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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 4,1.1901/​1902

DOI issue:
No.41 (Février 1902)
DOI article:
Mauclair, Camille: L' œuvre d'Auguste Renoir, 1
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.34268#0214

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L'ART DÉCORATIF


nière et le sentiment. La Z.og'e, ce chef-
d'œuvre qui, à l'Exposition de igoo, était la
merveille des salles impressionnistes, con-
dense toute l'élégance française d'il y a vingt-
cinq ans. Dans le De/euner d'ex Canotiers,
dans la scène de bal du Moulin de /a Galette,
la psychologie des types parisiens égale les
plus, saisissantes trouvailles expressives de
Manet. La -Ba/ztzzçoz're est aussi proche des
jolies choses du XVIII" siècle que les Fetes
Gu/antes de Verlaine, dont M. Renoir eut
peut-être fait une délicieuse illustration. Il y
a, en plus, comme dans Verlaine, le ragoût
du modernisme interprétant un siècle disparu,
mais la filiation est indéniable. Devant de
telles œuvres, comme devant le portrait de
Jeanne Vamazy en robe de bal, tout homme
sensitif qui aimera et comprendra le carac-
tère inimitable des mœurs, du goût et de
l'art de notre pays ne pourra se défendre
d'une sensation singulièrement captivante,
celle d'être chez lui, de-
vant l'œuvre d'un peintre
de sa race et de son sang.
Et la troisième ma-
nière de M. Renoir lui
est tout à fait person-
nelle. Il y expose un
coloris particulier M y
mêle ses deux autres fac-
tures. Il y concilie ses
hachures de tons dissociés,
et SM premières préfé-
rences pour la peinture
au couteau à palette. Il y
recherche des harmonies
presque discordantes. Il
joue des dissonnances
avec une subtilité versa-
tile. Il réalise d'étonnantes
«impressions fausseso. Il
affectionne les couleurs
craintes par les autres
peintres, semble prendre
pour thèmes les tapis du
Turkestan, et, abandon-
nant à la fois la stylisa-
tion M le réalisme, H
conçoit la peinture comme
une symphonie de tona-
lités rares. Des fleurs,
des têtes de jeunes filles,
lui sont des prétextes
FLEURS suffisants. Il s'amuse à

sa nature est trop capricieuse pour se disci-
pliner avec une seule technique. Tel paysage,
Foute Je Fpupect'ennex, se ressouvient de
Corot, et telle Ferme évoque Anton Mauve
avec un coloris impressionniste. La Femme
UH col.cussé s'apparente à Manet, tandis que
le portrait de .Sis/e;r pousse jusqu'au poin-
tillisme, que les néo-impressionnistes érige-
ront en système bien plus tard, le souci de
la vibratilité des touches sur cette figure ner-
veuse. La FVnsée évoque la façon de certaines
esquisses anglaises, notamment de Hoppner,
en y mêlant librement les hachures. Mais
dans toute cette vivace étude des techniques,
à laquelle M. Renoir s'adonne avec une verve
et une volonté surprenantes, toujours reparaît
l'invincible instinct français. La Jeune yï//e
nu panier est un Greuze peint par un im-
pressionniste. La délicieuse Jeune yi/te à /a
promennJe s'affilie un peu à Gainsborough,
mais essentiellement à Fragonard, par la ma-

A. RENOtR

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