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Laborde, Alexandre Louis Joseph de; Laborde, Léon Emmanuel Simon Joseph de [Hrsg.]
Voyage de l'Asie mineure — Paris, 1838

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https://doi.org/10.11588/diglit.4046#0232
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A VAS.

5 JAWIF.R 182

ô heures.

— 140 r-

de NADJARLiKEDi Nous traversons les montagnes qui rejoignent le rameau sur lequel nous avons passé de Messis à
Nadjarlikeuï, puis nous entrons dans de grandes plaines où les Turcomans font paître d'innombrables
troupeaux Quelques mamelons séparent ees pâturages de la mer, et des broussailles interrompent la
monotonie de eetle solitude et lui donnent certains aspects pittoresques. Je caractérise ainsi cet
espace quoiqu'il soit traversé en tous sens par des êtres animés, et parce que des patres et des trou-
peaux ne constituent pas une population aux yeux d'un Européen. Habitué à voir à l'horizon le clo-
cher du village, il cherche ici la pointe du minaret, et ne voit ni une ville ni un village, pas même
une maison. De distance en distance la plaine verdoyante est moutonnée par un troupeau que garde
un homme, ou plutôt une niasse assez semblable dans sa silhouette à un capucin de carte. C'est un
pâtre turcoman enveloppé, ou plutôt entré tout d'une pièce dans une houppelande de gros feutre, à
capuchon pointu, ayant un trou dans le dos pour laisser passer le fusil porté en bandoulière.

AYAS ^Pl. LXX1X, i65).

Vue de la forteresse ruinée et du port abandonné dans le golfe d\Alexandrette.

(Dessinée par Léon de Laborde.)

Le village d'Ayas est formé de la réunion de quelques cahutes au milieu des murs crénelés d'un
vieux château fortifié par les croisés, sur l'emplacement de l'ancienne ^Egaeae. Sa population misérable
vivait de piraterie sous les pachas précédents; elle est réduite aujourd'hui à faire la pêche Je long
de cette côte dépeuplée, et le cabotage, quand de rares voyageurs, comme nous, pour se rendre à Alexan-
drette, veulent s'éviter la peine de contourner son golfe. 11 est difficile de faire la part de la ville an-
tique dans la ville du moyen âge, et de la ville de nos croisés dans la ville des Turcs; cependant une
partie des murs de la ville, l'emplacement d'un temple sur une hauteur, un pont sur un ruisseau, et
d'innombrables tombeaux creusés dans les rochers que baigne la mer, au milieu des carrières de l'an-
cienne ville, appartiennent à l'ancienne /Egaeae, dont on peut déterminer assez exactement la position
et l'étendue, à l'ouest du château, le long de la côte. On abandonnera au moyen âge toutes les cons-
tructions formées avec les débris antiques, le château tout entier sur la terre ferme, et un autre château
construit sur un îlot dans la mer, et relié au premier par une jetée qui formait le port. Aux Turcs il
faudra laisser quelques modifications dans le système de défense et la construction d'une grande tour
à l'extrémité des ruines; enfin, aux habitants actuels un petit nombre de cabanes misérables, presque
ensevelies sous le fumier de leurs troupeaux.

JNous n'avions ni le temps ni le courage de nous détourner de notre but; aussi laissons-nous à notre
droite, et à douze heures de marche, le cap Karadagh, le cap Mal lu s des anciens, où nous aurions trouvé,
nous dit-on, deux châteaux, l'un dans la mer, l'autre sur un mamelon de la terre ferme, au milieu
d'un bois, tous deux sur la rive droite du Pyramus; mais il nous faut du repos: nous espérons le
trouver à Alep, et nos seuls soucis consistent à presser un embarquement que la paresse orientale ra-
lentit, et à espérer du ciel un passage rapide que le vent ne favorise pas.

Pendant que notre esquif traverse cette mer, nos chevaux et nos bagages longent la côte sous la
conduite de nos gens et de M. le docteur Hall, notre aimable compagnon, qui, plus persévérant que nous,
veut mener a bonne fin cette longue exploration de l'Asie Mineure et ne pas se détourner devant Je
champ de bataille d'Issus. Je lui laisse le soin de décrire sa route, et je m'associerai à tous les érudits
pour lui demander la publication de son récit de voyage.

Après sept mois passés dans cette Asie Mineure, contrée privilégiée, nous quittons ses rives, l'esprit
rempli de ses souvenirs, l'imagination exaltée par la beauté de sa nature, par les magnificences ignorées
de ses villes ruinées et de ses monuments encore debout. Le temps n'est pas loin où la science, comme
autrefois le goût des plaisirs, quittera l'Occident pour venir s'établir dans cette belle partie de l'Orient :
alors elle étudiera à loisir ces restes d'une civilisation belle jusque dans ses erreurs ; elle décrira ces
créations du génie de l'Orient et de l'Occident, écloses par l'effet de leur fusion et sous l'influence
de ce doux climat, de cette riche nature; alors aussi on critiquera mes croquis imparfaits, mes des-
criptions incomplètes, et l'on aura raison, si l'on oublie dans quelles circonstances je les ai faits et avec
quelle absence de prétention je les mets au jour. Si l'on est assez juste pour m accorder au moins le
mérite d'avoir signalé, le premier, la plupart de ces belles ruines, de ces sites enchanteurs, et de les
avoir dessinés fidèlement, quoique en courant, de les avoir décrits en détail, quoique en présence de
quelques dangers, tandis que d'autres pourront maintenant les étudier à leur aise; si l'on me fait
cette juste part, j'aurai obtenu la récompense de mes efforts et une compensation à mes fatigues.

FIN.
 
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