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et de la liberte. Nos amis allemands veulent-ils les accepter aussi
franchement que nous les acceptons? Et pour tout dire, veulent-ils
comme nous la destruction de l’Etat, — de tous les Etats?
Messieurs, lä est toute la question. Car qui dit Etat, dii violence,
oppression, exploitaiion, injustice eriges en Systeme et devenue autant
de conditions fondameniales, de l’existence meme de la societe.
L’Etat, Messieurs, n’a jamais eu et ne pourra jamais avoir de morale.
— Sa morale ä lui et sa seule justice, c’est Linieret supreme de sa
Conservation et de sa toute puissance — interqt devant lequel tout
ce qui est humain doit plier. L’Etat est la negation meme de l’huma-
nite. II Test doublement: et comme le coniraire de la liberte et de
la justice humaine — et comme interruption violente de la solidarite
universelle de la race humaine. L’Etat universel, plusieurs fois essaye,
s’est montre toujours impossible, de Sorte que iant qu’il y aura Etat,
il y aura toujours des Etats — et chacun se posant comme un but
absolu, posant le culte de son etre comme la loi supreme, ä l’exolusion
de tous les auires, il en resulte que l’existance meme des Etats
implique la guerre perpretuelle — la negation violente de l’humanite.
Tout Etat doit conquerir ou etre conquis. Tout Etat doit fonder sa
puissance sur la faiblesse, et s’il le peuf sans danger pour lui-meme,
sur l’aneantissement des autres Etats.
Messieurs, vouloir ce que veut ce Congres, vouloir Retablisse-
ment d’une justice internationale, d’une liberte internationale et d’une
paix eternelle, et vouloir en meme temps la Conservation des Etats
serait donc de notre pari une contradiction et une naivete ridicules.
Faire changer aux Etats leur nature est impossible, parce que c’est
precisement par cette nature qu’ils sont des Etats et ils ne sauraient
s’en departir, sans cesser d’exister. Par consequeni, Messieurs, il
n’y a pas et il ne peui y avoir d’Etals bons, justes, veriueux. Tous
les Etats sont mauvais dans ce sens, que par leur nature, c’est-ä-
dire par leur base, par les conditions et par le but supreme de leur
existence, ils sont tout l’oppose de la justice, de la liberte et de la
morale humaine. Et sous ce rapport, quoi qu’on dise, il n’existe
pas de grande difference entre le sauvage Empire de toutes les
Russies et l’Etat le plus civilise de l’Europe. Savez-vous en quoi
cette difference consiste? L’Empire des Czars fait cyniquemenf ce
que les auires font hypocritement. L’Empire des Czars avec sa
franche maniere despotique et dedaigneuse de l’humanite est le
secret ideal vers lequel iendent et qu’admirent tous les hommes
d’Etat. Tous les Etats d’Europe font ce qu’il fait, autant que l’opinion •
publique et surtout autant que la solidarite nouvelle, mais dejä puis-
sante des masses ouvrieres de l’Europe — opinion et solidarite qui
contiennent les germes de la destruction des Etats — le permettent. ;
En fait d’Etat, Messieurs, il n’est de veriueux que les Etats impuissants.
Et encore sont-ils bien criminels dans leurs reves.
Je conclus: Qui veut avec nous l’etablissement de la liberte, de
la justice ei de la paix, qui veut le triomphe de l’humanite, qui veut
l’emancipätion radicale et complete des masses populaires, doit vou-
loir comme nous la dissolution de tous les Etats, dans la federation >
universelle des associations productives et libres de tous les pays.
R. L. Prager in Berlin NW 7, Mittelstr. 21. Kat. 217: Marx-Engels-Lassalle. Dritter Teil. '
et de la liberte. Nos amis allemands veulent-ils les accepter aussi
franchement que nous les acceptons? Et pour tout dire, veulent-ils
comme nous la destruction de l’Etat, — de tous les Etats?
Messieurs, lä est toute la question. Car qui dit Etat, dii violence,
oppression, exploitaiion, injustice eriges en Systeme et devenue autant
de conditions fondameniales, de l’existence meme de la societe.
L’Etat, Messieurs, n’a jamais eu et ne pourra jamais avoir de morale.
— Sa morale ä lui et sa seule justice, c’est Linieret supreme de sa
Conservation et de sa toute puissance — interqt devant lequel tout
ce qui est humain doit plier. L’Etat est la negation meme de l’huma-
nite. II Test doublement: et comme le coniraire de la liberte et de
la justice humaine — et comme interruption violente de la solidarite
universelle de la race humaine. L’Etat universel, plusieurs fois essaye,
s’est montre toujours impossible, de Sorte que iant qu’il y aura Etat,
il y aura toujours des Etats — et chacun se posant comme un but
absolu, posant le culte de son etre comme la loi supreme, ä l’exolusion
de tous les auires, il en resulte que l’existance meme des Etats
implique la guerre perpretuelle — la negation violente de l’humanite.
Tout Etat doit conquerir ou etre conquis. Tout Etat doit fonder sa
puissance sur la faiblesse, et s’il le peuf sans danger pour lui-meme,
sur l’aneantissement des autres Etats.
Messieurs, vouloir ce que veut ce Congres, vouloir Retablisse-
ment d’une justice internationale, d’une liberte internationale et d’une
paix eternelle, et vouloir en meme temps la Conservation des Etats
serait donc de notre pari une contradiction et une naivete ridicules.
Faire changer aux Etats leur nature est impossible, parce que c’est
precisement par cette nature qu’ils sont des Etats et ils ne sauraient
s’en departir, sans cesser d’exister. Par consequeni, Messieurs, il
n’y a pas et il ne peui y avoir d’Etals bons, justes, veriueux. Tous
les Etats sont mauvais dans ce sens, que par leur nature, c’est-ä-
dire par leur base, par les conditions et par le but supreme de leur
existence, ils sont tout l’oppose de la justice, de la liberte et de la
morale humaine. Et sous ce rapport, quoi qu’on dise, il n’existe
pas de grande difference entre le sauvage Empire de toutes les
Russies et l’Etat le plus civilise de l’Europe. Savez-vous en quoi
cette difference consiste? L’Empire des Czars fait cyniquemenf ce
que les auires font hypocritement. L’Empire des Czars avec sa
franche maniere despotique et dedaigneuse de l’humanite est le
secret ideal vers lequel iendent et qu’admirent tous les hommes
d’Etat. Tous les Etats d’Europe font ce qu’il fait, autant que l’opinion •
publique et surtout autant que la solidarite nouvelle, mais dejä puis-
sante des masses ouvrieres de l’Europe — opinion et solidarite qui
contiennent les germes de la destruction des Etats — le permettent. ;
En fait d’Etat, Messieurs, il n’est de veriueux que les Etats impuissants.
Et encore sont-ils bien criminels dans leurs reves.
Je conclus: Qui veut avec nous l’etablissement de la liberte, de
la justice ei de la paix, qui veut le triomphe de l’humanite, qui veut
l’emancipätion radicale et complete des masses populaires, doit vou-
loir comme nous la dissolution de tous les Etats, dans la federation >
universelle des associations productives et libres de tous les pays.
R. L. Prager in Berlin NW 7, Mittelstr. 21. Kat. 217: Marx-Engels-Lassalle. Dritter Teil. '