132 L'ART.
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M. Mauve entend et traite l'aquarelle ainsi que la peinture à l'huile; même valeur de tons,
même solidité d'aspect, et avec cela une légèreté d'exécution qui laisse à l'œuvre toute la fraî-
cheur d'une impression vivement sentie et fidèlement rendue.
Ce petit coin rappelle bien ces paysages baignés dans une atmosphère humide et grise qui
confond toutes les couleurs en une gamme si harmonieuse et si tranquille. C'est bien plus une
réalité qu'une aquarelle, qu'une oeuvre d'art, et, pour qui connaît la Hollande, c'est un souvenir
d'une telle fidélité que l'illusion est complète.
Le dessin de M. Mauve publié en même temps que ce compte rendu est une copie de la
Gardeuse de vaches, tout aussi remarquable que la Blanchisseuse et la Charrette ; même sobriété
d'exécution ; rien de sacrifié à l'effet. L'artiste obéit avant tout au sentiment de la vérité, et
sans le secours d'aucun autre procédé que sa consciencieuse et fidèle reproduction, il anime et
fait vivre son œuvre.
M. J. H. Maris, dont les aquarelles sont tout aussi justes d'aspect, est cependant plus
coloriste; sa nature le conduit à chercher des effets plus accentués, plus brillants.
Sa Vue de ville (Hollande) est d'une hardiesse et d'une solidité auxquelles nous ont peu
habitué les aquarellistes. Son Laboureur conduisant une charrue attelée de deux chevaux est
d'une tonalité sombre et saisissante. Il est impossible de se défendre du charme plein de mélan-
colie qui se dégage de cette œuvre. Les premiers plans sont encore dans l'ombre, et c'est dans
le vague des lueurs du petit jour que se dessine la silhouette de l'attelage et du paysan penché sur
la charrue. A l'horizon, une bande argentée éclaire déjà le ciel qui va resplendir clans peu
d'instants. C'est tout un poëme que cette page de la grande vie des champs, et la pensée de
l'artiste est si simplement rendue que l'on ne sait qui préférer du peintre ou du poète.
M. Willem Maris, frère du précédent, est un aquarelliste d'une ' incontestable valeur. 11 y
avait de lui au palais ducal un paysage d'un effet très-simple et des mieux réussis. Il ne faut pas
oublier non plus une mare que les branches d'un arbre couvrent d'une sorte de verdure. Les
rayons du soleil pénètrent au travers du feuillage et viennent éclairer joyeusement l'eau au milieu
de laquelle s'ébattent des canards.
M. H. Weissenbruch avait exposé, entre autres choses, un Moulin d'une bonne exécution, mais
dont la lumière n'est pas heureuse, le motif ayant sans doute été copié alors que le soleil commen-
çait à se montrer après la pluie, ce qui donne à l'ensemble des reflets nacrés qui ne sont pas d'un
effet agréable. La Plage de Scheveningen, du même artiste, est préférable et largement traitée.
Un Temps orageux de M. Mesdag, aquarelle vigoureuse et d'un beau ton. C'est un vaisseau
qui fuit devant la tempête, les vagues sont belles et très-heureusement rendues. L'aquarelle
intitulée Matin est moins bonne, elle est d'un faire un peu « flou »; c'est une note fort juste
assurément, mais un peu monotone et qui manque d'intérêt.
M. Israels paraît être devenu amoureux des tons de Corot. Son aquarelle En regardant est
vouée au bleu pâle, le motif est joli, mais la façon générale de traiter le terrain et le ciel donne
à l'ensemble un aspect nuageux qui gêne le regard. On cherche, mais en vain, un point solide,
et il paraît inexplicable que la figure de femme qui regarde l'horizon puisse être- supportée par
les dunes tant elles sont vaporeuses et fluides.
11 ne faut oublier ni M. Vandesande Bakhuijzen qui avait exposé une belle vue des dunes,
dont les premiers plans se confondent trop en une seule gamme avec le fond, ni M. Stortenbeker,
un animalier, auteur de deux paysages dont les vaches sont bien dessinées, mais un peu sèche-
ment peintes.
Deux'jolies 'figures de M. Blommers, quoique sa façon de traiter les mêmes sujets à l'huile
soit de beaucoup préférable.
Enfin, et pour épuiser la liste des œuvres hollandaises, il faut nommer encore M. Gabriel,
d'un talent incontestable, mais dont les aquarelles tournent par trop au violet, et M. Springer,
qui avait une grande Vue des maisons dites de Bossu, à Hoorn. Le motif doit être plus pitto-
resque en nature. M. Springer accumule de nombreux détails d'un égal fini, quels que soient
leurs plans, ce qui fait ressembler son aquarelle à- une grande photographie coloriée.
