LA SITUATION DE LA SYRIE. 3
ces nations qui, si l'on peut ainsi parler, ont fait la chaîne entre la
vallée de l'Euphrate et les plages de lamerÉgée ; elles recevaient d'une
main pour donner de l'autre, et c'est ainsi certainement que sont arrivés
jusqu'aux Grecs de l'Ionre tels mythes et tels cultes que l'on peut suivre
à la trace dans toute l'épaisseur du continent, tels types, tels procédés,
tels motifs qui portent avec eux leur marque d'origine ; mais l'Egypte
était .bien loin pour que son influence pût se faire sentir de cette ma-
nière et à travers tant cle milieux différents. D'ailleurs, par la voie de
terre, les communications, dans l'antiquité, sont toujours restées lentes
et difficiles ; pour barrer le passage au commerce, il suffisait d'un
désert de sable ou d'un district montagneux habité par des peuplades
indomptées et sauvages.
Il en est tout autrement'dë la mer. Elle paraît séparer les terres et
les peuples ; mais, tout au contraire, elle les rapproche et les unit. Dès
que l'homme sait se confier à elle et combiner les effets de la voile et
du gouvernail pour diriger sa barque, l'œil fixé sur les étoiles, la mer
le mène où il veut aller. Comme ces graines empennées et légères que
la brise enlève et qu'elle va semer bien loin du champ qui les a vues
naître, les idées, elles aussi, voyagent plus sûrement et plus vite sur
l'aile des vents que lorsqu'il leur faut, en se heurtant à tous les obstacles,
se traîner et ramper à la surface du sol ; le navire leur fait faire dans
le monde plus de chemin et un chemin plus rapide que la marche lente
du piéton ou que celle de la caravane. Pour établir, à travers de vastes
espaces, des communications entre les hommes, il n'est pas d'inter-
médiaire qui vaille un peuple de marins, que l'amour du gain et la
curiosité poussent, d'année en année, à de nouvelles entreprises et vers
des rivages qu'il n'a pas encore visités.
Par bonheur, vers le temps où les deux génies de l'Egypte et de la
Chaldée, touchant à leur maturité, achevaient de développer leur puis-
sance créatrice, un peuple s'est rencontré qui, profitant de l'opportunité
des lieux où il s'était fixé, a saisi avec une décision hardie ce rôle actif
et fructueux d'agent de transmission, de courtier maritime. A la suite
d'événements qui ne nous sont connus que par leurs effets, ce peuple
était venu s'établir sur la côte de Syrie, tout au fond de la Méditerranée,
dans le voisinage cle l'isthme qui rattache l'Asie à l'Afrique; il était la
entre la vallée du Nil et celle de l'Euphrate, à. portée de l'une et de
l'autre. Pour gagner par terre la frontière de l'Egypte, jusqu'à Péluse,
il y avait à peine, depuis la dernière ville syrienne, trois ou quatre jours
de route à travers un désert où les puits ne sont pas très éloignés l'un
ces nations qui, si l'on peut ainsi parler, ont fait la chaîne entre la
vallée de l'Euphrate et les plages de lamerÉgée ; elles recevaient d'une
main pour donner de l'autre, et c'est ainsi certainement que sont arrivés
jusqu'aux Grecs de l'Ionre tels mythes et tels cultes que l'on peut suivre
à la trace dans toute l'épaisseur du continent, tels types, tels procédés,
tels motifs qui portent avec eux leur marque d'origine ; mais l'Egypte
était .bien loin pour que son influence pût se faire sentir de cette ma-
nière et à travers tant cle milieux différents. D'ailleurs, par la voie de
terre, les communications, dans l'antiquité, sont toujours restées lentes
et difficiles ; pour barrer le passage au commerce, il suffisait d'un
désert de sable ou d'un district montagneux habité par des peuplades
indomptées et sauvages.
Il en est tout autrement'dë la mer. Elle paraît séparer les terres et
les peuples ; mais, tout au contraire, elle les rapproche et les unit. Dès
que l'homme sait se confier à elle et combiner les effets de la voile et
du gouvernail pour diriger sa barque, l'œil fixé sur les étoiles, la mer
le mène où il veut aller. Comme ces graines empennées et légères que
la brise enlève et qu'elle va semer bien loin du champ qui les a vues
naître, les idées, elles aussi, voyagent plus sûrement et plus vite sur
l'aile des vents que lorsqu'il leur faut, en se heurtant à tous les obstacles,
se traîner et ramper à la surface du sol ; le navire leur fait faire dans
le monde plus de chemin et un chemin plus rapide que la marche lente
du piéton ou que celle de la caravane. Pour établir, à travers de vastes
espaces, des communications entre les hommes, il n'est pas d'inter-
médiaire qui vaille un peuple de marins, que l'amour du gain et la
curiosité poussent, d'année en année, à de nouvelles entreprises et vers
des rivages qu'il n'a pas encore visités.
Par bonheur, vers le temps où les deux génies de l'Egypte et de la
Chaldée, touchant à leur maturité, achevaient de développer leur puis-
sance créatrice, un peuple s'est rencontré qui, profitant de l'opportunité
des lieux où il s'était fixé, a saisi avec une décision hardie ce rôle actif
et fructueux d'agent de transmission, de courtier maritime. A la suite
d'événements qui ne nous sont connus que par leurs effets, ce peuple
était venu s'établir sur la côte de Syrie, tout au fond de la Méditerranée,
dans le voisinage cle l'isthme qui rattache l'Asie à l'Afrique; il était la
entre la vallée du Nil et celle de l'Euphrate, à. portée de l'une et de
l'autre. Pour gagner par terre la frontière de l'Egypte, jusqu'à Péluse,
il y avait à peine, depuis la dernière ville syrienne, trois ou quatre jours
de route à travers un désert où les puits ne sont pas très éloignés l'un