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La Lune — 3.1867

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https://doi.org/10.11588/diglit.6786#0198

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LA LUNB

3

Madame X... avait mis une épaisse voilette. Dame ! quand on
est couverte de boutons — (comme les dames exagèrent, les jours
de lièvre), — il faut bien ne pas dégoûter les passants. Et pour-
tant... si... moi qui vous parle...

Mais, figurez-vous qu'un coquin de vent d'ouesUeut l'aplomb
de souffler toute la journée, et il prit à tâche, l'affreux garne-
ment, de contrarier Mme X. en soulevant à chaque instant sa
voilette. Lutte horrible d'une frêle créature contre les éléments
conjurés !!!

Ecoutez, — ces choses-là n'arrivent qu'à Madame X... — En
outre, dis-je, Madame X... ne fit qu'être rencontrée par des amies
malicieuses et bavardes.

Naturellement, Madame X... ne voulant dégoûter personne,pres-
sait le pas, et feignait d'être myope quand elle croisait une de
ses connaissances.

Naturellement, aussi les dames ne comprenaient rien à la con-
duite de leur amie Mme X..,, si soigneusement voilée, et qui
semblait si pressée. Elles riaient donc en la coudoyant.

Mme X..., pensant à son petit bouton, le sachant vu par tout le
monde, était furieuse et malheureuse, oh ! bien malheureuse 1

Enfin, elle atteignit le soir de cette journée mémorable.

En rentrant, elle déclara avoir une affreuse migraine ; affreuse
est l'adjectif employé avec emphase les jours de petit bouton,
Elle ne dîna pas.

M. X., rentré d'une humeur charmante, plaisanta agréablement
sa femme. Imprudent!

Il vaut mieux tirer la queue des lions dans leur repaire que
de plaisanter une femme qui feint de souffrir!

Madame X... le regarda sans dire un mot, se leva comme
un spectre, et se retira dans ses appartements, reine à jamais
offensée.

— Bahl murmura monsieur X... Tout ça ne m'empêchera pas
d'aller à la première de Jules.

Il sonna. La bonne parut.

— Théodorine, lui dit-il, madame est allée se coucher, avee la
fièvre. Je ne vous conseille pas de vous y frotter. — Maintenant
apportez-moi la boîte aux cigares, et faites chauffer mes bottines,
je vais sortir, et...

En ce moment Un violent coup de sonnette lui coupa la pa-
role...

— Fichtre ! poursuivit M. X,., — Ouvrez vos ailes, ma fille...

Le coussn Jacquks.

PROPOS EN L'AIR

Maintenant que l'Exposition n'est plus, les Parisiens naïfs s'i-
maginent que les cochers rabattront un peu de leur avidité, —
et qu'il ne sera pas nécessaire de payer cinquante francs pour
aller du Champ-de-Mars à la barrière de l'Etoile.

Je crois que les Parisiens se mettent le doigt dans l'œil.

En effet, — moins il y aura de monde à Paris, — et plus on
trouvera de cochers à vide.

Jules,— un petit crevé do la plus belle eau,— fait actuelle-
ment la cour à la petite Frisette, jeuno ingénue très-connue dans
un certain monde pour.sa fidélité à l'infidélité et pour sa morale
très-indépendante.

Jules agit envers elle en vrai pigeon, et lui roucoule toute la
journée les mille flatteries qu'on devrait réserver pour une classe
de femmes beaucoup plus pures.

— Tu es fou, cher, lui disait l'autre jour Arthur Brouillard ;
pourquoi toutes ces simagrées ? Avec une femme de cette catégo-
rie, on n'observe pas les convenances... On saute dessus.

— liast! dit Paul, si j'agis ainsi, c'est pour me conformer au
proverbe :

Il faut roucouler pour mieux sauter.

DEMI-DEUIL

Madame, le grand deuil, hiver de la toilette,
Demain sera (ini. — Plus de noir absolu !
Le long voile fait place à la courte voilette ;
Le livre des douleurs est déjà presque lu.

