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des Pierres & la beauté du travail ont déterminé ce choix. Les Statuaires , Tes
Sculpteurs en yvoire, les Graveurs en Pierres, les Artiftes de tout genre fe
font plû à rendre avec foin des têtes de Médufe, & parmi tant de rivaux on
a diftingué Solon & Sofale, dont on retrouve des ouvrages en ce genre dans la
collection des Pierres gravées de Philippe de Stojch , Planches LX1I1 & LXV.
Dans toutes ces têtes de Médufe, on peut remarquer une ^rande variété, &
chaque Artifte a voulu, pour rendre fon ouvrage plus intérefiaat, en diverfifier
l'expreffion. En effet, cette fille de Fhorcus, remarquable par la beauté de fes
cheveux & par les charmes de fa figure, (charme fi grands, qu'à fa vue, les
hommes étoient changés en Pierre), eft repréfentée ou la tête tranchée, la
figure trifte ; ou prête à expirer, la bouche entre-ouverte & les yeux demi
fermes : ou pleine de grâces, dans cet état de fommeil, qui facilita l'entreprife
de Perfée, quand, fécondé par Minerve outragée de ce qu'elle avoit violé fon
temple par fes foibleffes avec Vulcain, & furprenant les Gorgones endormies,
il coupa la tête de cette même Médufe, feule de fes fœurs qui fu t mortelle : enfin
on la voit tantôt avec une figure douce autant que belle : tantôt les fourcils
froncés, les yeux menaçans, lançant même quelquefois des regards cruels.
Scs cheveux font ou noués avec des ferpens, ou entrelacés avec ces animaux
qui fe renouent fous le menton : quelquefois ils fe terminent par leurs têtes,
hefque toujours le front eft furmonté par des ailes qui femblent partir des
tempes au milieu des cheveux. Ces ailes, chez les Étrufques, étoient des ailes
de simples oifeaux & quelquefois de dragons , ainfi que le prouvent leurs
monumens.
Les Anciens & fur-tout les Empereurs & les Soldats fe fervoient de ces
têtes de Médufe comme de favorables Talifmans, iis croyoient que cette image
donnoit du courage & de la force dans l'adverfité, & que même elle éloignoit
les dangers. On penfoit, que gravée fur les tombeaux elle rendoit plus facrées ces
demeures des morts & les mettoit à l'abri des facrilèges violateurs. Les Etruf-
ques confondoient Médufe avec les Furies , & lui donnoient un diadème comme
à une Reine. Les Dames mettoient au rang de leurs bijoux des Pierres où étoient
gravées de femblables têtes. On en ornoit fouvent les portes & les vafes. Stace
décrit une patère d'or avec laquelle on faifoit des libations aux Dieux & fur
laquelle on avoit gravé Médufe ayant les yeux languiffans.
Autant il feroit ridicule de croire que l'hifioire de Médufe, telle que les
Poètes nous la racontent, eft véritable, autant le feroit-il auffi de penfer qu'il
n'y a point quelque vérité cachée fous ce voile de la Fable. Mais quelle efo.