UN BEAU TRAVAIL
— Les cheveux de Monsieur sont frisés... Cela va-t-il?
— C’est plus que parfait !
Dessin de A. Bertrand.
LES PREMIÈRES AMOURS
DU BLEU PITOU
Dessin de Weyman.
CHEZ LE JUGE DE PAIX
Le bleu Pitou, les oreilles et
les bras écartés, promenait à
travers le quartier son perpétuel
ahurissement et la naïveté de
sa face saupoudrée de taches
de son. Natif de Mercy-le-Haut
par Mercy-le-Bas, il avait con-
servé de ses origines quasi
champêtres une robuste igno-
rance et une crédulité sans li-
mites-. Aussi les tuiles tombaient-
elles dru sur son dos. Mais elles
tombaient sans l’entamer, parce
que, vivant dans un ahurisse-
ment quotidien, il n’avait qu’une
notion imprécise des événements
qui tourbillonnaient en tempête
autour de lui.
Pourtant, au bout d’un mois,
le bleu Pitou eut une idée ; en-
core suis-je indulgent de qualifier ainsi ce
qui n’était et ce qui ne resta somme toute
'qu’une obscure sensation... Le bleu Pitou, |
solide gaillard, bien découplé, trouva que
la caserne, ça manquait de femmes!...
Il s’en ouvrit un jour dans la chambrée.
Ce fut une jolie séance. Après les plaisan-
teries d’usage et quelques allusions pleines
de sel à Mercy-le-Haut, on résolut de lui
en jouer une bien bonne. On lui parla de
certain établissement que l’on ne saurait
confondre avec un gynécée non plus qu’avec
un pensionnat, et où une certaine Irma
règne en maîtresse.
— Je t’y conduirai dimanche, déclara sur
un ton protecteur l’ancien Potru.
— Y a d’chouettes particulières?
— Un peu là, mon poteau...
Et l’un de ces messieurs qui avait des
lettres, déclama :
« Leurs derrières sont remarquables et
bénis et semblent un autre monde mêlé au
leur, vu qu’elles ne peuvent les mouvoir à
leur guise et qu’ils tremblent de leur propre
nature, comme du lait caillé dans l’écuelle
du bédouin ou comme un morceau de gelée
Enfin, il vous a fait des excuses, et vous n’ètes pas satisfait?
Non, monsieur le juge; j'exige une réparation.
Dessin de Petitjean.
TZIGANES
:C
— Monsieur veut qu’on lui joue quelque chose?
— Oui...: les consommations!!
au coing sur le plateau parfumé
au benjoin... »
— Mince! ponctua simplement
l’ancien Potru.
Le dimanche suivant, le bleu
Pitou accompagné de l’ancien
Potru déambulait dans une rue
bordée de coquets jardinets,
lorsque, devant une petite mai-
son aux volets verts, Potru s’ar-
rêta.
— C’est là, fit-il. On est arrivé*
Pitou considéra le petit jar-
din, le petit bassin, le petit ro-
cher, le petit jet d’eau, puis:
— Tu m’accompagnes ? de-
nianda-t-il, inquiet déjà.
— Tu flanches ?
Blessé dans son amour-propre,
le bleu répliqua :
— Tu veux rire ?
— Alors traverse le jardin et
sonne à la porte d’entrée. Lors-
\Nl Y e\A N
— Les cheveux de Monsieur sont frisés... Cela va-t-il?
— C’est plus que parfait !
Dessin de A. Bertrand.
LES PREMIÈRES AMOURS
DU BLEU PITOU
Dessin de Weyman.
CHEZ LE JUGE DE PAIX
Le bleu Pitou, les oreilles et
les bras écartés, promenait à
travers le quartier son perpétuel
ahurissement et la naïveté de
sa face saupoudrée de taches
de son. Natif de Mercy-le-Haut
par Mercy-le-Bas, il avait con-
servé de ses origines quasi
champêtres une robuste igno-
rance et une crédulité sans li-
mites-. Aussi les tuiles tombaient-
elles dru sur son dos. Mais elles
tombaient sans l’entamer, parce
que, vivant dans un ahurisse-
ment quotidien, il n’avait qu’une
notion imprécise des événements
qui tourbillonnaient en tempête
autour de lui.
Pourtant, au bout d’un mois,
le bleu Pitou eut une idée ; en-
core suis-je indulgent de qualifier ainsi ce
qui n’était et ce qui ne resta somme toute
'qu’une obscure sensation... Le bleu Pitou, |
solide gaillard, bien découplé, trouva que
la caserne, ça manquait de femmes!...
Il s’en ouvrit un jour dans la chambrée.
Ce fut une jolie séance. Après les plaisan-
teries d’usage et quelques allusions pleines
de sel à Mercy-le-Haut, on résolut de lui
en jouer une bien bonne. On lui parla de
certain établissement que l’on ne saurait
confondre avec un gynécée non plus qu’avec
un pensionnat, et où une certaine Irma
règne en maîtresse.
— Je t’y conduirai dimanche, déclara sur
un ton protecteur l’ancien Potru.
— Y a d’chouettes particulières?
— Un peu là, mon poteau...
Et l’un de ces messieurs qui avait des
lettres, déclama :
« Leurs derrières sont remarquables et
bénis et semblent un autre monde mêlé au
leur, vu qu’elles ne peuvent les mouvoir à
leur guise et qu’ils tremblent de leur propre
nature, comme du lait caillé dans l’écuelle
du bédouin ou comme un morceau de gelée
Enfin, il vous a fait des excuses, et vous n’ètes pas satisfait?
Non, monsieur le juge; j'exige une réparation.
Dessin de Petitjean.
TZIGANES
:C
— Monsieur veut qu’on lui joue quelque chose?
— Oui...: les consommations!!
au coing sur le plateau parfumé
au benjoin... »
— Mince! ponctua simplement
l’ancien Potru.
Le dimanche suivant, le bleu
Pitou accompagné de l’ancien
Potru déambulait dans une rue
bordée de coquets jardinets,
lorsque, devant une petite mai-
son aux volets verts, Potru s’ar-
rêta.
— C’est là, fit-il. On est arrivé*
Pitou considéra le petit jar-
din, le petit bassin, le petit ro-
cher, le petit jet d’eau, puis:
— Tu m’accompagnes ? de-
nianda-t-il, inquiet déjà.
— Tu flanches ?
Blessé dans son amour-propre,
le bleu répliqua :
— Tu veux rire ?
— Alors traverse le jardin et
sonne à la porte d’entrée. Lors-
\Nl Y e\A N