5^8 Histoîre des Turcs
gran
lie.
15 5 i. coustume du pays,chaque maison faisant vn homme,mais mal-arme & mal aguerry, aîns
--' s'asseuroit seulement sur quinze mil hommes qui estoient souldoyez par Ferdinand^ SC
sur tout en cinq cens Espagnols , au quartier desquels il faisoit tousiours dresser son logis,
Ceste grande armée fit retirer les Turcs à grande halte : si bien qu'ils laisserent mesmes
Et'enfcrt dans leurs tranchées plus de deux cens boulets de fer d'artillerie, que les Aiduchs,(qui
dc sont gens de pied en Hongrie, portans cuirasses, halebardes, arcs ,sseches,arbalestres, &
cimeterres) lesquels ceux de Themisvvarauoientenuoyez pour reconnoistrelesdesscins
des Turcsjfirent apporter dans laville.Cecy estant secu parles chefs de l'armée de Fer-
dinand , ils se resolurent d'aller asiieger Lippe. Castaldo l'auoit auparauant fort débattu
Différent auecle Moyne Georges,quipar vne intelligence secrettequ il auoit auec les Turcs , ne
entre Ca. trouuoit point à propos qu'on allast assieger celle ville , voulant parauanturedonner
Ge^°es ^mps à celuyqui estoit dedans,de se retirer. Mais ayant seeu la retraite du Balla,il feignit
pour te sic. d'en estre fort content,de sorte que d'vn commun accdjà ils allèrent mettre le siegede-
ge deLippe. uant Lippe : car on estoit tout asseuré qu Vlman qui en auoit la garde, estoit tout resoîu
de se bien defFendre.
Georges Comme doneques ils continuoientleur chemin,&: qu'ils estoient à quatre milles de
hk cardi- jLïppe,Ie vingtiesme d'Octobre arriuerent nouuelles à Georges,comme à la requeste du
Roy Ferdinand, on apportoit lechappeau de Cardinal que luy enuoyoit le Pape Iules,
auecqueles lettres de plulleurs Cardinaux; qui sans le connoistre,se conjouyssoient que
ceste dignité luy fust arriuée : ayant mesme estérecêu (escriuoient-ils ) auecque i'vnani-
me consentement de tout leur collège. Ces lettres l'ayans tout resioiïy d'vn costé, 3c dVn
autre craignant que le Turc entrait en quelque deffiance de luy , il faisoit bon visage , &c
s'en resioiiy doit', quâd il estoit auecque les plus Grands-mais auecques les autres il faisoit
semblanc dc n'en faire pas beaucoup de cas : car desirant se maintenir auecques les Turcs
Vemna er ^ auecques le Roy Ferdinandjil voyoit bien qu'il auoit beaucoup osfencé ceux-là , pour
enîrc:°i?ux gratifier cestuy-cy • &;partantil craignoitque Solyman l'enfist ressentir, quand l'armée
eaux^ause <je perdinand seroit retirée: or vouloit-il par ses artisices entretenir si bien ces deux partis
qu'il peust cependant iouyrpaisiblementde la Transiluanie: mais Castaldo découuroic
toutes ses ruses,& sans luy faire paroistre qu'il eust aucune deffiance dc luy , il se tenoit
neantmoins sur ses gardes ^ outre ce que Ferdinand luy auoit enuoyévn gentil-homme
Ferdinand exprès nommé ïuîes Salazar, pour luy dire qu'il auoit esté aduerty par aucuns siens
CaMo Secrétaires,qui estoient tant à la Porte de l'Empereur Turc,qu'en la Cour deSigismond
qu'il se de- Roy de Pologne,que Georges faisoit ce qu'il pouuôit pour s'accorder auec les Turcs,
frire de êc- faisant perdre auec toute son armée, se rendre Seigneur absolu delà Transsiluanie,
c'est pourquoy il l'aduertissoit'd'auoir l'œil sur luy, & le preuenir . en se deffaisant d'vn
homme li perfide • toutesfois Castaldo se conduisit si dextrement , que Georges n'eue
iamais suiet de se défiler de luy.
