SEPTEMBRE !900
ALEXANDRE GOLOVtNE TOtLETTE EN j,FAÏENCE
EXÉCUTÉE PAR S. MAMONTOFF.
UN JEUNE
uand c'est d'artistes ou d'écrivains qu'il s'agit,
ce mot est vague. L'auteur de quarante ans
qu'on joue après trois lustres d'attente, le
musicien de cinquante dont les secondes mi-
neures grincent pour la première fois sous le
plafond de l'Opéra sont des jeunes. Jeune, le
peintre aux tempes grisonnantes, dont l'Etat
vient enfin d'acheter le tableau.
L'Etat! sa protection fait des miracles ici,
comme partout. L'Etat rend la jeunesse. Sa
première commande redonne trente ans aux
hommes de cinquante. Privilège admirable,
qu'il a le tort de ne réserver qu'au sexe mâle.
Et pourquoi pas aux femmes aussi? Mais cela
viendra. La «Sève juvénile» et l'«Eau de Ninon»
n'auront qu'à bien se tenir.
Le jeune dont il est ici question, et qui
n'est autre que Maurice Dufrêne, déjà connu
des lecteurs de cette revue, a cela de particulier,
d'être un jeune pour le bon. Un de ses
talents est d'avoir à peine vingt - quatre ans.
C'en est déjà un beau ; mais comme il est assez
répandu, parlons plutôt des autres.
Dufrêne est un délicat. Tout ce qu'il fait
est la distinction même ; la banalité, encore plus
la vulgarité fuient le papier sur lequel son crayon
se promène. Il n'est pas l'homme qui veut frapper
de grands coups à tout prix, le banquiste
préoccupé d'«épater» avant tout; s'il est moderne,
il a trop le sentiment du bon ton pour le
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ALEXANDRE GOLOVtNE TOtLETTE EN j,FAÏENCE
EXÉCUTÉE PAR S. MAMONTOFF.
UN JEUNE
uand c'est d'artistes ou d'écrivains qu'il s'agit,
ce mot est vague. L'auteur de quarante ans
qu'on joue après trois lustres d'attente, le
musicien de cinquante dont les secondes mi-
neures grincent pour la première fois sous le
plafond de l'Opéra sont des jeunes. Jeune, le
peintre aux tempes grisonnantes, dont l'Etat
vient enfin d'acheter le tableau.
L'Etat! sa protection fait des miracles ici,
comme partout. L'Etat rend la jeunesse. Sa
première commande redonne trente ans aux
hommes de cinquante. Privilège admirable,
qu'il a le tort de ne réserver qu'au sexe mâle.
Et pourquoi pas aux femmes aussi? Mais cela
viendra. La «Sève juvénile» et l'«Eau de Ninon»
n'auront qu'à bien se tenir.
Le jeune dont il est ici question, et qui
n'est autre que Maurice Dufrêne, déjà connu
des lecteurs de cette revue, a cela de particulier,
d'être un jeune pour le bon. Un de ses
talents est d'avoir à peine vingt - quatre ans.
C'en est déjà un beau ; mais comme il est assez
répandu, parlons plutôt des autres.
Dufrêne est un délicat. Tout ce qu'il fait
est la distinction même ; la banalité, encore plus
la vulgarité fuient le papier sur lequel son crayon
se promène. Il n'est pas l'homme qui veut frapper
de grands coups à tout prix, le banquiste
préoccupé d'«épater» avant tout; s'il est moderne,
il a trop le sentiment du bon ton pour le
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