PREFACE
L
Architecture, qui tient un rang sî distingué entre les arts les plus utiles , les
plus commodes & les plus nobles , a pris ses commencemens dans des tems si recu-
lés, que 1*époque de sa naitfance se perd à travers les ténèbres, & 1* incertitude,
dont elle est enveloppée. Ce que Vitruve (i) en dit, parait en tout choquer la
yraisemblance. Cependant son opinion a été adoptée par des écrivains très-judicieux
& très-eclairès, 8c ils ont regardé comme indubitables des récits, qu'on feroit ten-
té de prendre pour des fables, plutôt que pour des faits historiques.
Un remontant de siècle en siècle pour découvrir 1* origine de 1* Architecture, on
trouvera, que cet art est presque aussï ancien que le monde. Dès que les hommes
eurent été crées i leur premier soin dut être de chercher à se mettre à couvert, &
les cavernes & les antres ne leur fourniraient pas des asyles suffisans. La necessité
les rendit industrieux , & ces habitations formées des mains de la nature leur inspirant
la pensée de s'en procurer par le secours de l'art, leur servirent aussi de modèle.
A mesure que les premiers habitans se multiplièrent, ÏÏ5 sc répandirent sur la
face de la terre, 8c ils formèrent des societés particulières. Ils choisirent pour cela
les lieux qui leur parurent les plus convenables 8c les plus propres pour y subsister
commodément: il fallut se garantir des ardeurs du soleil, des attaques des bêtes
féroces, & des injures des saisons, aux quelles ils se trouvaient souvent exposés :
ils multiplièrent donc leurs logemens, 8c l'art de construire s'accrût à proportion
du nombre des besoins. On se contenta d'abord de remédier aux plus presTans ; de
là on passa aux commodités 5 enfin on s'attacha à donner aux habitations un peu
d'ordre 8c d'enjolivement (2).
Rien de plus simple que les premières que 1' on construisit ; les matériaux en
étaient grosîiers, & la main d'œuvre y repondait. Des cabanes 8c des huttes, cou-
vertes de roseaux 8c de chaume, ceintes d'une especc de mur fait de joncs ou de
branches d* arbres, 8c enduit de limon ou de boue, soutenues par des pièces de bois
qu'on enfonçait un peu dans la terre: tels furent les premiers ouvrages de l'Archi-
tecture naisfante. (3) Sans aller fouiller dans l'obscure antiquité pour y chercher
une idée de ces édifices, nous en avons sous les yeux une image sensiblc dans les
(*) Vhruye liv. II. chap. i. mier. Préface. A la Haye, chez Pierre GossTc
(*) L*sstrcbltesture , À qui la necefàti a, donné son Se Jean Neaulme 17J0.
origine & U comodité son accroijsement. Cours (j) V. L' Architecture de Jean Antoine sUsconî.
d Architestiuc pat a. C. Daviler Tom. Pre- Venisc 1660.
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Architecture, qui tient un rang sî distingué entre les arts les plus utiles , les
plus commodes & les plus nobles , a pris ses commencemens dans des tems si recu-
lés, que 1*époque de sa naitfance se perd à travers les ténèbres, & 1* incertitude,
dont elle est enveloppée. Ce que Vitruve (i) en dit, parait en tout choquer la
yraisemblance. Cependant son opinion a été adoptée par des écrivains très-judicieux
& très-eclairès, 8c ils ont regardé comme indubitables des récits, qu'on feroit ten-
té de prendre pour des fables, plutôt que pour des faits historiques.
Un remontant de siècle en siècle pour découvrir 1* origine de 1* Architecture, on
trouvera, que cet art est presque aussï ancien que le monde. Dès que les hommes
eurent été crées i leur premier soin dut être de chercher à se mettre à couvert, &
les cavernes & les antres ne leur fourniraient pas des asyles suffisans. La necessité
les rendit industrieux , & ces habitations formées des mains de la nature leur inspirant
la pensée de s'en procurer par le secours de l'art, leur servirent aussi de modèle.
A mesure que les premiers habitans se multiplièrent, ÏÏ5 sc répandirent sur la
face de la terre, 8c ils formèrent des societés particulières. Ils choisirent pour cela
les lieux qui leur parurent les plus convenables 8c les plus propres pour y subsister
commodément: il fallut se garantir des ardeurs du soleil, des attaques des bêtes
féroces, & des injures des saisons, aux quelles ils se trouvaient souvent exposés :
ils multiplièrent donc leurs logemens, 8c l'art de construire s'accrût à proportion
du nombre des besoins. On se contenta d'abord de remédier aux plus presTans ; de
là on passa aux commodités 5 enfin on s'attacha à donner aux habitations un peu
d'ordre 8c d'enjolivement (2).
Rien de plus simple que les premières que 1' on construisit ; les matériaux en
étaient grosîiers, & la main d'œuvre y repondait. Des cabanes 8c des huttes, cou-
vertes de roseaux 8c de chaume, ceintes d'une especc de mur fait de joncs ou de
branches d* arbres, 8c enduit de limon ou de boue, soutenues par des pièces de bois
qu'on enfonçait un peu dans la terre: tels furent les premiers ouvrages de l'Archi-
tecture naisfante. (3) Sans aller fouiller dans l'obscure antiquité pour y chercher
une idée de ces édifices, nous en avons sous les yeux une image sensiblc dans les
(*) Vhruye liv. II. chap. i. mier. Préface. A la Haye, chez Pierre GossTc
(*) L*sstrcbltesture , À qui la necefàti a, donné son Se Jean Neaulme 17J0.
origine & U comodité son accroijsement. Cours (j) V. L' Architecture de Jean Antoine sUsconî.
d Architestiuc pat a. C. Daviler Tom. Pre- Venisc 1660.
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