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Voltaire; Thurneysen, Johann Jakob [Bearb.]; Haas, Wilhelm [Bearb.]
Oeuvres Complètes De Voltaire (Tome Second = Theatre, Tome II): Theatre — A Basle: De l'Imprimerie de Jean-Jaques Tourneisen. Avec des caractères de G. Haas, 1784 [VD18 90793250]

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https://doi.org/10.11588/diglit.49736#0033
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A M. FALKENER.

21

Ce qui est certain , c’est que , dans ce défaut, les
Français ont réussi plus que toutes les autres nations
anciennes et modernes mises ensemble. L’amour
paraît sur nos théâtres avec des bienséances, une
délicatesse, une vérité qu’on ne trouve point
ailleurs. C’est que de toutes les nations, la fran-
çaise est celle qui a le plus connu la société.
Le commerce continuel, si vif et si poli des
deux sexes, a introduit en France une politesse
assez ignorée ailleurs.
La société dépend des femmes. Tous les peuples
qui ont le malheur de les enfermer sont insociables.
Et des mœurs encore austères parmi vous, des
querelles politiques , des guerres de religion , qui
vous avaient rendu farouches , vous ôtèrent, jusqu’au
temps de Charles I/, la douceur de la société, au
milieu même de la liberté. Les poètes ne devaient
donc savoir, ni dans aucun pays, ni même chez
les Anglais, la manière dont les honnêtes gens
traitent l’amour.
La bonne comédie fut ignorée jusqu’à Molière,
comme l’art d’exprimer sur le théâtre des sentimens
vrais et délicats fut ignoré jusqu’à Racine 5 parce
que la société ne fut, pour ainst dire, dans sa
perfection que de leur temps. Un poète, du fond
de son cabinet, ne peut peindre des mœurs qu’il
n’a point vues; il aura plutôt fait cent odes èt
cent épîtres , qu’une scène où il saut faire parler
la nature.
Votre Dryden, qui d’ailleurs était un très-grand
génie, mettait dans la bouche de ses héros amou-
reux, ou des hyperboles de rhétorique, ou des
 
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