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LE SIFFLET

Pour tout ce qui concerne la rédaction et Vadmi-
nistration, s'adresser à M. Michel Anézo, 7, rue
Rochechouart.


PRIME DU SIFFLET

M REVOLVER A SIX COUPS

En acier fondu, des manufactures de Liège

Portant le poinçon de l’épreuve

D’une valeur RÉELLE de 30 francs

EST DONNÉ

Avec un abonnement d'un an, pour 15 fr. seidement
c’est-a-dire l’abonnement d'un an

POUR RIEN

Et un Revolver de 30 fr. pour 1 fr.

Ajouter deux francs pour le port et l’emballage.
Adresser les demandes à l’administrateur du Sifflet.

(On peut se procurer chez tous les armuriers la cartouche
à broche de sept milimètres.)

AVIS

Malgré le grand nombre de demandes que nous rece-
vons de notre prime de revolver, nous pouvons satis-
faire immédiatement toutes les personnes qui nous font
l’honneur de nous écrire. Un traité passé avec la plus
importante manufacture de Liège nous permet d’avoir à
notre disposition la quantité de revolvers qui nous est de-
mandée chaque jour.

TRUNOS 0'ASNIERES

Séance publique d'hier soir

PRÉSIDENCE DE M. MARK OU SKI

La séance est ouverte à deux heures et demie.

Le procès-verbal de la dernière séance est adopté.

M. de Lorge.monte à la tribune.

Le Président. —M. de Lorge.a la parole.

M. de Lorge.— Permettez-moi de me rafraî-

chir. (Il boit trois verres d'eau sucrée.)

Une voix. — Oh! assez.

M. de Lorge. .... — Messieurs, je crois avoir le
droit.(Il boit un quatrième verre.)

Le Président. — Monsieur de Lorge. prenez

garde ds vous faire du mal.

M. de Lorge. — Il n’y a pas de danger... c’est
l’eau de Notre-Dame-de-la-Grenouillère.

Messieurs, je viens soumettre à votre examen un pro-
jet de loi ayant pour objet d'admettre les femmes au suf-
f rage universel.

M. de Belcas.— Un peu plus haut, je n’en-

tends pas.

M., de Lorge. D’admettre les femmes au suf-

frage universel.

M. Lock. .... — C’est idiot.

Le Président. —* Laissez déposer à la tribune...

Une Voix. — Oùs qu’il y a de la gêne n’y i a pas de
plaisir ! .

M. de Lorge. ....—= Je vais vous en donner lec-
ture.

M. de Belcas.«—Un peu plus haut, je n’en-

tends pas.

M. de Lorge. .... -«Servez-vous d’un tuyau acous-
tique !

M. de Belcas. .,.. — Bravo ! bravo ! bravo!

Le Président. — Monsieur de Belcas... je vous
rappelle à l’ordre.

M. de Belcas. Bravo! bravo! bravo !

Le Président. «— Le pauvre homme !

M. de Lorge.— Considérant que la femme a été

appelée depuis longtemps un vase d’élection...

M. Gambe.—• Qui vous a dit cela ?

M. de Lorge. .... — Oui, depuis les temps les plus j
reculés, la femme a été appelée un vase d’élection.

M. Ord. .... — C’est un infamie !

M. de Lorge.—Virgile et Homère Font dit

avant moi.

M. Le d ..... — Ce n’est pas vrai !

— M.dé LoRge ..... — Considérant qu’elle est bien
plus capable que l'homme d’exercer ses droits ciyils et
politiques, je vous propose d’adopter la loi dont la teneur
suit :

PROJET DE LOI
article premier

Toute Française âgée de vingt el un an, et vaccinée
est électrice et éligible.

ART. 2»

Les actrices des Folies-Dramatiques jouiront des mê-
mes droits civils.

art. 3.

Les hommes et les Auvergnats seront désormais dés
clarés incapables de voter et d’être élus.

art. 4.

Les femmes qui désireront être députées devront jus-
tifier de deux ans de fidélité.

Néanmoins, il sera fait une exception en faveur des
habituées du Jardin Mabille.

art. 5.

Les hermaphrodites pourront également être électeurs,
mais ils ne pourront, à moins de dispense, être admis
aux fonctions de députés.

art. 6.

Mademoiselle Blanche d’Antigny est chargée de l’exé-
cution de la présente loi.

Henri Bris.— Voyez-vous ça!

M. de Lorg. — En qualité de nourrisson des

Muses, je ne puis mieux faire que de citer à l’appui de
ma thèse les deux vers suivants, que je n’ai pas faits,
car ils n’ont pas dix-huit pieds :

Le mépris pour le sexe est un air qu’on se donne
Qui n’est en vérité convenable à personne.

Assez longtemps, Messieurs, le beau sexe’a été en butte...

M. de Tillan. — Est-ce que vous parlez des

buttes Montmartre?

