter contre les machines. Nous sommes à plaindre. Nous qui
nagions dans la prospérité, c'est dans l'adversité que l'occupation
anglaise nous plonge. »
Les fellahs, les résignés et paisibles paysans égyptiens, m'ont dit :
« Les traîtres qui nous ont vendus aux Anglais, nous assuraient que
les nouveaux maîtres feraient notre bonheur. Les menteurs ! Nous
sommes plus malheureux que sous le règne du Khédive Ismaïl. Nous
ne sommes plus propriétaires 11s nous ont obligés à vendre les quelques
feddans de terre que nous possédions, pour payer les impôts et les taxes
dont ils nous ont accablés. Nous voici donc à leur service, car ce sont
eux qui, sous main, ont acheté nos terrains et ceux de beaucoup de nos
pachas, de nos beys, de nos notables et de nos riches propriétaires aux-
quels ils ont appris les deux choses que le saint Coran défend : la
boisson et le jeu; de sorte que beaucoup de nous sont obligés de tra-
vailler chez les étrangers. Et puis, ils ont déchiré nos entrailles en faisant
mourir nos frères et nos enfants dans des guerres contre les Soudanais,
qui sont des Musulmans comme nous. »
Les Soudanais m'ont dit :
« Ne prononcez pas le nom des Anglais devant nous, ô fils de
l'Amérique; il nous suffit de voir leur maudit drapeau flotter sur nos
demeures et la statue de l'infidèle Gordon debout d ns notre ville
sainte Mais nous ne désespérons pas de la miséricorde de Dieu, car il
est tout-puissant. Le jour viendra où nous vengerons les vingt mille
derviches qu'ils ont foudroyés par leurs machines infernales, et nous
leur infligerons le châtiment qu'ils méritent pour le crime qu'ils ont
commis N'ont-ils pas ouvert le Saint Sépulcre du premier Mahdi et
profané son corps en le touchant de leurs mains immondes? L'heure
longuement attendue sonnera bientôt et nous nous vengerons de nos
tyrans et de nos ennemis. »
Les officiers m'ont dit :
« Nous ne sommes pas rancuniers. Nous avons oublié tout le mal
qu'ils nous ont fait pour s'emparer, contre le droit des gens, de notre
pays. N'ont-ils pas organisé le massacre d'Alexandrie pour avoir un
prétexte d'envahir l'Egypte d'abord, et conquérir le Soudan ensuite?
Mais nous exigeons d'eux l'accomplissement de leurs engagements. Ils
ont solennellemenl promis d'évacuer la Vallée du Nil. qui est une pro
vince de l'Empire Ottoman, ausstôt l'ordre établi. Il l'est aujourd'hui,
et louange à Dieu, nous avons un jeune et intelligent Khédive, capable
de nous gouverner et de marcher à la tête de nos populations dans la
voie de la civilisation et du progrès. Qu'ils s'en aillent donc. Mais, non;
ils nous outrag nt et nous humilient afin que nous nous soulevions
contre eux pour dire à l'Europe : « L'Egypte est un foyer de rébellion,
il faut le pacifier ». Et voilà un bon prétexte pour continuer leur occu-
pation de notre malheureuse patrie. Mais nous ne leur fournirons pas ce
prétexte. Nous trouverons le moyen de nous affranchir : Man saber,
zafer, qui patiente triomphe ».
Lord Cromer et le sirdar, à qui j'ai communiqué les justes réclama-
tions des indigènes, m'ont dit :
« Il y a beaucoup d'exagération dans tout ce que vous avez entendu;
néanmoins, nous allons tâcher d'améliorer le sort du peuple, pour vous
être agréable. Quant à l'évacuation, elle n'aura jamais fieu. La Vallée
du Nil nous est nécessaire, tant pour notre empire indien que pour
celui que nous sommes en train de former en Afrique, en dépit de nos
ennemis ». ,
Je n'ai pas ju é utile de lui répondre, et je l'ai laissé savourer avec
son ami le wisky-soda et se préparer à une belle partie de tennis.
La vérité que je n'ai pu faire entendre à Leurs Seigneuries, je veux
vous la résumer en quelques mots. Ce système de gouvernement est
déplorable et l'antipathie des habitants contre les occupants ne fait que
croître; leur hostilité est évidente. Dans toutes les bouches, dans
tous les organes, on entend proclamer la souveraineté du Sultan,
successeur du Prophète: pour lui, et contre les Anglais, s'unissent toutes
les forces de la nation égyptienne.
Un Diplomate.
Conférences et Discours du Cheikh Ahou Naddara
(14", 15% 16° et 17% depuis janvier 1903)
C'est hors Paris que le Cheikh a fait ces quatre discours à Ville-
d'Avray, à Fontainebleau, à Montlhéry et à Nogent-sur-Marne.
Comme toujours, ses aimables auditeurs l'ont chaleureusement
applaudi , et ses confrères de Paris et des départements l'ont loué dans
leurs journaux.
Dans ses discours, Abou Naddara n'a pas oublié les quatre pays qui
lui sont chers : la Turquie, l'Egypte, la France et l'Italie.
Et maintenant voici les vers français et italiens par lesquels le Cheikh
a terminé ses diverses allocutions :
A l'anniversaire de la naissance de Garibaldi célébré par
la Lyre Garibaldienne Nogentaise, à Nogent sur Marne.
1 nemici tuoi fuggivano,
Della voce tua. al fragor.
Tu, gli oppressi , festi liberi,
Festii, schiavi, gli oppressor.
La tua mano fu benetica
Verso i figli del dolor.
Vivrà il nome tuo fra i posteri
Pien di gloria e di splendor,
A noi sacra é tua memoria,
O, d'Italia , luce e onor.
