CATHÉDRALE DE STRASBOURG. 33
la grande époque de Rodolphe de Habsbourg, dont la statue y fut placée en mémoire de
ses bienfaits. -Les successeurs de cet empereur visitèrent souvent cette basilique, et c'est
sur les degrés de la porte de son aile méridionale qu'ils avaient coutume de recevoir les
hommages des habitans de la ville et de la province. Dans ces temps l'intérieur du chœur
était décoré des drapeaux et des autres trophées conquis par les citoyens de Strasbourg
dans les combats où avait brillé leur bannière victorieuse. Cest devant le portail occidental
que les magistrats et les tribus de la bourgeoisie prêtaient, au renouvellement de chaque
année, un serment solennel. Ce temple ayant servi tour à tour à deux cultes divers, ses
voûtes ont retenti des voix éloquentes des prédicateurs de l'un et de l'autre. Son grand-
chapitre était l'un des plus illustres de toute l'Allemagne, et ses évêques étaient des princes
puissans, ayant voix et séance aux dictes de l'Empire. Cette prérogative leur fut conservée
depuis la réunion de l'Alsace à la France, en considération de la partie de leur évêché
située sur la rive droite du Rhin (i), et ils jouirent en même temps d'un rang non moins
distingué parmi les prélats de France.
Louis XIV, accompagné de toute sa cour, visita cette église dès le lendemain du jour
où il vint prendre possession de Strasbourg, et l'on estime à plusieurs millions la valeur
des ornemens dont il fit présent à ses chanoines. C'est dans cette cathédrale que fut célébré,
en 1723, le mariage de Louis XV (représenté par Louis, duc d'Orléans, premier prince du
sang) avec la fille du roi de Pologne. Louis XV lui-même vint y faire ses dévotions en 1744-
L'infortunée reine Marie-Antoinette la visita à son entrée en France en 1770, et cinq ans
plus tard Louis XVI accorda à son grand-chapitre une décoration particulière, en recon-
naissant formellement que ce chapitre tenait le premier rang parmi tous les corps ecclé-
siastiques affectés à la haute noblesse.
A côté de ces hommages où l'éclat du rang se confond avec la majesté de la religion, les
beautés de l'édifice lui-même et le génie d'Envin, son principal architecte, furent appréciés
par des suffrages de plus en plus éclairés. Le célèbre Gcethe lui consacra quelques-unes de
ses pages éloquentes; d'autres écrivains distingués rivalisèrent d'efforts pour en faire con-
naître et sentir le mérite : un goût moins rétréci cessa de dédaigner le style de l'architecture
qu'on y voit briller, et l'on rendit autant de justice à ses ingénieux détails qu'à l'effet impo-
sant de son étonnante élévation. Dans les temps même où les ravages de la guerre désunis-
saient les peuples, où la flèche de cette cathédrale célébrait par les mille flambeaux de ses
brillantes illuminations des événemens qui pesaient douloureusement sur une partie de
l'Europe, ce monument, auquel deux nations rivales se plaisent à rattacher une grande part
de leur antique illustration dans les arts, ne cessa de réunir tous les sentimens dans une
commune admiration. Puissc-t-il, préservé à jamais de tout accident funeste, être toujours
environné de paix} d'union et de prospérité.
(») Elle leur avait été 6léc en 1G74 j mais dlo leur fui rendue par la paix de RjSM'iek ; ils ne recommenceront cependant à eu
fiiirc usage que depuis l'an îyaô, A la suite d'une négocia lion conduite par I,- célèlire Scluuplliii, le cardinal do lioliaii reçut alors
do l'empereur Charles VI l'investiture formelle de la principauté au-dcl;\ du Hliin. ( Vqyct Us Eisaii de Graudidier, page i63.)
la grande époque de Rodolphe de Habsbourg, dont la statue y fut placée en mémoire de
ses bienfaits. -Les successeurs de cet empereur visitèrent souvent cette basilique, et c'est
sur les degrés de la porte de son aile méridionale qu'ils avaient coutume de recevoir les
hommages des habitans de la ville et de la province. Dans ces temps l'intérieur du chœur
était décoré des drapeaux et des autres trophées conquis par les citoyens de Strasbourg
dans les combats où avait brillé leur bannière victorieuse. Cest devant le portail occidental
que les magistrats et les tribus de la bourgeoisie prêtaient, au renouvellement de chaque
année, un serment solennel. Ce temple ayant servi tour à tour à deux cultes divers, ses
voûtes ont retenti des voix éloquentes des prédicateurs de l'un et de l'autre. Son grand-
chapitre était l'un des plus illustres de toute l'Allemagne, et ses évêques étaient des princes
puissans, ayant voix et séance aux dictes de l'Empire. Cette prérogative leur fut conservée
depuis la réunion de l'Alsace à la France, en considération de la partie de leur évêché
située sur la rive droite du Rhin (i), et ils jouirent en même temps d'un rang non moins
distingué parmi les prélats de France.
Louis XIV, accompagné de toute sa cour, visita cette église dès le lendemain du jour
où il vint prendre possession de Strasbourg, et l'on estime à plusieurs millions la valeur
des ornemens dont il fit présent à ses chanoines. C'est dans cette cathédrale que fut célébré,
en 1723, le mariage de Louis XV (représenté par Louis, duc d'Orléans, premier prince du
sang) avec la fille du roi de Pologne. Louis XV lui-même vint y faire ses dévotions en 1744-
L'infortunée reine Marie-Antoinette la visita à son entrée en France en 1770, et cinq ans
plus tard Louis XVI accorda à son grand-chapitre une décoration particulière, en recon-
naissant formellement que ce chapitre tenait le premier rang parmi tous les corps ecclé-
siastiques affectés à la haute noblesse.
A côté de ces hommages où l'éclat du rang se confond avec la majesté de la religion, les
beautés de l'édifice lui-même et le génie d'Envin, son principal architecte, furent appréciés
par des suffrages de plus en plus éclairés. Le célèbre Gcethe lui consacra quelques-unes de
ses pages éloquentes; d'autres écrivains distingués rivalisèrent d'efforts pour en faire con-
naître et sentir le mérite : un goût moins rétréci cessa de dédaigner le style de l'architecture
qu'on y voit briller, et l'on rendit autant de justice à ses ingénieux détails qu'à l'effet impo-
sant de son étonnante élévation. Dans les temps même où les ravages de la guerre désunis-
saient les peuples, où la flèche de cette cathédrale célébrait par les mille flambeaux de ses
brillantes illuminations des événemens qui pesaient douloureusement sur une partie de
l'Europe, ce monument, auquel deux nations rivales se plaisent à rattacher une grande part
de leur antique illustration dans les arts, ne cessa de réunir tous les sentimens dans une
commune admiration. Puissc-t-il, préservé à jamais de tout accident funeste, être toujours
environné de paix} d'union et de prospérité.
(») Elle leur avait été 6léc en 1G74 j mais dlo leur fui rendue par la paix de RjSM'iek ; ils ne recommenceront cependant à eu
fiiirc usage que depuis l'an îyaô, A la suite d'une négocia lion conduite par I,- célèlire Scluuplliii, le cardinal do lioliaii reçut alors
do l'empereur Charles VI l'investiture formelle de la principauté au-dcl;\ du Hliin. ( Vqyct Us Eisaii de Graudidier, page i63.)