Vous revenez aux tons joyeux de la palette !
Au mérinos sinistre, au cachemire élu,
Va succéder la soie ou grise ou yiolette ;
Le temps des regrets est à moitié révolu.

Sur votre lèvre — austère encor —se glisse, alerte,
Un sourire I — Et l'Amour, quelques larmes dans l'œil,
N'a plusqu'un mince crêpe à son aile entr'ouverto.

Ainsi dans les jardins, après l'hiver, ce deuil,
On voit — avant que Mai fleurisse notre seuil,
Au bout des rameaux noirs rire une pousse verte !

BRhKST d'HerVH,I/1

GAZETTE A LA MAIN

n Brr! brr! Voici l'hiver, l'hiver couronné do glace, l'hiver au
nez rouge, l'hiver aux doigts gonflés par l'onglée... Brr! brr!
Voici l'hiver!

« C'est fini, ma belle Gretchon, il ne faut plus penser aux
longues promenades sous les arbres, quand les phalènes bour-
donnent dans l'air, quand les champs sont baignés par la lune
argentée...

« C'est fini !

« Adieu les folies courses à travers les bois, les amours tapis
dans les feuilles, les baisers furtifs au détour de la chesnaie,
tout ce qui est le charme de la belle saison des fleurs, de la belle
saison des blés, de la belle saison des fruits !

« Brr! brr! Voici l'hiver, l'hiver couronné de glace, l'hiver au
nez rouge, l'hiver aux doigts gonflés par l'onglée... Brr! brr!
Voici l'hiver !

* *

Voici

« Brr ! brr ! Voici l'hiver, l'hiver couronné de glace
l'hiver!

« Mais n'a-t-il donc pas ses joies, ma Gretchen ?...

«Tonton tontaine !... tonton tontaine!.,. Ecoute!... C'est le
cor, le cqr du chasseur, que les échos répètent.., Tontaine ! ton-
taine !... Les vois-tu, les chiens haletants... Le cerf est passé...
Qu'il est loin ! Tontaine!... Les vois-tu, les chasseurs furieux,
les chevaux fumants, les piqueurs, les valets, les gardes... Ton-
ton !...

« Quels sont ces accords? — Habille-toi, ma Gretchen, c'est le
bal, le bal de la présidente. — Mets ta jolie robe rose, et la coif-
fure que je t'ai donnée... Mais non, ne t'habille pas, mon amour,
tu serais trop belle... Tu les ferais toutes mourir...

« Tu veui demeurer? — Tu as raison, ma Gretchen... Auprès
de ce foyer allumé, nous resterons... Toi ici, moi à tes côtés. Tu
travailleras, et je te lirai ce conte qui te plaît tant.

« Charme du foyer 1...

« Le feu pétille, il souffle gaiement ou il se plaint,,tantôt il
chante, tantôt il pleure... Des petits démons l'attisent et les sala-
mandres sautillent en se cabrant,..

« ...Et toi, Gretchen, dis-moi cette douce chanson des pays du
soleil, cantique semblable à celui de .Mignon ; dis, et je t'écou-
terai...

« Brr! brr! voici l'hiver.,. »

* *

A la correctionnelle. — Le prévenu est traduit pour avoir brisé
la vitrine d'un pharmacien et dérobé une boîte de pastilles.

— Prévenu, qu'avez-vous à dire pour votre justification?

— Mon président, je ne nie pas le fait, mais c'est la faute à
mon médecin.

— Comment? à votre médecin?

— A lui-même. J'avais l'autre jour un rhume des plus violents
que je ne pouvais parvenir à guérir. Je vais trouver le docteur
qui m'ordonne de prendre de la pâte Regnault.

— Eh bien, est-ce que vos moyens d'existence ne vous permet-
taient pas de faire cette emplette ?