ALI.' ITALIA
Il tuo cielo azzurro e timpido,
Tue fiorite e amené sponde,
Del tuo mar le lucide onde;
Quando, o Italia, rivedrô?
I tuoi tigli or f tti liberi
Cal lor senno e colla mano,
Sur magnanimo Sovrano;
Quando, o Italia. rivedrô?
Le tue figlie che non douane
Lor gent I. sublime core
Che a chi outre patrio amore ;
Quando. o Italia, rivedrô ?
Verra il gior o; io'l veggo giungere
Che lia page tal disio
E del genio il suol hatio
Tant' amato rivedrô.
TOAST AUX DAMES PRÉSENTES
Pour la Lyre Garibaldienne,
De vers coquets, j'offre un bouquet
A la Française, à I Italienne
Qui rendent brillant ce banquet.
C'est leur radieuse présence
Qui charme et réjouit mon cœur.
Quelle grâce! quelle élégance!
Quelle bonté! quelle douceur!
Elles inspirent le poète
Par leur esprit , par leur beauté,
Et font de cette grande fête
L'entrain, la joie et la gaîté,
Mes compliments sont très sincères;
Sans ces Dames, pas de succès,
Levons donc, chers Messieurs, nos
Au beau sexe italo-français! [verres
à Ville d'Avray.
Du peintre couronné de gloire.
Qui des Beaux Arts est le soleil.
Le nom de Corot, je vénère,
Nom digne d'immortalité.
Amis, je leve a lui mou verre
Et le bois a votre santé.
Mille grazie Signor Pègnri,
Presidente prediletto,
Dell' invito ch' E'la fecemi
Di presiedere il banchetto
Della Lira patriotica,
Poich' ell' è Garibaldien ;
Di cuor dunque la ringrazio
E la Musa mia cairina,
Sulla lira egizia, un cantico
Scioglier và nelle favelle
Della Francia e dell' Italia,
Nazïoni ognor sorelle ,
Cari amici, empite i calici
D'esto vin spumante e bon
Onde berli alla memoria
Del gran Prode di Digion.
Chers fils d'Italie et de France,
Glorifiez l'immortel héros.
Le soldat de l'indépendance
Qui fit trembler des Généraux!
Plus d une éclatante victoire,
11 remporta sur les tyrans.
Garibaldi! en or. l'histoire
Inscrit ton nom parmi les Grands
Je chante depuis mon jeune àge,
Sur mon doux luth oriental,
Ta haute valeur, ton courage
Et ton esprit juste et loyal.
Mais à ta fête, sur ta Lyre,
Te célèbre Abou Naddara .
Et c est ta langue qui m inspire
Un chant qui jamais ne mourra.
ODE ITALIENNE
Tu di guera fosti il fulmine,
Degli eserciti il terror;
Il tuo braccio fu d'un Ercole,
Di Leone fu il tuo cor.
Fosti l'idol del tuo popolo ,
Dei tuoi prpdi il solo amor
Giusto, nobile e magnanimo
Fosti, o eroico difensor.
Nei due mondi ognor si celebra
Il tuo senno e il tuo valor.
E i guerrieri lor t'appellano,
Delle pugne il vincitor.
Qual eroc poté resistere,
Della spada tua, al furor?
A la Fête de Corot.
Quoique je ne sois ni Racine,
Ni Musset, ni Clément Marot,
Ni Richepin, ni Lamartine,
Je veux chanter le grand Corot.
Je veux célébrer la mémoire
De cet artiste sans pareil,
Au déjeuner champêtre de l'Athénée, à Montlhéry.
Bonneval, je vous entends dire,
Et vous, Mesdames et Messieurs,
« Le pauvre Cheikh, rien ne l'inspire;
Il n'est plus jeune ; il est si vieux. »
Vous avez tort; car, malgré l'âge.
Je trouve toujours un quatrain
Pour en faire au beau sexe hommage.
Le beau sexe est mon souverain.
Au banquet des
Rousseau . cher confrère de France,
Reçois mes vits.remerciments.
A toi,je dois la connaissance
Des 1, artistes et savants.
Depuis dix ans je les fréquente,
Ils sont vraiment délicieux ;
Leur compagnie est si charmante!
Leur accueil est si gracieux!
Immense plaisir, j'éprouve
Dans leur douce société;
Car ma jeunesse, je retrouve
Avec sa verve et sa gaîté.
En l'honneur des t, dont j'admire
Le talent, la vertu, l'esprit
Je veux célébrer sur ma lyre
Le splendide et joli Paris.
Salut, Paris, Ville Lumière,
Sol natal d'hommes éminents!
Je suis son dévoué poète
Et son sincere admirateur.
C'est lui qui donne a votre fête
L'entrain, la joie et la splendeur.
De ses tilles la France est tiere,
Ce sont des anges de beauté.
Je lève a h ur bonheur mon verre
Et je le bois à leur santé.
1, à Fontainebleau
Pour toi mon amour est sincère
El mes vœux sont toujours ardents.
Loin de toi mon cœur et mon âme
Soup rent comme l'amoureux
Apres la belle qui l'enflamme
Et d'un regard ie rend b ureux.
Les souffrances de ma patrie
Et les chagrins de mon exil,
J'oublie en toi, ville chérie,
Dont la Seine devint mon Nil.
Tes braves fils, tes chères filles,
M'honorent de leur amitié.
Au sein de leurs bonnes familles,
Je suis toujours fête , choyé.
Paris! que Dieu donne a ta France
La paix et la prospérité!
Qu'en Elle règne la Science
Et triomphe la Liberté!