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Texier, Charles
Asie Mineure: description geographique, historique et archeologique des provinces et des villes de la chersonnése d'Asie — Paris, 1862

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https://doi.org/10.11588/diglit.10179#0163

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ASIE MINEURE.

des Teucriens sur les penchants de
l’Ida et du Gargare, et s’ils ne sont plus
nommés dans les traditions plus ré-
centes, c’est qu’ils se sont confondus
avec les populations plus nombreuses.
Voilà tout ce qu’on peut recueillir de
probable sur les Mysiens primitifs. Il
n’est pas certain qu’ils aient bâti des
villes, au moins n’en est-il pas fait
mention durant toute la période où ils
sont les seuls maîtres du pays. Autant
les Pélasges et les Lélèges étaient cons-
tructeurs hardis et actifs, autant les
Mysiens paraissaient-ils peu disposés à
s’enfermer dans l’enceinte des murailles.
Leur costume sauvage consistait en un
bonnet de peau de renard et en une tu-
nique recouverte d’une espèce de surcot,
appelé zéïra, les jambes garnies de bottes
de peau de daim, une courte sagaie
et une lance à la main, pour arme dé-
fensive, un petit bouclier, tel est le ta-
bleau qu’en fait Hérodote (1). On y
reconnaît plutôt le type du guerrier
nomade que celui d’un cultivateur et
d’un colon sédentaire.
Le Mysien s’est mélangé avec les
races habitant avant lui la Chersonnèse
d’Asie. Le peuple lydien, confondu
sous le nom de Méones ou Mœones avec
les Mysiens, finit par acquérir la supré-
matie sur cette race inculte, et par la
soumettre à sa domination. Sous le
règne d’Alyatte, père de Crésus, la
puissance lydienne s’étendait sur la
Mysie, et du temps de Gygès, les rois
de Lydie régnaient sur le territoire de
Troie. Si nous devons assigner une date
à la première invasion mysienne en
Asie Mineure, nous avons pour base la
colonie conduite par Teucer, qui vint
s’établir dans la Troade vers le com-
mencement du quinzième siècle avant
notre ère, et qui fit alliance avec les
Mysiens pour aller subjuguer la
Thrace.
Antérieurement à cette époque, cette
partie de la presqu’île soumise de nom
aux rois d’Assyrie, était de fait ouverte
aux incursions de tous les peuples voi-
sins et notamment des Scythes, qui la
parcouraient avec leurs femmes et leurs
troupeaux , exerçant leurs déprédations
sur les peuplades'sans défense, mais ne

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fondant aucune ville et aucun centre de
population.
Nous avions sous les yeux un tableau
de ce genre de vie nomade des peuples
du Nord, lorsque nous rencontrâmes
cette tribu russe établie aux bords du
Rhyndacus (1). Cette existence se com-
prend dans une contrée abondante en
pâturages, couverte de forêts, fournis-
sant avec abondance le gibier et le pois-
son. Il faut qu’en définitive cette contrée
soit bien propice à la vie nomade pour
qu’elle y reparaisse après dix siècles
de domination grecque ou romaine. Si
les Turcs demeurent dans des villes, c’est
qu’il les ont trouvées toutes faites; mais
toutes leurs aspirations sont pour le
grand air et la vie de la tente. Avec quelle
joie les voit-on aux approches de la
belle saison abandonner les villes pour
aller s’installer au bord des fleuves sous
la verdure des arbres et vivre là au mi-
lieu de leurs chevaux et de leurs mou-
tons, tantôt sous des tentes de peaux,
tantôt sous des huttes construites à la
hâte, mais qu’ils préfèrent aux habi-
tations des villes. Le yaela, la demeure
fraîche, est le temps heureux de la vie
du Turc. L’étranger qui arrive dans une
ville pendant cette saison croit entrer
dans une nécropole; toutes les maisons,
tous les bazars sont fermés; à peine
trouve-t-on un seul individu auquel
est confié la garde de la ville. Cela n’a
pas lieu sur le littoral où le commerce
retient la population; mais plusieurs
villes de l’intérieur et surtout le plus
grand nombre des villages ont conservé
cette habitude. Il n'y a pas tant de chan-
gement qu’on le croit entre la haute
antiquité et les temps actuels de l’Asie;
la civilisation grecque y a porté l’éclair
de son génie, ses arts et sa poésie, la
puissance romaine sous sa main de
fer y a maintenu une sorte de gouver-
nement à la surface; mais l’Asiatique
de pur sang dédaignait toutes ces splen-
deurs et n’aspirait qu’à vivre en con-
tact avec la nature sauvage et superbe,
sans autre souci qu’une indépendance
de fait qu'il a conservée sous le despo-
tisme de ses beys ou de ses sultans.
(i) Voy. ch. XXXIV.

(i) Lib. VII, cap. LXXV.
 
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