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Toutain, Jules
Les cités romaines de la Tunisie: essai sur l'histoire de la colonisation romaine dans l'Afrique du Nord — Paris, 1895

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https://doi.org/10.11588/diglit.16856#0389
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CONCLUSION. 375

rite matérielle. La richesse économique sortit tout entière du
sol ; elle fut reconstituée dans maintes régions où elle avait
existé jadis, mais où les luttes et les guerres civiles l'avaient
sinon détruite, du moins sérieusement compromise; ailleurs,
elle fut vraiment créée pour la première fois. Jamais le pays,
dans son ensemble, n'avait été aussi fécond; jamais, depuis le
quatrième siècle de l'empire, il n'a retrouvé la même fécondité.
Toutes les forces productrices que renfermait la terre furent
alors mises en action ; le travail humain fit fructifier tous les
germes cachés dans les entrailles du sol. La nature fut prise et
acceptée telle qu'elle était; toutes les ressources qu'elle offrait
furent utilisées ; mais elles le furent sagement et prudemment :
sagement, parce qu'on ne demanda à chaque terrain et à chaque
climat que ce qu'il pouvait donner; prudemment, parce qu'on
ne dépensa pas à tort et à travers, ni d'un seul coup, ni exclusi-
vement à l'endroit où ils se présentaient, les divers éléments
nécessaires à la vie économique, en particulier les eaux couran-
tes et les eaux pluviales. Distribuées dans les campagnes par
l'irrigation, dans les villes et dans les bourgs par de nombreux
aqueducs ; tenues en réserve pour la saison sèche dans des bas-
sins ou dans cle vastes citernes, les eaux des sources, des ri-
vières et du ciel furent, pour ainsi dire, également réparties
dans l'espace et dans le temps, sans qu'il s'en perdît une seule
goutte. Là même où l'eau restait invisible, dissimulée dans les
profondeurs du sol, elle servit encore à nourrir les racines
noueuses des oliviers.

L'homme tira donc parti avec beaucoup d'énergie et d'habileté
de tout ce que la nature lui donnait ; mais il n'essaya pas de la
forcer, de lui imposer sa volonté. Il ne s'obstina pas à semer du
froment dans les régions et sous les cieux qui n'étaient pas fa-
vorables à cette culture ; s'il corrigea par son industrie les in-
convénients d'un climat inégal, il ne songea pas à modifier ce
climat lui-même comme on l'a proposé de nos jours ; autour de
Tacape, la vigne, les oliviers, les palmiers tiraient leur sève du
même sol ; mais personne ne rêva de créer des oasis artificiel-
les au milieu des sables du désert. Les routes, construites par
la main des hommes, se confondirent partout avec les voies na-
turelles de pénétration; les ports furent creusés ou plutôt de-
meurèrent aux débouchés de ces principales voies syr le littoral
de la Méditerranée. Il n'y eut pas lutte entre les habitants et
la nature; ce fut, au contraire, de leur union intime, de leur
collaboration pacifique que naquit alors la prospérité du pays.
 
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