Recueil des notices et mémoires de la Société Archéologique de la Province de Constantine (Sér. 2,4=14.1870)

voit qu'il y a loin de quelques pauvres pêcheurs de corail
prisonniers, à une troupe de volontaires de notre pays
favorisant les tentatives d'un agitateur indigène. La tra-
dilion, qui a toujours quelque l'ait merveilleux à sa dis-
position, rapporte que le cher if était allé enlever ces
chrétiens dans leur pays en marchant sur la mer.

L'ambition personnelle du cherif et la mission politique
qu'il avait à remplir, lui imposaient l'obligation d'entre-
prendre des conquêtes plus sérieuses. Le nombre de ses
adhérents augmentant de jour en jour, il abandonna alors
la surveillance de Gigelli à son agba, et se mil à parcourir
les tribus kabiles. Sa première station eut lieu à Djerah,
dans la vallée de l'oued Zhour, où il ordonna de cons-
truire plusieurs maisons qui formèrent bientôt un village
dont les murailles en ruines se voient encore de nos jours.

L'amour que lui inspira une jeune Kabile d'une ravis-
sante beauté, nommée Yamina- bent-Bou-Haouta, fut cause
qu'il s'oublia cà Djerah, et que, pendant plusieurs mois, il
négligea même ses projets belliqueux. Il s'épuisait vaine-
ment en démarches auprès des parents de la jeune fille
pour l'obtenir en mariage, lorsque enfin perdant patience,
il l'enleva de force et se la donna pour femme, au nom
des droits de sultan qu'il s'arrogeait. La fortune naissante
du Bou-Dali faillit s'écrouler tout à coup, cà la suite de
cet acte de despotisme. Un marabout, Si Mohammed-
el-Guechi, qui avait déjà montré peu de sympathie au
nouveau réformateur, profita de cette occasion pour ful-
miner encore davantage et ameuter les esprits contre
lui. Ben-el-Harche réussit, heureusement, à s'emparer
de son malencontreux détracteur, auquel il fit trancher
la tête.