— Mon Dieu, si! mon président, mais le docteur ne m'avait
point dit d'acheter des pastilles Ilegnault, il m'avait dit de les
p rendre. J'ai Buivi l'ordonnance, voilà tout !

Nous trouvons dans un vénérable bouquin anglais une assez
jolie boutade à propos de la gravité.
L'oiseau le plus grave est un hibou.
L'animal le plus grave est un âne.
Le poisson le plus grave est une huître.
L'homme le plus grave ^ist un sot.

L'humoriste qui a trouvé ces définitions manquait évidemment
de gravité.

— L'humanité vient de faire une nouvelle conquête : la fièvre
bleue. C'est un médecin de New-York qui nous annonce cette
bonne nouvelle en souhaitant naturellement la bienvenue au nou-
veau fléau.

Nous possédions déjà la fièvre rouge (la rougeole), la fièvre
jaune (le vomito negro), la peste noire (le choléra), et voici, pour
compléter l'arc-en-ciel pestiféré, la fièvre bleue qui nous arrive.

Depuis quelque temps la Providence nous .en fait voir de toutes
les couleurs.

XX,

La note simple, tendre et émuo de ce lied en prose ne vous
rappelle-t-elle pas les adorables mélancolies de Novalis et de
Richter ?

Un jeuno homme me l'apporta, voici tantôt huit ans, quand

j'étais mousquetaire — au Gaulois, — comme chante la chanson,_

— un jeune homrhe si mince, si rose, si timide, si imberbe, qu'on
eût dit un corset dans un pantalon !

Depuis, Jules Glaretie a pris de la carrure, du poil, de l'assu-
rance. L'escrime du petit journalisme l'a assoupli et fortifié.
Léonidc Leblanc l'embarrassait jadis; aujourd'hui, la Révolution
ne lui fait pas peur.

Je n'ai parcouru les Derniers Montagnards, — de même qu' Un
Assassin et que Mademoiselle Cachemire, du reste, — que de ci de
là, par fragments, dans les comptes-rendus élogieux de nos con-
frères ; mais de ces lectures sur le pouce il m'est resté une pro-
fonde estime, une sympathie sincère pour le caractère et pour
l'esprit de l'écrivain...

Aussi ai-jo appris avec plaisir que son ouvrage en est à la se-
conde fournée ! Dans la position enviable qu'il occupe, et dont il est
digne, Jules Claretie a toujours su se montrer plein de cordialité
et d'indulgence pour ceux qui, ayant peut-être le même talent,
n'ont pas eu le même bonheur.

Les amis de Philoxène Boyer s'étonnaient do ce singulier pré-
nom : Philosccne.

— De père èn fils, leur répondit-il, mes parents ont été pro-
fesseurs de l'Université et enragés hellénistes,

Mon grand-père baptisa mon père du nom de Strèpsiadôs.

Or, ce prénom extraordinaire attira à mon père, pendant toute
sa vie, une foule de plaisanteries. Quand je vins au monde, le
digne homme voulut m'épargner ce désagrément.

La veille de mon baptême, il chercha dans sa tête, une tête
d'helléniste, le nom le plus simple, le plus fréquemment em-
ployé. Ses souvenirs ne lui présentèrent rien de plus usité que
« Philoxène. i>

En effet, ne lisait-il pas ce mot-là tous les jours?

Ainsi, mes amis, la singularité de mon prénom me vient de sa
simplicité.

Les deux frères L... sont jumeaux et s3 ressemblent comme
i deux gouttes de coco.

J'avais besoin d'en voir un,..
J'interroge leur concierge :

— M. L... est-il chez lui?

— Lequel ? Ils sont deux.

— Le plus petit.

— Ils sont petits tous les deux.

— Le plus laid...

— Ils sont laids tous les deux.

— Enfin, le plus ennuyeux !...

— Ma foi, monsieur, je n'ai jamais pu les distinguer.

Entra portières

— Qu'est-ce que fait votre aînée, manie Fisson ?

— Nasiel... Heu!.-.. La pauvre fille! j' l'ai fichue dans le polis-
sage !...

