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Cassas, Louis François ; Lavallée, Joseph [Hrsg.]; Née, François Denis [Hrsg.]
Voyage pittoresque et historique de l'Istrie et de la Dalmatie — Paris, 1802

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https://doi.org/10.11588/diglit.4786#0080
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64 VOYAGE DE L'ISTRIE

au retour un repas splendide aux sénateurs et aux procurateurs de Saint

Marc.

On fait remonter l'origine de cette cérémonie au pontificat d'Alexandre III,
qui, selon quelques auteurs, donna aux Vénitiens la jouissance de la mer Adria-
tique. L'orgueil aristocratique du sénat n'en convenoit pas cependant, et pré-
tendoit que ce pape n'avoit fait que confirmer cette prise de possession qui se
renouveloit tous les ans. On ne peut s'empêcher de sourire quand on voit
quelques hommes sanctifier ainsi leurs invasions et s'approprier de la sorte au
nom de Dieu et de la justice ce qu'ils savoient sciemment ne pas leur appar-
tenir davantage qu'au reste de la terre. Le pape Jules II plaisantoit un joui-
un ambassadeur vénitien, nommé Jérôme Domat, sur le mariage de son doge
avec la mer, et lui demandoit où se trouvoient les titres et les pièces justifica-
tives dont l'on se servoit pour dresser le contrat de mariage ? L'ambassadeur
lui répondit que ces titres se trouvoient au dos de l'acte original de la dona=:
tion faite par l'empereur Constantin au pape Silvestre. Et voilà comme ces
hommes se persiffloient réciproquement sur leurs usurpations.

Les idées d'un artiste sont communément plus grandes que celles de ceux
qui ont recours à ses talents. Il n'étoit question que de dessiner des vues de
Trieste : mais le citoyen Cassas vit sur les cotes de I'Istrie et de la Dalmatie
de riches débris de l'antiquité; il sentit l'utilité dont il pouvoit être aux arts
et à l'histoire peut-être, en ne se renfermant pas dans le cercle étroit qu'on
lui avoit tracé. De simples dessins de paysages lui parurent d'une bien foible
importance en comparaison des fruits qu'il pouvoit retirer de son voyage s'il
lui donnoit plus d'étendue. Il résolut donc de visiter les différentes places
de ces parages, riches encore des monuments que les Romains y laissèrent,
et de rendre un service à l'archéologie en en transmettant à l'Europe des vues
fidèles et relevées avec un soin scrupuleux. Il fit part de son projet à quelques
Français et quelques Milanais de sa connoissance qu'il rencontra à Venise.
Daché, Barthe, Layed de Becheville , de Boulogne, Bonelli , Visconti , et
quelques autres, électrisés par la peinture qu'il leur faisoit des charmes d'un
semblable voyage, se résolurent à l'accompagner; voyageurs eux-mêmes,
peu d'obstacles s'opposoient à ce déplacement : mais cette première chaleur
s'éteignit bientôt, et nous les verrons quelques jours après laisser notre artiste
poursuivre seul sa généreuse entreprise.

Us frétèrent donc une petite felouque qu'ils munirent des provisions
nécessaires. Le 27 mai ils s'embarquèrent à la Piazetta, et, servis par un
vent favorable, ils traversèrent pendant le reste du jour et pendant la nuit
le golfe de Venise. Le lendemain à la pointe du jour ils reconnurent les
côtes de I'Istrie, les hautes montagnes du Tirol leur restant à bas-bord; et
le soir ils entrèrent dans le port de Trevigno ou Rovigno, jolie ville, située
sur un rocher dans une presqu'isle sur la côte occidentale de I'Istrie. Cette
ville, bien bâtie, contient à-peu-près dix mille habitants. Il est assez naturel
que ses édifices soient solidement construits et que leur architecture annonce
une sorte d'élégance, puisque les carrières quelle possède sont celles d'où
 
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