Continvans doneques ensemble leur entreprise de Lippe, ils y vinrent mettre
L'armée lesicge le dcuxiesmc iour de Nouembre, Georges estant campé deuers le chasteauauec-
nanddc- *IUCS iQS gens, &: Castaldo auec les siens,ayant.occupé la montagne qui commaadoit
uantLippe. en caualier à tout le^reste. Ce que voyant les Turcs, ils sortirent dehors la ville pour
mettre le feu à vnFaux-bourg qui estoit bien muny de viurcs,& principalemét de vin,qui
croist, dit-on,en cequartier,le meilleur qu'on sçauroitdcsirer. Ce queCastaldo ayant re-
connu, y enuoya le Capitaine îean Viglioa, auec cent harquebusiers Espagnols, qui les
fit retirer : il luy auoit auisi enjoint de conseruer tous les^viures qu'il pourroit pour le ser-
uice du camp, mais ilarriua vne chose allez plaisante, si la fin n'en eust esté toute triste.
C'est que Viglioa saisant ce qui estoit commandé , les Aiduchs de Georges se vinrent
ietter lut* le vin,duquel ils beurent en si grande quantité , que leur ayant donné dans la te-
Plaisant as- ste,i ls ne sçauoient plus ce qu'ils faisoient: si bien que cinq cens d'entr'eux poussez de ce-
saut des m- ste furie bacchanale , sans auoir autre conduitequelemesmeBacchus, s'en allèrent sans
duchs a la l r r rr • J
villedcLip- aucun ordre & lans'escheles astaillir la ville. Ce qui mit du commencement vne grande
alarmeaucamp : car on ne sçauôit d'où cela venoit. Les Turcs croyoient de mesme
que leurs ennemis allassent à l'assaut sans faire brèche,■& qu'ayans planté leurs escheles,
ils vinssent àl'escalade: mais après auoir couronné la muraille de leurs harquebusiers,&r
qu'ils eussentveu ses Aiduchs attachez au pied d'icelîe,quasi corne bestes, les Turcs ré-
pondirent à coups d'harquebusades auxiniures que les coups de verre faisoient dire à ses
yurongo es:&: non seulemet les gens de pied firent ceste insolence,mais les gens de cheual
poussez dvne mesme manie , vinrent encore brauer ceux de dedans,l'espéeàla main , fî
gran
lie.
15 5 i. coustume du pays,chaque maison faisant vn homme,mais mal-arme & mal aguerry, aîns
--' s'asseuroit seulement sur quinze mil hommes qui estoient souldoyez par Ferdinand^ SC
sur tout en cinq cens Espagnols , au quartier desquels il faisoit tousiours dresser son logis,
Ceste grande armée fit retirer les Turcs à grande halte : si bien qu'ils laisserent mesmes
Et'enfcrt dans leurs tranchées plus de deux cens boulets de fer d'artillerie, que les Aiduchs,(qui
dc sont gens de pied en Hongrie, portans cuirasses, halebardes, arcs ,sseches,arbalestres, &
cimeterres) lesquels ceux de Themisvvarauoientenuoyez pour reconnoistrelesdesscins
des Turcsjfirent apporter dans laville.Cecy estant secu parles chefs de l'armée de Fer-
dinand , ils se resolurent d'aller asiieger Lippe. Castaldo l'auoit auparauant fort débattu
Différent auecle Moyne Georges,quipar vne intelligence secrettequ il auoit auec les Turcs , ne
entre Ca. trouuoit point à propos qu'on allast assieger celle ville , voulant parauanturedonner
Ge^°es ^mps à celuyqui estoit dedans,de se retirer. Mais ayant seeu la retraite du Balla,il feignit
pour te sic. d'en estre fort content,de sorte que d'vn commun accdjà ils allèrent mettre le siegede-
ge deLippe. uant Lippe : car on estoit tout asseuré qu Vlman qui en auoit la garde, estoit tout resoîu
de se bien defFendre.