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M. Mauve entend et traite l'aquarelle ainsi que la peinture à l'huile; même valeur de tons,
même solidité d'aspect, et avec cela une légèreté d'exécution qui laisse à l'œuvre toute la fraî-
cheur d'une impression vivement sentie et fidèlement rendue.
Ce petit coin rappelle bien ces paysages baignés dans une atmosphère humide et grise qui
confond toutes les couleurs en une gamme si harmonieuse et si tranquille. C'est bien plus une
réalité qu'une aquarelle, qu'une oeuvre d'art, et, pour qui connaît la Hollande, c'est un souvenir
d'une telle fidélité que l'illusion est complète.
Le dessin de M. Mauve publié en même temps que ce compte rendu est une copie de la
Gardeuse de vaches, tout aussi remarquable que la Blanchisseuse et la Charrette ; même sobriété
d'exécution ; rien de sacrifié à l'effet. L'artiste obéit avant tout au sentiment de la vérité, et
sans le secours d'aucun autre procédé que sa consciencieuse et fidèle reproduction, il anime et
fait vivre son œuvre.
M. J. H. Maris, dont les aquarelles sont tout aussi justes d'aspect, est cependant plus
coloriste; sa nature le conduit à chercher des effets plus accentués, plus brillants.
Sa Vue de ville (Hollande) est d'une hardiesse et d'une solidité auxquelles nous ont peu
habitué les aquarellistes. Son Laboureur conduisant une charrue attelée de deux chevaux est
d'une tonalité sombre et saisissante. Il est impossible de se défendre du charme plein de mélan-
colie qui se dégage de cette œuvre. Les premiers plans sont encore dans l'ombre, et c'est dans
le vague des lueurs du petit jour que se dessine la silhouette de l'attelage et du paysan penché sur
la charrue. A l'horizon, une bande argentée éclaire déjà le ciel qui va resplendir clans peu
d'instants. C'est tout un poëme que cette page de la grande vie des champs, et la pensée de
l'artiste est si simplement rendue que l'on ne sait qui préférer du peintre ou du poète.
M. Willem Maris, frère du précédent, est un aquarelliste d'une ' incontestable valeur. 11 y
avait de lui au palais ducal un paysage d'un effet très-simple et des mieux réussis. Il ne faut pas
oublier non plus une mare que les branches d'un arbre couvrent d'une sorte de verdure. Les
rayons du soleil pénètrent au travers du feuillage et viennent éclairer joyeusement l'eau au milieu
de laquelle s'ébattent des canards.
M. H. Weissenbruch avait exposé, entre autres choses, un Moulin d'une bonne exécution, mais
dont la lumière n'est pas heureuse, le motif ayant sans doute été copié alors que le soleil commen-
çait à se montrer après la pluie, ce qui donne à l'ensemble des reflets nacrés qui ne sont pas d'un
effet agréable. La Plage de Scheveningen, du même artiste, est préférable et largement traitée.
Un Temps orageux de M. Mesdag, aquarelle vigoureuse et d'un beau ton. C'est un vaisseau
qui fuit devant la tempête, les vagues sont belles et très-heureusement rendues. L'aquarelle
intitulée Matin est moins bonne, elle est d'un faire un peu « flou »; c'est une note fort juste
assurément, mais un peu monotone et qui manque d'intérêt.
M. Israels paraît être devenu amoureux des tons de Corot. Son aquarelle En regardant est
vouée au bleu pâle, le motif est joli, mais la façon générale de traiter le terrain et le ciel donne
à l'ensemble un aspect nuageux qui gêne le regard. On cherche, mais en vain, un point solide,
et il paraît inexplicable que la figure de femme qui regarde l'horizon puisse être- supportée par
les dunes tant elles sont vaporeuses et fluides.
11 ne faut oublier ni M. Vandesande Bakhuijzen qui avait exposé une belle vue des dunes,
dont les premiers plans se confondent trop en une seule gamme avec le fond, ni M. Stortenbeker,
un animalier, auteur de deux paysages dont les vaches sont bien dessinées, mais un peu sèche-
ment peintes.
Deux'jolies 'figures de M. Blommers, quoique sa façon de traiter les mêmes sujets à l'huile
soit de beaucoup préférable.
Enfin, et pour épuiser la liste des œuvres hollandaises, il faut nommer encore M. Gabriel,
d'un talent incontestable, mais dont les aquarelles tournent par trop au violet, et M. Springer,
qui avait une grande Vue des maisons dites de Bossu, à Hoorn. Le motif doit être plus pitto-
resque en nature. M. Springer accumule de nombreux détails d'un égal fini, quels que soient
leurs plans, ce qui fait ressembler son aquarelle à- une grande photographie coloriée.