ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS, ETC. 419
celui de Tahraka qui, selon une stèle de Sérapéum, aurait passé au moins
vingt-six ans sur le trône. Trente-huil années (en prenant le chiffre le plus
bas) se seraient ainsi écoulées entre le jour où la reine Ameniritis plaçait
dans le temple de Karnak la statue d'albâtre que nous possédons, et le jour
où, avec Piankhi, elle s'emparait à Thèbes des insignes du pouvoir souve-
rain. Mais l'invraisemblance que l'arrangement de ces chiffres donne au fait
en lui-môme, disparaît si l'on réfléchit qu'Ameniritis, déjà femme sous Saba-
con, avait pu épouser Piankhi avant que celui-ci devînt roi, et donner le
jour, sous Tahraka, à la princesse qui devait plus tard épouser le chef de la
dynastie saïte. Les renseignements nouveaux que les monuments du musée
du Caire nous fournissent sur cette époque agitée, ne rendent donc pas
impossible la reconstruction de la dynastie éthiopienne telle qu'elle est
admise aujourd'hui, et si ces renseignements nous forcent à modifier
quelques-unes de nos idées sur les tendances politiques des personnages
en présence desquels nous venons de nous trouver, tout au moins ils ne
nous obligent pas à oublier ce que vous nous avez appris sur la succession
des rois que l'histoire doit désormais placer entre l'unique souverain de
la xxive dynastie et le premier de la xxvie.
J'ai eu occasion de nommer souvent dans cette lettre la princesse
femme de Psammitichus, et il est incontestable que cette princesse, qui
s'appelait Schapenap, était la fille de Piankhi etd'Ameniritis. Mais la même
certitude ne s'attache point à la filiation d'une autre princesse, nommée
Moutiritis, qui, selon vous (1), aurait été, comme Schapenap, une fille
issue du mariage de la reine et du roi Éthiopien. Toute cette généalogie
de Moutiritis repose, en effet, sur une restitution des syllabes Piankh dans
le cartouche martelé d'une stèle du Louvre où on ne lit plus que
.....i. Or j'ai plusieurs fois rencontré celte légende sur les monuments
(entre autres sur un vase que possède le musée du Caire), et toujours
elle s'est présentée sous la forme que lui donne la stèle du Louvre, c'est-à-
dire qu'à chaque fois la voyelle finale.....i a été seule respectée. Que
conclure de ce fait? Quand, pour une cause quelconque, on fait gratter sur
les monuments publics le nom d'un roi, il est naturel de penser qu'on
efface ce nom tout entier, sans prendre le soin d'en conserver la plus in-
signifiante syllabe. Cette seule remarque tranche, à mon avis, la difficulté.
Dans le cartouche du Louvre, ce n'est pas le nom du roi qu'on a voulu
faire disparaître; et en effet, du moment où la justice des contemporains a
décidé que la mémoire de Piankhi serait poursuivie jusque dans son nom,
il n'y a pas de raison pour expliquer qu'à une partie seule du cartouche se
serait adressée l'injure du martelage. Si ces vues étaient admises, Piankhi
ne serait donc pas le roi de la stèle du Louvre et du vase du Caire. Je
sortirais des bornes de cette lettre si j'entrais à ce sujet dans de plus longs
développements : tout ce qu'il importe de faire remarque!', c'est, en pre-
(1) Fouilles de M. Greene, p. hk-
celui de Tahraka qui, selon une stèle de Sérapéum, aurait passé au moins
vingt-six ans sur le trône. Trente-huil années (en prenant le chiffre le plus
bas) se seraient ainsi écoulées entre le jour où la reine Ameniritis plaçait
dans le temple de Karnak la statue d'albâtre que nous possédons, et le jour
où, avec Piankhi, elle s'emparait à Thèbes des insignes du pouvoir souve-
rain. Mais l'invraisemblance que l'arrangement de ces chiffres donne au fait
en lui-môme, disparaît si l'on réfléchit qu'Ameniritis, déjà femme sous Saba-
con, avait pu épouser Piankhi avant que celui-ci devînt roi, et donner le
jour, sous Tahraka, à la princesse qui devait plus tard épouser le chef de la
dynastie saïte. Les renseignements nouveaux que les monuments du musée
du Caire nous fournissent sur cette époque agitée, ne rendent donc pas
impossible la reconstruction de la dynastie éthiopienne telle qu'elle est
admise aujourd'hui, et si ces renseignements nous forcent à modifier
quelques-unes de nos idées sur les tendances politiques des personnages
en présence desquels nous venons de nous trouver, tout au moins ils ne
nous obligent pas à oublier ce que vous nous avez appris sur la succession
des rois que l'histoire doit désormais placer entre l'unique souverain de
la xxive dynastie et le premier de la xxvie.
J'ai eu occasion de nommer souvent dans cette lettre la princesse
femme de Psammitichus, et il est incontestable que cette princesse, qui
s'appelait Schapenap, était la fille de Piankhi etd'Ameniritis. Mais la même
certitude ne s'attache point à la filiation d'une autre princesse, nommée
Moutiritis, qui, selon vous (1), aurait été, comme Schapenap, une fille
issue du mariage de la reine et du roi Éthiopien. Toute cette généalogie
de Moutiritis repose, en effet, sur une restitution des syllabes Piankh dans
le cartouche martelé d'une stèle du Louvre où on ne lit plus que
.....i. Or j'ai plusieurs fois rencontré celte légende sur les monuments
(entre autres sur un vase que possède le musée du Caire), et toujours
elle s'est présentée sous la forme que lui donne la stèle du Louvre, c'est-à-
dire qu'à chaque fois la voyelle finale.....i a été seule respectée. Que
conclure de ce fait? Quand, pour une cause quelconque, on fait gratter sur
les monuments publics le nom d'un roi, il est naturel de penser qu'on
efface ce nom tout entier, sans prendre le soin d'en conserver la plus in-
signifiante syllabe. Cette seule remarque tranche, à mon avis, la difficulté.
Dans le cartouche du Louvre, ce n'est pas le nom du roi qu'on a voulu
faire disparaître; et en effet, du moment où la justice des contemporains a
décidé que la mémoire de Piankhi serait poursuivie jusque dans son nom,
il n'y a pas de raison pour expliquer qu'à une partie seule du cartouche se
serait adressée l'injure du martelage. Si ces vues étaient admises, Piankhi
ne serait donc pas le roi de la stèle du Louvre et du vase du Caire. Je
sortirais des bornes de cette lettre si j'entrais à ce sujet dans de plus longs
développements : tout ce qu'il importe de faire remarque!', c'est, en pre-
(1) Fouilles de M. Greene, p. hk-