M. de Lorge.— Ne m’interrompez pas, s’il vous

plaît, et laissez-moi m’étendre à loisir sur les charmes
de ce sexe enchanteur auquel nous devons Blanche
d’Antigny. Assez longtemps, dis-je, le beau sexe a été
en butte.

M. de Gavar.— Ah! oui, les buttes Chaumont,je

les connais !

M. de Lorge.— En butte à l’indifférence et au

mépris. Au moyen âge, la femme.

M. Chan. — U y a longtemps que Blanche

d’Antigny a passé le moyen âge.

M. de Lorge.— En butte à l’indifférenee...

M. de Kerdr.— Oui, la butte aux Cailles...

M. de Lorge.— En butte à l’indifférence et au

mépris. Au moyen âge la femme était considérée comme
une esclave. De nos jours, la civilisation a adouci les
mœurs et la femme est traitée, sinon avec les égards dus
à son sexe... féminin, du moins avec plus de déférence..
C’est ainsi que les cocottes ont des huit-ressorts, des bi-
joux et des robes à longues traînes...

M. de Gavar.— Ne parlez pas des cocottes où je

m’en vais.

M. de Lorge... — Restez, monsieur de Gavar....,
je ne dirai rien que vous ne puissiez entendre. Des co-
cottes, je passe, par une transition savamment amenée,
à l’aimable classe des rosières... La rosière, Messieurs,
est une élue du süffrage universel... Du moment qu’elle
est éligible, pourquoi ne serait-elle pas aussi électrique,
pardon, je voulais dire électrice?... Des rosières, je
reviens aux cocottes.

M. de Gavar... — Oh! alors, je m’en vais!

M. de Lorge. — Rassurez-vous, je ne m’appe-

santirai pas trop sur les cocottes.

M. de Gavar.— Et vous ferez bien!

M. de Lorge. — La cocotte elle-même est issue...

M. de Tillan.— Elle est tissue d’infamie.

M. de Lorge.— Est issue du suffrage universel.

Je veux parler de la grande cocotte qui n’arrive à la
célébrité que parce qu’elle réunit tous les votes. Et dans
l’antiquité, Messieurs, pour qui votait-on ?

(M. de Gavar.sen va.)

M. de Belcas.— Plus haut, je n’entends pas.

M. de Lorge..... — On votait pour Aspasie et
Phryné qu’on mettait au rang des déesses. Et mainte-
nant qu’il est admis que la cocotte est éligible, je veux
aussi qu’elle soit électrice. Yoici donc les rosières et les
cocottes admises au suffrage universel. Je vais parler à
présent des classes intermédiaires. Entre la cocotte et la
rosière, il existe ce qu’on appelle la femme honnête.

M. de Tillan.— Vous donnez donc à entendre

que la rosière ne serait pas honnête ?

M. de Lorge. .... — Loin de moi cette pensée sa-
crilège !... J e veux dire tout simplement que je vais m’oc-
cuper à présent, des autres classes de la société fémi-
nine. Ces classes comprennent :

La jeune fille,

La femme mariée.

Et la femme veuve.

Pourquoi la jeune fille ne voterait-elle pas? Est-ce
que la plupart des lois que les Assemblées édictent ne les
touchent pas de très près ? Est-ce que les lois d’impôts
ne l’atteignent point aussi bien que si elle appartenait
au sexe fort?... Voyez plutôt l’impôt sur le tabac...

M. de Tillan. — Ah! ah! ah! ahI Est-ce que

les jeunes filles fument?

M. de Lorge-. — On en a vu qui fumaient,

Messieurs ! C’est ainsi que les actrices du Théâtre-Déja-
zet, qui, la plupart sont encore vierges,fument des ciga-
rettes pendant les entr’actes. Donc les jeunes filles
doivent prendre part au suffrage universel. Des demoi-
selles, je vais passer aux femmes mariées* La femme
mariée est tout dans le mariage, Messieurs, pour vous
marier, il vous faut une femme 5 or, le mariage repré-
sente la société, la société représente le pays et le Pays
est un journal du soir.,.

( Applaudissements prolongés sur un grand
nombre de bancs. )

M. de Lorge. .... — Or, jevousle demande, quelle
est la mission de la femme dans le mariage? C’est d’en-
nuyer le mari, de le faire endêver, d’enlaidir ses jours et
de troubler ses nuits. Sa mission. Messieurs, consiste à
enlever à son époux, une par une, toutes ses prérogatives;
de lui enlever son autorité, le droit de surveillance des
enfants, et son repos personnel. De l’homme, elle a non-

seulement pris les droits et les avantages, mais encore
les mœurs et le costume. Elle a déjà depuis longtemps
arboré le chapeau haute forme, puis la canne et les
bottes. Pourquoi ne prendrait-elle pas non plus son droit
de vote? Donc, la femme mariée doit pouvoir voter.

