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Toutain, Jules
Les cités romaines de la Tunisie: essai sur l'histoire de la colonisation romaine dans l'Afrique du Nord — Paris, 1895

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https://doi.org/10.11588/diglit.16856#0385
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DÉCADENCE DE LA VIE MUNICIPALE DANS L'AFRIQUE ROMAINE. 371

et trop fouillées, deviennent pauvres en marbre; on trouve
moins d'or et moins d'argent dans les filons épuisés... ; il n'y a
plus de laboureurs dans les champs ; il n'y a plus de marins sur
les flots. »

Cette crise économique se produisit au moment où les charges
financières qui pesaient sur la bourgeoisie municipale deve-
naient plus lourdes. En donnant à tous les habitants libres de
l'empire le titre de citoyen romain, Garacalla avait soumis à
l'impôt sur les héritages et sur les legs tous ceux qui jusqu'alors
y avaient échappé. De même, ce fut pendant le troisième
siècle (1) que le gouvernement impérial prit l'habitude de rendre
les décurions responsables, dans leur ville, de la perception des
impôts destinés aux caisses impériales. Il est certain qu'à cette
époque la richesse privée était profondément atteinte par l'épui-
sement même des sources vives qui l'avaient jusqu'alors ali-
mentée; d'une part, les impôts devaient rentrer beaucoup plus
difficilement que par le passé; d'autre part, les membres de
l'assemblée municipale, recrutés surtout parmi les propriétaires
fonciers, étaient moins que jamais capables de supporter l'écra-
sante responsabilité pécuniaire que le gouvernement impérial
faisait peser sur eux.

Alors naquit et grossit, d'année en année, ce courant d'émi-
gration qui dépeupla des cités jadis prospères. Les Africains,
ou tout au moins ceux d'entre eux que dans chaque ville leur
condition et le nom qu'ils portaient désignaient d'avance
pour le décurionat et pour les fonctions municipales, s'em-
pressèrent d'abandonner cette petite patrie, que leurs aïeux
n'avaient jamais quittée sans esprit de retour, et qu'ils avaient
aimée d'une affection vraiment filiale. Descendants de duum-
virs, d'édiles, de flamines municipaux, ils entrèrent dans les
légions, dans l'administration impériale; ils briguèrent des
titres, ils achetèrent même de vaines dignités pour rompre tout
lien avec la ville où ils étaient nés. Ceux-ci n'hésitèrent pas à
simuler une vocation religieuse; ceux-là cherchèrent, jusque
dans les classes sociales les plus humbles, un refuge contre les
charges que leur origine leur imposait. Le besoin de vivre l'em-
porta sur la vanité et sur le patriotisme municipal ; les fatigues
du métier militaire, le sacrifice de l'indépendance, la perte
même de l'ingénuité, tout parut préférable au décurionat.

(1) J. Marquardt, Organisation de l'empire romain (Marquardt et Momtn-
sen, Manuel des antiquités romaines, t, VIII), trad. française, 1er vol., p.289.
 
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