3o8
C’est ici que je crois avoir été séduit par des mirages dont j’ai reconnu
depuis les fallacieux prestiges. Décidément, dans l’étude de l’art, il ne faut
pas abuser de ces données de l’histoire et de la géographie ; ou plutôt il faut
comprendre de quelles manières différentes elles affectent les diverses facultés
de l’artiste qu’elles conditionnent. Il y a sa mémoire, il y a sa conscience, il
y a ses facultés créatrices, et les unes influent sur les autres, mais non pas
toujours de la manière directe que l’on croit. En la circonstance, la mémoire
et la conscience des artistes alsaciens accueillent, et contrôlent, et assimilent
des éléments extrêmement variés : leur culture s’en accroît. Oui. Mais comment
l’utilisent-ils ? Elaborent-ils « une forme de portée très haute et très large
du style international moderne »? Profitent-ils de leur situation sur le Rhin
pour « filtrer les influences allemandes »? Qu’est-ce donc que cela? Mirages.
Raisonnements par analogie avec d’autres ordres de l’activité.
Pourtant c’est un peu plus et un peu mieux. Ces paroles sont creuses si
elles prétendent convenir au style, mais elles ont un fond et je les crois encore
riches de substance si elles s’appliquent aux mobiles, à l’ambition artis-
tique. Du reste elles ne font que reprendre sous une autre forme des déclara-
tions des artistes alsaciens eux-mêmes. Ce sont de ces mirages qui font avancer
dans le désert, qui donnent l’espoir de l’oasis prochaine. Et ces tendances
vagues stimulent l’activité créatrice. Elles flattent l’orgueil. Elles poussent
vers le mieux. En vérité, je ne me trompais pas tant, et ils ne s’abusent pas
trop, les artistes alsaciens qui croient avoir un esprit plus « européen » que
les artistes d’autres provinces françaises. C’est V esprit qu’ils ont large, c’est
l’esprit qu’ils doivent toujours élargir encore, tenir attentif à toutes les formes
de l’art. Mais les /ormes qu’eux-mêmes ils créent, et qu’ils créeront, valent
surtout par leur caractère local.
Si la sympathie d’un observateur « de l’intérieur » lui permet un souhait,
c’est que l’Alsace continue à développer son programme artistique, qui d’après
cette exposition paraît être de cultiver son goût, de l’étendre, de le renouveler
par l’étude curieuse de toutes les formes du dehors, mais d’appliquer ce
goût à la création d’œuvres qui soient véritablement siennes.
C’est ici que je crois avoir été séduit par des mirages dont j’ai reconnu
depuis les fallacieux prestiges. Décidément, dans l’étude de l’art, il ne faut
pas abuser de ces données de l’histoire et de la géographie ; ou plutôt il faut
comprendre de quelles manières différentes elles affectent les diverses facultés
de l’artiste qu’elles conditionnent. Il y a sa mémoire, il y a sa conscience, il
y a ses facultés créatrices, et les unes influent sur les autres, mais non pas
toujours de la manière directe que l’on croit. En la circonstance, la mémoire
et la conscience des artistes alsaciens accueillent, et contrôlent, et assimilent
des éléments extrêmement variés : leur culture s’en accroît. Oui. Mais comment
l’utilisent-ils ? Elaborent-ils « une forme de portée très haute et très large
du style international moderne »? Profitent-ils de leur situation sur le Rhin
pour « filtrer les influences allemandes »? Qu’est-ce donc que cela? Mirages.
Raisonnements par analogie avec d’autres ordres de l’activité.
Pourtant c’est un peu plus et un peu mieux. Ces paroles sont creuses si
elles prétendent convenir au style, mais elles ont un fond et je les crois encore
riches de substance si elles s’appliquent aux mobiles, à l’ambition artis-
tique. Du reste elles ne font que reprendre sous une autre forme des déclara-
tions des artistes alsaciens eux-mêmes. Ce sont de ces mirages qui font avancer
dans le désert, qui donnent l’espoir de l’oasis prochaine. Et ces tendances
vagues stimulent l’activité créatrice. Elles flattent l’orgueil. Elles poussent
vers le mieux. En vérité, je ne me trompais pas tant, et ils ne s’abusent pas
trop, les artistes alsaciens qui croient avoir un esprit plus « européen » que
les artistes d’autres provinces françaises. C’est V esprit qu’ils ont large, c’est
l’esprit qu’ils doivent toujours élargir encore, tenir attentif à toutes les formes
de l’art. Mais les /ormes qu’eux-mêmes ils créent, et qu’ils créeront, valent
surtout par leur caractère local.
Si la sympathie d’un observateur « de l’intérieur » lui permet un souhait,
c’est que l’Alsace continue à développer son programme artistique, qui d’après
cette exposition paraît être de cultiver son goût, de l’étendre, de le renouveler
par l’étude curieuse de toutes les formes du dehors, mais d’appliquer ce
goût à la création d’œuvres qui soient véritablement siennes.