Quant à la femme veuve, elle doit être assimilée à la
femme mariée, dont elle ne diffère que pour une chose
bien minime : la privation de son mari.

En conséquence, je vous engage, Messieurs, à adop-
ter sans hésitation et sans restriction le projet de loi que
j’ai eu l’honneur de vous soumettre. (Il boit trois ver-
res d'eau sucrée.)

Le Président. — La chaleur devenant accablante
et chacun désirant naturellement aller se rafraîchir, je
crois de mon devoir de suspendre la séance pendant une
demi-heure.

(Applaudissements à gauche, trépignements à
droite.)

• M. de Belcas.— Plus haut, je n’entends pas.

La séance est suspendue pendant une demi-heure.

Tous les honorables membres se précipitent vers la
buvette.

SECONDE PARTIE

GRAVE INCIDENT!!!

La séance est reprise ; le président se place dans son
fauteuil; M. Gambe. .. monte à la tribune.

Le Président, agitant sa sonnette. — M. Gambe...
a la parole.

Les Huissiers. —Silence! silence!

M. Gambe. .... — Messieurs, loin de trouver un mot
à dire contre l’excellent discours de mon honorable et
stupide adversaire...

(Rumeurs à droite.)

Une voix a gauche. — Très bien ! parfaitement !
c’est un imbécile.

Voix. Continuez! continuez!...

M. Gambe.— De mon adversaire,'loin de trou-

ver un mot à dire contre, dis-je, j’en trouve énormé-
ment. La femme ne saurait être admise à voter, selon
moi, pour une excellente raison.

Olympe Audouard, de la tribune. — Tais-toi donc!

(Mouvements divers quoique en été.)

M. le Président. — Je prie la dame qui vient d’in-
terrompre l’orateur de vouloir bien l’attendre à la sortie.
Je ne puis tolérer un pareil scandale dans la salle.

Plusieurs Voix — Très bien\ très bien !

M. Gambe. —- Je continue. Si nous accordions

au sexe faible...

Une voix de femme. — Plus fort que le tien.

M. Gambe. — L’honneur d’envoyer des repré-

sentants à la Chambre, leur premier soin serait d’élever
au rang de députés un tas de crevés qui...

Une voix a droite. — A l’hospice!

Le Président. — Je prie de ne pas interrompre l’ora-
teur, ou sinon je lève la séance.

Tous. — Très bien ! très bien !

M. Gambe. — Qui demanderaient à leur tour

que les femmes soient éligibles.

Une dame dans la tribune. — Et puis après ! vieux
melon !

(Rumeurs prolongées.)

M. Gambe.— Or, Messieurs, qu’arriverait-il si,

parmi cet'e auguste réunion, il se trouvait de ces en-
chanteresses...

(Très bien'.)

..... de ces adorables créatures...

Dans les tribunes. — Parfait ! parfait!...

.noceuses et vicieuses à rendre jalouse...

Dans les tribunes. — A la porte ! vieille croûte !

L'agitation est d son comble. M. le président veut
se couvrir, mais, dans son trouble, il agite son cha-
peau et met la sonnette sur sa tête.

(Le calme se rétablit.)

M. le Président. — Si l’orateur n’est pas un peu
plus circonspect, je me verrai dans la nécessité de lui re-
tirer la parole.

Voix a gauche. — Et s’il la garde?

Le Président. — Eh! bien, nous le verrons bien.

M. Gambe.... — Oui, je le répète, décochons...

Voix diverses. — A l’ordre ! à l’ordre!...

Le Président. — Monsieur?... je vous rappelle à
l’ordre.

M. Gambe. ... — Comment, je ne puis plus exprimer
mes opinions, maintenant!

Le Président. — Si, parfaitement, mais ces termes de
charcuterie ne sauraient...

M. Gambe....* — Je tiens pour sots...

(Cris, bruits, interpellations diverses.)

M* LE Président, rouge de colère et se levant. —
Dites donc, Monsieur, est-ce à moi que vous dites ça?
Voulez-vous que je vous f...... des calottes?

M. Rou.— Oui, répondez donc, espèce de singe.

M. Gambe.—- D’abord, je ne vous dis rien à vous,

vieux pocliard.

M. Rou..».., escaladanila tribune. —• Ah! je suis
un vieux pochard ! attends un peu.

(M. A. se jette sur M. X. — M. B. sur M. A. — M.
C. sur M. B. — Un huissier intervient, M. J. l’attrappe
par une jambe et s’en sert pour faire le moulinet. — Le
calme se rétablit»)

M. Gambe.....—Je regrette profondément qu’on ait si
imparfaitement compris mes paroles, et surtout qu’on
m’ait déchiré mon paletot, lorsque j’ai dit : décochons.
J’ai voulu dire * décocher...
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