DOI Seite / Zitierlink:
https://doi.org/10.11588/diglit.71577#0043
II
Sans la Ronde de nuit, page à tous égards capitale
dans l'œuvre du maître, l'exposition Rembrandt n'eût
pas été vraiment complète. Nous l'avons déjà dit, avec
cette peinture, la manière de l'artiste va changer, et
nous savons les caractères de cette nouvelle exécution,
une facture plus large, une pâte plus nourrie et plus
colorée, une science du clair-obscur jusqu'alors incon-
nue. Par sa date, la Ronde de nuit marque aussi un mo-
ment décisif dans la vie de Rembrandt; auparavant, tout
lui a souri, sa notoriété a été grandissante, il goûte les joies du bonheur domes-
tique, enfin une fortune suffisante lui permet de satisfaire ses goûts et de collec-
tionner des objets curieux, des tableaux, des estampes, des armes, des bijoux,
toutes curiosités rares ou exotiques. L'année môme où il achève le tableau
célèbre, commence cette série de malheurs et de revers de fortune qui sera
maintenant, avec de trop rares accalmies, l'existence de Rembrandt jusqu'à
sa mort. La date de la Ronde de nuit, 1642, est aussi celle de la mort de
Saskia, la compagne tendrement aimée dont tant de fois l'artiste a, sous
des accoutrements divers, peint et gravé la douce image; les embarras finan-