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des Troupes du Roi de Perfe, une grande partie fut taillée en pièces, & le refie
rois en fuite. C'eft dans cet endroit encore qu'AIexandre donna à tous les Guer-
riers, par fa conduite envers la famille de fon ennemi, le plus bel exemple de
générofité : & ce que fon cœur lui di&a pour elle fembla réparer l'outrage que
fes armes venoient de faire à l'humanité, outrage cruel, le premier des malheurs
de la guerre.
Alexandre, Vainqueur, tourne fes pas vers Damas, dont on lui remet les
tréfors. A Marathe, il reçoit une lettre de Darius, & lui répond en Roi, avec
fierté, nobleffe & clémence. Tout à fon approche fe foumettoit à fon obéif-
fance. Biblos lui ouvrit fes portes : les Sidoniens doublement fatisfaits , de fe
fouftraire aux Perfes, dont l'ancienne barbarie étoit toujours préfente à leur
ame, & de préferver leur Patrie d'un fort funefte , fe fournirent au Vainqueur,
malgré Straton leur Roi. Straton fut dépouillé de la Royauté , ^ l'on vit alors
le noble & rare exemple de deux frères refufant la Couronne, & le fage
Abdolonyine , tiré de fon jardin pour être placé fur le Trône , craindre en
en montant les degrés de n'avoir pas autant de force pour porter le diadème
qu'il avoit eu de patience pour fupporter la misère.
Tyr, furnommée la Reine de la Mer, étoit trop puiffante pour fe courber
ainfi fous le joug, elle vouloir bien être l'amie d'Alexandre; mais fon orgueil
ne pouvoit pas fe prêter à l'idée de lui être foumife. Aux yeux d'un Prince
moins ambitieux, cette amitié feule eut pu paroître honorable ; mais un
Guerrier a toujours des raifons pour vouloir conquérir. Celles d'Alexandre
étoient la pofition & la force de Tyr : il ne pourra furement attaquer l'Egypte
ni pourfuivre Darius tant qu'ils auront pour eux les maîtres de la Mer, & la
prudence ne lui permet pas de Iaiffer derrière lui des pays ennemis & fuf-
pects. L'affaut de Tyr eft donc décidé : il étoit difficile; mais, fécondé par les
forces navales de la Phénicie, accompagné de fon bonheur & protégé par
un invifible Dieu , dont lui -même exécutoit les defïeins , il vint enfin à
bout de vaincre les Tyriens fur Mer, & de forcer leur Ville que la nature
& l'art fembloient rendre imprenable. La vengeance & la barbarie fuccé-
dèrent alors au courage dans le cœur d'Alexandre, & l'on frémit en penfant
que, malgré le carnage que l'ordre de faire main-baffe avoit occasionné,
malgré la vue de fix mille foldats taillés en pièces fur les remparts, le cruel
Conquérant fit élever en croix, fur le rivage, deux mille hommes que les
mains des Vainqueurs, laffes de maffacres, n'avoient pu mettre à mort.
Tandis qu'Alexandre étoit devant Tyr, Darius lui avoit écrit: fa lettre étoit plus
"fume Z.
M
des Troupes du Roi de Perfe, une grande partie fut taillée en pièces, & le refie
rois en fuite. C'eft dans cet endroit encore qu'AIexandre donna à tous les Guer-
riers, par fa conduite envers la famille de fon ennemi, le plus bel exemple de
générofité : & ce que fon cœur lui di&a pour elle fembla réparer l'outrage que
fes armes venoient de faire à l'humanité, outrage cruel, le premier des malheurs
de la guerre.
Alexandre, Vainqueur, tourne fes pas vers Damas, dont on lui remet les
tréfors. A Marathe, il reçoit une lettre de Darius, & lui répond en Roi, avec
fierté, nobleffe & clémence. Tout à fon approche fe foumettoit à fon obéif-
fance. Biblos lui ouvrit fes portes : les Sidoniens doublement fatisfaits , de fe
fouftraire aux Perfes, dont l'ancienne barbarie étoit toujours préfente à leur
ame, & de préferver leur Patrie d'un fort funefte , fe fournirent au Vainqueur,
malgré Straton leur Roi. Straton fut dépouillé de la Royauté , ^ l'on vit alors
le noble & rare exemple de deux frères refufant la Couronne, & le fage
Abdolonyine , tiré de fon jardin pour être placé fur le Trône , craindre en
en montant les degrés de n'avoir pas autant de force pour porter le diadème
qu'il avoit eu de patience pour fupporter la misère.
Tyr, furnommée la Reine de la Mer, étoit trop puiffante pour fe courber
ainfi fous le joug, elle vouloir bien être l'amie d'Alexandre; mais fon orgueil
ne pouvoit pas fe prêter à l'idée de lui être foumife. Aux yeux d'un Prince
moins ambitieux, cette amitié feule eut pu paroître honorable ; mais un
Guerrier a toujours des raifons pour vouloir conquérir. Celles d'Alexandre
étoient la pofition & la force de Tyr : il ne pourra furement attaquer l'Egypte
ni pourfuivre Darius tant qu'ils auront pour eux les maîtres de la Mer, & la
prudence ne lui permet pas de Iaiffer derrière lui des pays ennemis & fuf-
pects. L'affaut de Tyr eft donc décidé : il étoit difficile; mais, fécondé par les
forces navales de la Phénicie, accompagné de fon bonheur & protégé par
un invifible Dieu , dont lui -même exécutoit les defïeins , il vint enfin à
bout de vaincre les Tyriens fur Mer, & de forcer leur Ville que la nature
& l'art fembloient rendre imprenable. La vengeance & la barbarie fuccé-
dèrent alors au courage dans le cœur d'Alexandre, & l'on frémit en penfant
que, malgré le carnage que l'ordre de faire main-baffe avoit occasionné,
malgré la vue de fix mille foldats taillés en pièces fur les remparts, le cruel
Conquérant fit élever en croix, fur le rivage, deux mille hommes que les
mains des Vainqueurs, laffes de maffacres, n'avoient pu mettre à mort.
Tandis qu'Alexandre étoit devant Tyr, Darius lui avoit écrit: fa lettre étoit plus
"fume Z.
M