— Et la cadette, quel état, sans vous commander?

— Un état !... Mon Esther I.,. — Dieu merci, elle est assez

jolie pour s'en passer.

L'Usurier de- village.

L'Odêon le joua naguère, non sans un grand succès, ce drame
aux reflets shakespeariens ou Hamlet et Shylock se coudoient
dans Balzac et dans Georges Sand,

Aujourd'hui, à la Porte-Saint-Martin, il sert de trait-d'union
entre une revue et une féerie.

Ce voisinage dangereux lui nuit assurément. Grandet et Thomas
Vireloque sont deux pauvres diables bien ternes et bien râpés, si
on les compare au prince Souci et à la princesse Aïka. Quant à ces
valeureux compères qui s'appellent Amédée Rolland et Charles
Bataille, je doute qu'ils puissent l'aire une concurrery sérieuse
aux dompteurs Batty et Lucas,

La pièce est proprement montée. Les interprètes sont conscien-
cieux. Vannoy, Antonin et Mme Marie Boutin méritent des éloges
particuliers. Je ne vois pas en vérité ce que le rôle de Denizet a
pu gagner à ne pas être laissé à M. Stuart.

-Heu de l'imprimerie et du Iiasard

Je lis dans une feuille belge :

Nos abonnés sont prévenus que nous commencerons lundi prochain
notre nouveau roman intitulé : Aukilard, (REPRODUCTION IN-
TERDITE.)

*

Item dans un journal de Bordeaux :

le dentiste restera dans son cabinet
pendant la durée de la foire

On causait — à la Chambre — des poésies de M. Belmontet.

— Il a le travail facile, fit quelqu'un de la Droite. Ses vers no
lui coûtent presque rien.

— Parbleu I riposta quelqu'un de la Gauche, ils lui coûtent ce
qu'ils valent.

Le père Clément, — ce directeur dont la légende a défrayé plus
d'un article, — n'engagea jamais ses artistes qu'au prorata.

Or, par prorata, l'on entend, en argot de coulisses, le partage
des bénéfices réalisés pendant une campagne dramatique, — dé-
falcation faite des frais.

Le prorata est le merle blanc, la pierre philosophale des
troupes de province1.

Ce qui n'empêchait pas le père Clément de dire, chaque année,
à ses nouveaux pensionnaires :

— Mes enfants, le plus beau jour de ma vie sera celui où je
pourrai vous convoquer en assemblée extraordinaire pour vous
distribuer le prorata.

*

* *

A Epinal, les fenêtres do la loge des artistes, — il n'y a qu'une
loge, mais un paravent sépare lej sexes, — s'ouvrent sur la cour
d'un boucher.

Un beau soir, ce boucher avait accroché dans cette cour un
bœuf fraîchement écorchô.

Ce soir-là, l'un des pensionnaires du père Clément, ayant
mieux dîné que d'habitude, prit une des fenêtres de la loge pour
soulagement à des douleurs... intestines.,.

Le lendemain, l'avis suivant était affiché au foyer :

t Dimanche prochain, convocation de ces messieurs et de ces dames
dmis le cabinet du directeur, M. Clément ayant à leur adresser une
communication des plus importantes. La séance s'ouvrira à midi. »

*

On touchait à la fin do la campagne.,.

Sans nul doute, le prorata était arrivé...
. Toute la semaine, la troupo entière rêva gains fabuleux, argent
excessif, recettes .chimériques !.,.

Au jour et à l'heure indiqués, tout le monde était au rendez-
vous..

Le père Clément se tenait debout derrière sa table, — sérieux,
sévère, solennel, — habillé de noir et cravaté de blanc...
Il toussa, cracha, ouvrit la bouche..,

Un silence profond, ému, haletant, régnait dans rassemblée....

— Mesdames et messieurs, prononça le directeur, qui est-ce
qui s'est oublié dans le bœuf?

Emile Blondet.
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