Georges Comme doneques ils continuoientleur chemin,&: qu'ils estoient à quatre milles de
hk cardi- jLïppe,Ie vingtiesme d'Octobre arriuerent nouuelles à Georges,comme à la requeste du
Roy Ferdinand, on apportoit lechappeau de Cardinal que luy enuoyoit le Pape Iules,
auecqueles lettres de plulleurs Cardinaux; qui sans le connoistre,se conjouyssoient que
ceste dignité luy fust arriuée : ayant mesme estérecêu (escriuoient-ils ) auecque i'vnani-
me consentement de tout leur collège. Ces lettres l'ayans tout resioiïy d'vn costé, 3c dVn
autre craignant que le Turc entrait en quelque deffiance de luy , il faisoit bon visage , &c
s'en resioiiy doit', quâd il estoit auecque les plus Grands-mais auecques les autres il faisoit
semblanc dc n'en faire pas beaucoup de cas : car desirant se maintenir auecques les Turcs
Vemna er ^ auecques le Roy Ferdinandjil voyoit bien qu'il auoit beaucoup osfencé ceux-là , pour
enîrc:°i?ux gratifier cestuy-cy • &;partantil craignoitque Solyman l'enfist ressentir, quand l'armée
eaux^ause <je perdinand seroit retirée: or vouloit-il par ses artisices entretenir si bien ces deux partis
qu'il peust cependant iouyrpaisiblementde la Transiluanie: mais Castaldo découuroic
toutes ses ruses,& sans luy faire paroistre qu'il eust aucune deffiance dc luy , il se tenoit
neantmoins sur ses gardes ^ outre ce que Ferdinand luy auoit enuoyévn gentil-homme
Ferdinand exprès nommé ïuîes Salazar, pour luy dire qu'il auoit esté aduerty par aucuns siens
CaMo Secrétaires,qui estoient tant à la Porte de l'Empereur Turc,qu'en la Cour deSigismond
qu'il se de- Roy de Pologne,que Georges faisoit ce qu'il pouuôit pour s'accorder auec les Turcs,
frire de êc- faisant perdre auec toute son armée, se rendre Seigneur absolu delà Transsiluanie,
c'est pourquoy il l'aduertissoit'd'auoir l'œil sur luy, & le preuenir . en se deffaisant d'vn
homme li perfide • toutesfois Castaldo se conduisit si dextrement , que Georges n'eue
iamais suiet de se défiler de luy.
Continvans doneques ensemble leur entreprise de Lippe, ils y vinrent mettre
L'armée lesicge le dcuxiesmc iour de Nouembre, Georges estant campé deuers le chasteauauec-
nanddc- *IUCS iQS gens, &: Castaldo auec les siens,ayant.occupé la montagne qui commaadoit
uantLippe. en caualier à tout le^reste. Ce que voyant les Turcs, ils sortirent dehors la ville pour
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croist, dit-on,en cequartier,le meilleur qu'on sçauroitdcsirer. Ce queCastaldo ayant re-
connu, y enuoya le Capitaine îean Viglioa, auec cent harquebusiers Espagnols, qui les
fit retirer : il luy auoit auisi enjoint de conseruer tous les^viures qu'il pourroit pour le ser-
uice du camp, mais ilarriua vne chose allez plaisante, si la fin n'en eust esté toute triste.
C'est que Viglioa saisant ce qui estoit commandé , les Aiduchs de Georges se vinrent
ietter lut* le vin,duquel ils beurent en si grande quantité , que leur ayant donné dans la te-
Plaisant as- ste,i ls ne sçauoient plus ce qu'ils faisoient: si bien que cinq cens d'entr'eux poussez de ce-
saut des m- ste furie bacchanale , sans auoir autre conduitequelemesmeBacchus, s'en allèrent sans
duchs a la l r r rr • J
villedcLip- aucun ordre & lans'escheles astaillir la ville. Ce qui mit du commencement vne grande
alarmeaucamp : car on ne sçauôit d'où cela venoit. Les Turcs croyoient de mesme
que leurs ennemis allassent à l'assaut sans faire brèche,■& qu'ayans planté leurs escheles,
ils vinssent àl'escalade: mais après auoir couronné la muraille de leurs harquebusiers,&r
qu'ils eussentveu ses Aiduchs attachez au pied d'icelîe,quasi corne bestes, les Turcs ré-
pondirent à coups d'harquebusades auxiniures que les coups de verre faisoient dire à ses
yurongo es:&: non seulemet les gens de pied firent ceste insolence,mais les gens de cheual
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