■
(49)
LE LEVER DU SOLEIL.
(Pl. XVII, XVIII.)
Parmi les milliers de vases peints que reunissent nos collections publiques et parti-
culieres, ceux qu'on peut designer sous le nom de vases astronomiques (i), sont
relativement les plus rares et par consequent les plus dignes d'attention. Le cratere
dont les peintures ä figures rouges sur fond noir sont gravees planches xvn et xviii ,
occupe dans cette serie de monumens une place trop importante, pour ne pas meriter
un examen severe et detaille. S'il ne s'agissait que de l'intelligence du sujet en gene-
ral, un coup d'ceil jete sur nos deux gravures suffirait pour Fobtenir, et le simple Sou-
venir du vers d'Horace (2) ,
Dum rediens fugat astra Phoebus,
ferait parfaitement comprendre le sens de la composition.
Helios sur son quadrige\ la tete entouree du disque solaire, s'eleve des flots, dans
lesquels, ä l'aspect de ce dieu, se refugient les etoiles de la nuit, sous la forme de
jeunes gens 9 dont les uns vont se plonger perpendiculairement dans la mer, et dont
les autres glissent obliquement sur la surface des flots. Un cinquieme, plus age que
(1) Les vases astronomiques de style ancien representent
le Soleil sur son quadrige, place dans un vaisseau pour y faire
son trajet de l'Ocean. Ge vaisseau, coupe du Soleil dans la-
quelle Hercule traverse la mer, est designe par les poetes an-
ciens sous trois noms de vases d'une forme analogue, celui de
la kv/aCh (Rech, sur les verit. noms des Vas. gr. p. 3o, pl. v, 74 )>
de la QtdLKn (Rech. p. 17, pl. iv, 29) et du S'sTa.t (Rech. p. 22 ,
pl. 11, 47). Ordinairement la proue du vaisseau est de chaque
cote ornee d'un oeil, l'embleme de la lumiere; ce qui fait croire
que les yeux qui, sur beaucoup de phiales ou cylix, entourent
d'une part un Dionysus couche, de l'autre un Apollon lyricine,
fönt allusion ä la coupe du Soleil et au voyage maritime des
dieux du jour et de la nuit (Lenormant, Ann. de l'Instit. ar-
cheol. vol. IV, p. 3i5, note 4).
Un grand cratere de la Basilicate merite d'etre cite ici
de preference ä beaucoup d'autres qui n'offrent que le groupe
principal de la composition astronomique. Au col de ce vase
sepulcral parait Helios, orne du disque solaire, conduisant un
bige, et Seiend, reconnaissable ä ses cornes, ä cöte de lui sur un
autre bige; tous les deux viennent d'achever leur trajet de
l'Ocean sur la meine barque decoree d'un ceil. Pan, distingue
par de grandes cornes, et dans sa qualite de Lucifer ou Ljncee,
tenant un bäton termine par deux flambeaux croises, guide
les chevaux de Selene vers la gauche, tandis qu'Idas, arme
comme un corybante, precede les chevaux solaires, et, l'epee ä
la main, combat les tenebres qui pourraient arreter la course
du Soleil. Deux etoiles brillent au-dessus de sa tete, une seule
au-dessus de Pan. Les deux Dioscures ornent les anses de cet
important monument (Passeri, pict. Etr. tab. 269; Winckel-
mann, Mon. ined. n° 22; Dubois-Maisonneuve, Intr. ä l'etude
des Vas. pl. 0-
Un vase de la collection Muschini ä Naples, actuellement au
usee de Turin, rae semble offrir une parodie d'une partie de
la scene precedente. Un acteur, la figure couverte d'un masque
de satyre barbu, tient les brides d'un couple de pantheres
ailees, attelees devant son char, qui a la forme d'un vaisseau :
un autre acteur avec un masque pareil, la main gauche armee
d'un grand fouet, lui sert d'avant-coureur. La peinture repre-
sente, si je ne me trompe, Helios et Pari, dans une scene d'un
drame satirique. Cf. Eurip. Rhes. v. 36 :
'Aaa.' n xpoviav Xlctyof Tpopepa
Sur beaucoup de vases de la Pouille, Eos precede sur un
char tantot ä deux, tantot ä quatre chevaux, le quadrige du
Soleil. Sur un vase du tombeau de Canosa, Eos est depourvue
d'ailes et caracterisee par un disque solaire : deux etoiles au-
dessus de deux de ses chevaux attestent le caractere lumineux
de ces coursiers; les deux autres sont guides par un ephebe
alle qui tient une bandelette dans la main gauche, et qu'une
etoile sur sa tete designe comme Phosphore. Helios la suit,
vetu d'une tunique talaire que ferme une large ceinture; une
chlamyde flotte sur ses epaules; le disque solaire entoure
sa tete- quatre etoiles brillent au-dessus des quatre coursiers :
le dieu tient les renes de la main gauche et une baguette en
place de fouet dans la droite : des poissons indiquent la mer
comme ailleurs (Miliin , Tomb. de Canosa, pl. v).
Le col d'un autre vase de mysteres, decore de combats
d'Amazones, montre Artemis Phosphoros en tunique d'Ama-
zone et en bottines,tenant de chaque main un famhem.Jurore
sur un quadrige parait causer sa fuite precipitee. Pan avec des
jambes de bouc, un fouet a la main, decore les anses du meme
monument; au-dessus de sa tete est l'image de la pleine lune
(Miliin, Peint. de Vas. t. II, pl. xxv et xxvi).
Helios et Selene representes non sur des chars, mais en vais-
seau, indiquent qu'ils tirent tous les deux leur origine et leur
nourriture de l'eau (Plut. de Isid.«et Osir. c. 34). Les Egyptiens
retracent le lever du Soleil de la mer par l'image d'Horus qui
surgit d'une fleur de lotus (Plut. de Isid. et Osir. c. 11).
(2) L. III, Od. XXI, v. 2/i-
i3