DOI Heft:
No.39 (Décembre 1901)
DOI Artikel:Gerdeil, O.: Croquis d'intérieur
DOI Seite / Zitierlink: https://doi.org/10.11588/diglit.34268#0135
DECEMBRE 1901
CH. PLUMET ET TONY SELMERSHEIM BUFEET.ET. CHEMINÉE
néant de l'objet qu'il
faltait faire, c'est-à-
dire du meuble. Ii
est banal, insignifiant ;
mais comme l'image
d'une grappe frappe
davantage l'esprit vul-
gaire que le charme
qu'un heureux mo-
delé donne à la
forme, il ne manque
pas son effet... sur
ceux qui ne savent
pas mieux. Certes,
la sculpture peut
prendre une haute
signification décora-
tive dans le meuble
qui fait partie d'en-
sembles pompeux ;
mais, dans l'intérieur
des classes moyen-
nes, elle n'est, sauf
de rares points où
son emploi discret
peut prendre du
charme, qu'une spé-
culation sur l'infé-
riorité intellectuelle.
On y prend plaisir,
parce qu'on n'en
connaît pas de meil-
leurs — ou l'on fait
semblant d'y prendre
plaisir, parce qu'on
voit les autres en
faire autant. Voilà
comment, personne
ne voulant être en reste de « goûts artistiques ))
avec le voisin, une chose qui laisse presque
tout le monde indifférent au fond s'éternise.
Deux meubles de salle à manger de
MM. Charles Plumet et Tony Selmersheim, re-
produits ici, montrent que le meuble peut être
parfaitement exempt de sécheresse et satisfaire
aux nécessités de représentation sans recourir
aux artifices décoratifs. Quant aux croquis
d'intérieurs, les meubles font corps avec la
boiserie fixe dans deux des pièces représen-
tées, ils sont déplaçables dans les deux autres.
Dans tous, il est visible que la décoration (mal-
heureusement à peine indiquée sur plusieurs
des croquis) se porte exclusivement sur les
murs et que son contraste avec le caractère
purement architectural des meubles fait valoir
l'une par l'autre. Le revêtement mural est en-
tendu en cuir ou carton frappé dans la grande
salle à manger, en étoffe de reps décorée au
pochoir, serti de ganse appliquée à la méca-
nique dans la petite salle à manger ainsi que
dans le grand cabinet de toilette. Dans le coin
de salon, lés panneaux/séparés par des pi-
lastres, sont revêtus d'étoffe brodée.
Je ne voudrais pas introduire de considé-
rations chauvines dans un article de critique;
cependant, il n'est pas possible de ne pas faire
remarquer combien, abstraction faite même de
toute question de valeur esthétique, les meubles
de MM. Plumet et Tony Selmersheim répondent
exactement au sentiment français. Pourquoi,
109
n
CH. PLUMET ET TONY SELMERSHEIM BUFEET.ET. CHEMINÉE
néant de l'objet qu'il
faltait faire, c'est-à-
dire du meuble. Ii
est banal, insignifiant ;
mais comme l'image
d'une grappe frappe
davantage l'esprit vul-
gaire que le charme
qu'un heureux mo-
delé donne à la
forme, il ne manque
pas son effet... sur
ceux qui ne savent
pas mieux. Certes,
la sculpture peut
prendre une haute
signification décora-
tive dans le meuble
qui fait partie d'en-
sembles pompeux ;
mais, dans l'intérieur
des classes moyen-
nes, elle n'est, sauf
de rares points où
son emploi discret
peut prendre du
charme, qu'une spé-
culation sur l'infé-
riorité intellectuelle.
On y prend plaisir,
parce qu'on n'en
connaît pas de meil-
leurs — ou l'on fait
semblant d'y prendre
plaisir, parce qu'on
voit les autres en
faire autant. Voilà
comment, personne
ne voulant être en reste de « goûts artistiques ))
avec le voisin, une chose qui laisse presque
tout le monde indifférent au fond s'éternise.
Deux meubles de salle à manger de
MM. Charles Plumet et Tony Selmersheim, re-
produits ici, montrent que le meuble peut être
parfaitement exempt de sécheresse et satisfaire
aux nécessités de représentation sans recourir
aux artifices décoratifs. Quant aux croquis
d'intérieurs, les meubles font corps avec la
boiserie fixe dans deux des pièces représen-
tées, ils sont déplaçables dans les deux autres.
Dans tous, il est visible que la décoration (mal-
heureusement à peine indiquée sur plusieurs
des croquis) se porte exclusivement sur les
murs et que son contraste avec le caractère
purement architectural des meubles fait valoir
l'une par l'autre. Le revêtement mural est en-
tendu en cuir ou carton frappé dans la grande
salle à manger, en étoffe de reps décorée au
pochoir, serti de ganse appliquée à la méca-
nique dans la petite salle à manger ainsi que
dans le grand cabinet de toilette. Dans le coin
de salon, lés panneaux/séparés par des pi-
lastres, sont revêtus d'étoffe brodée.
Je ne voudrais pas introduire de considé-
rations chauvines dans un article de critique;
cependant, il n'est pas possible de ne pas faire
remarquer combien, abstraction faite même de
toute question de valeur esthétique, les meubles
de MM. Plumet et Tony Selmersheim répondent
exactement au sentiment français. Pourquoi,
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