84 L E MUSEUM
fans aucun foin fuperflu de fa perforine : fes cheveux étaient roux & recourbés :
on rapporte auffi qu'une certaine frayeur s'emparait de ceux qui ofoient expofer
N*. II. leurs regards aux fiens.
La Cornaline qui fuit nous offre encore le portrait du même Prince. Sa tête
eft ornée comme l'autre, des dépouilles d'un lion dont la peau eft retenue au
col par un nœud, ainfi que très-fouvent cela fe rencontre dans les médailles
Grecques. Si les traits du vilage ne font pas entièrement d'accord, on ne doit
point en être étonné: les Sçavans connoiffent la différence que nous offrent
entre fes portraits les médailles d'or, d'argent ou de bronze frappées fous
Antonin Caracalla.
: On doit encore être moins furpris de la beauté de tous les portraits que nous
avons d'Alexandre : la crainte de lui déplaire, nous dit Pline, en eft caufe.
Par un Édit folemnel, ce Prince avoit défendu qu'aucun autre qu'Appelles ne le
peignit, qu'aucun autre que Pyrgotèle ne gravât fa figure en Pierre, & qu'au-
cun autre que Lyfippe ne la gravât fur l'airain.
Alexandre eft trop connu , & fes hauts faits font trop abondans pour que
nous voulions entrer dans tous les détails de fa vie. Mais nous croyons que l'on
auroit des reproches à nous faire fi nous ne donnions pas ici un abrégé d'après
lequel on put d'un coup-d'œil fe rappeller quel fut ce Héros.
Né d'OIympias , époufe de Philippe, le jour même où le trop fameux
Éroftrate brûla le temple d'Éphèfe , ce Prince montra, dès fa plus tendre
jeuneffe la plus vive ardeur pour toute efpèce de gloire , & l'ambition la plus
forte ; il n'eut voulu concourir aux jeux que s'il eut eu des Rois pour antagonifles ,
& les conquêtes de fon père, quoique glorieufes , excitoient en lui la crainte
de n'avoir plus rien à faire : les Ambaffadeurs s'en retournoient d'auprès de lui ,
furpris du genre de fes queftions, plus dignes de l'âge mûr que de la jeuneflè.
Les plus heureux génies ont befoin d'être fécondés par des maîtres difiin-
gués , & le choix de ceux qui doivent former les Souverains doit être fait
avec l'attention la plus fcrupuleufe. Ariftote vivoit fous Philippe, & Philippe
fut affez fage pour l'attacher à fon fils. Si Philippe fçavoit apprécier
Ariftote, Alexandre de fon côté lui payoït ce tribut d'efiime fi bien acquis &
fi fouvent négligé par les Grands, qui ne voyent dans ceux qui les inftrui-
fent que des perfonnages importuns, ou qui les méprifent comme des hommes
à gage. Ariftote étoit aux yeux d'Alexandre ce qu'il devoit être, c'étoit pour lui
un fécond père auquel il dormoit la moitié d'un cœur, dont 'la nature lui
faifoit offrir l'autre à Philippe. Je fuis redevable à l'un de vivre, difoit-il, &
"" ^ifêffî
fans aucun foin fuperflu de fa perforine : fes cheveux étaient roux & recourbés :
on rapporte auffi qu'une certaine frayeur s'emparait de ceux qui ofoient expofer
N*. II. leurs regards aux fiens.
La Cornaline qui fuit nous offre encore le portrait du même Prince. Sa tête
eft ornée comme l'autre, des dépouilles d'un lion dont la peau eft retenue au
col par un nœud, ainfi que très-fouvent cela fe rencontre dans les médailles
Grecques. Si les traits du vilage ne font pas entièrement d'accord, on ne doit
point en être étonné: les Sçavans connoiffent la différence que nous offrent
entre fes portraits les médailles d'or, d'argent ou de bronze frappées fous
Antonin Caracalla.
: On doit encore être moins furpris de la beauté de tous les portraits que nous
avons d'Alexandre : la crainte de lui déplaire, nous dit Pline, en eft caufe.
Par un Édit folemnel, ce Prince avoit défendu qu'aucun autre qu'Appelles ne le
peignit, qu'aucun autre que Pyrgotèle ne gravât fa figure en Pierre, & qu'au-
cun autre que Lyfippe ne la gravât fur l'airain.
Alexandre eft trop connu , & fes hauts faits font trop abondans pour que
nous voulions entrer dans tous les détails de fa vie. Mais nous croyons que l'on
auroit des reproches à nous faire fi nous ne donnions pas ici un abrégé d'après
lequel on put d'un coup-d'œil fe rappeller quel fut ce Héros.
Né d'OIympias , époufe de Philippe, le jour même où le trop fameux
Éroftrate brûla le temple d'Éphèfe , ce Prince montra, dès fa plus tendre
jeuneffe la plus vive ardeur pour toute efpèce de gloire , & l'ambition la plus
forte ; il n'eut voulu concourir aux jeux que s'il eut eu des Rois pour antagonifles ,
& les conquêtes de fon père, quoique glorieufes , excitoient en lui la crainte
de n'avoir plus rien à faire : les Ambaffadeurs s'en retournoient d'auprès de lui ,
furpris du genre de fes queftions, plus dignes de l'âge mûr que de la jeuneflè.
Les plus heureux génies ont befoin d'être fécondés par des maîtres difiin-
gués , & le choix de ceux qui doivent former les Souverains doit être fait
avec l'attention la plus fcrupuleufe. Ariftote vivoit fous Philippe, & Philippe
fut affez fage pour l'attacher à fon fils. Si Philippe fçavoit apprécier
Ariftote, Alexandre de fon côté lui payoït ce tribut d'efiime fi bien acquis &
fi fouvent négligé par les Grands, qui ne voyent dans ceux qui les inftrui-
fent que des perfonnages importuns, ou qui les méprifent comme des hommes
à gage. Ariftote étoit aux yeux d'Alexandre ce qu'il devoit être, c'étoit pour lui
un fécond père auquel il dormoit la moitié d'un cœur, dont 'la nature lui
faifoit offrir l'autre à Philippe. Je fuis redevable à l'un de vivre, difoit-il, &
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