SAINT-BENOIT. 5i9
théon a Rome , dont Soufflot a visiblement voulu produire une imitation
sur une plus grande échelle ; heureux si la prétention de faire mieux que
son modèle , de rendre plus parfaite encore cette belle production de
l'antique , ne l'eût jeté dans des erreurs dont le résultat a été d'en altérer
les heureuses proportions! Que de fautes il a faites qu'il étoit si facile
d'éviter ! On est d'abord choqué de la maigreur de ses entrecolonnements,
et l'on voit aussitôt que ce défaut n'existeroit pas s'il eût placé deux co-
lonnes de plus sous le fronton , au lieu de les reléguer en arrière-corps
aux angles du péristyle (i). Groupées dans ce petit espace d'une manière
confuse , elles ont en outre l'inconvénient de produire des ressauts et des
profils multipliés qui tiennent au style vicieux de l'école , et présentent
une disparate désagréable dans un monument où l'on a voulu imiter la
simplicité de l'antique.
On ne peut nier aussi que la hauteur du fronton ne soit excessive : sa
masse semble disputer avec celle des colonnes , et les écraser de son poids
énorme (2). Les chapiteaux trop alongés et les revers pesants des feuilles
doivent pàroîtrê d'une forme bien lourde et bien grossière si on les com-
pare avec la proportion mâle et la taille savante des chapiteaux du Pan-
théon. Les cannelures des colonnes manquent de pureté dans leurs profils,
les ornements qui décorent ce péristyle sont d'un mauvais choix 5 en un
mot ce portail, dans sa masse et dans ses détails, ne présente qu'une
copie dégénérée du plus noble modèle.
« On ne peut le dissimuler, dit l'habile architecte a qui nous avons
emprunté la plus grande partie de ces idées (3) , Soufilot n'avoit point
assez approfondi l'étude de l'antique dans le portique dont' il vouloit re-
produire l'effet. On doit lui savoir gré sans doute de n'avoir employé
qu'un seul grand ordre, de s'être affranchi de la vieille routine , en offrant
cet aspect majestueux de colonnes isolées et .d'un grand diamètre j mais il
faut le blâmer de n'avoir pas suivi les justes proportions de ce système
antique qu'il vouloit faire revivre. Peut-être seroit-il plus juste de s'en
(1) Il est composé de vingt-deux colonnes d'ordre corinthien, de cinq pieds et demi de diamètre., de
ciiKjuantc-liuit pieds de hauteur, y compris base et chapiteau.
(2) Il a cent vingt pieds de base sur environ vingt-ejuatre pieds de haut.
(5) Feu M. Legrand.
théon a Rome , dont Soufflot a visiblement voulu produire une imitation
sur une plus grande échelle ; heureux si la prétention de faire mieux que
son modèle , de rendre plus parfaite encore cette belle production de
l'antique , ne l'eût jeté dans des erreurs dont le résultat a été d'en altérer
les heureuses proportions! Que de fautes il a faites qu'il étoit si facile
d'éviter ! On est d'abord choqué de la maigreur de ses entrecolonnements,
et l'on voit aussitôt que ce défaut n'existeroit pas s'il eût placé deux co-
lonnes de plus sous le fronton , au lieu de les reléguer en arrière-corps
aux angles du péristyle (i). Groupées dans ce petit espace d'une manière
confuse , elles ont en outre l'inconvénient de produire des ressauts et des
profils multipliés qui tiennent au style vicieux de l'école , et présentent
une disparate désagréable dans un monument où l'on a voulu imiter la
simplicité de l'antique.
On ne peut nier aussi que la hauteur du fronton ne soit excessive : sa
masse semble disputer avec celle des colonnes , et les écraser de son poids
énorme (2). Les chapiteaux trop alongés et les revers pesants des feuilles
doivent pàroîtrê d'une forme bien lourde et bien grossière si on les com-
pare avec la proportion mâle et la taille savante des chapiteaux du Pan-
théon. Les cannelures des colonnes manquent de pureté dans leurs profils,
les ornements qui décorent ce péristyle sont d'un mauvais choix 5 en un
mot ce portail, dans sa masse et dans ses détails, ne présente qu'une
copie dégénérée du plus noble modèle.
« On ne peut le dissimuler, dit l'habile architecte a qui nous avons
emprunté la plus grande partie de ces idées (3) , Soufilot n'avoit point
assez approfondi l'étude de l'antique dans le portique dont' il vouloit re-
produire l'effet. On doit lui savoir gré sans doute de n'avoir employé
qu'un seul grand ordre, de s'être affranchi de la vieille routine , en offrant
cet aspect majestueux de colonnes isolées et .d'un grand diamètre j mais il
faut le blâmer de n'avoir pas suivi les justes proportions de ce système
antique qu'il vouloit faire revivre. Peut-être seroit-il plus juste de s'en
(1) Il est composé de vingt-deux colonnes d'ordre corinthien, de cinq pieds et demi de diamètre., de
ciiKjuantc-liuit pieds de hauteur, y compris base et chapiteau.
(2) Il a cent vingt pieds de base sur environ vingt-ejuatre pieds de haut.
(5) Feu M. Legrand.