SEPTEMBRE 1902
l'Ecole anglaise du XVIIH siècle. Le peintre
s'influençait sans doute plus des tendances
alors écloses chez ses modèles élégants que
du souvenir de Gainsborough et de Reynolds.
C'était l'époque où l'on revenait à ces styles,
et il était
amené à dé-
tacher sur de
telles pers-
pectives d'ap-
partements
les figures,
qui demeu-
raient mo-
dernes etbien
françaises.
C'en futpour-
tant assez
pour qu'on
déclarât M.
Blanche ob-
sédé par les
Anglais. Et
on ne man-
qua pas de
le déclarerdé-
routant et ca-
pricieux lors-
qu'on le vit,
l'année sui-
vante, renon-
cer à ces
essais pour
montrer sur
de sobres et
neutres gri-
sailles un
autre portrait
de sa mère,
des effigies
d'hommes, et
surtout le
beau, le pé-
nétrant portrait de Maurice Barrés, d'une
ressemblance alors si vraie, d'une si fine in-
tuition psychologique. Peut-être, si j'en crois
mes souvenirs, faut-il ajouter à cette même
année les portraits de M. Henri de Régnier
et de M. André Gide, celui-ci tout à fait re-
marquable autant par son étonnante perspi-
cacité que par son harmonie gris perle avivée
des roses d'une touffe d'hortensias.
En i8gq, avec le portrait de M. Pierre
Louys, celui de Barrés, à notre sens
moins heureusement, prétextait un retour aux
fonds distinctement stylisés, qui ne semblent
pas convenir au talent de M. Blanche. Il
n'est ni rêveur, ni suggestif, ni même élégant
malgré le sens généralement donné à ce cliché
sur lui: c'est
un observa-
teur direct
qui ne peint
bien que ce
qu'il voit et
tel qu'il le
voit.
En 18q6,
la /imL/Ze
ThuM/cw le
prouva bien.
Un morceau
de peinture
admirable-
ment vivant
apparut. Le
fond de ciel
orageux était
encore bien
un peu fac-
tice et ((tapis-
series, mais
encore s'ex-
pliquait-ilpar
la composi-
tion mon-
trant le ro-
buste peintre
norvégien
devant son
chevalet de
(( plein - ai-
riste )). Et
quelle vérité
intense, hne-
LA PETITE MANFRED ment diversi-
fiée selon les
êtres, soulignait la consanguinité en ces
enfants groupés autour du blond géant au
corps de Silène, assis, en manches de che-
mise, gilet et culotte de velours à côtes gris
beige, tandis que chantait clair le corsage
rouge brique d'une jeune hile debout der-
rière lui ! Et quelle jolie caractérisation des
tvpes Scandinaves, des cheveux de miel et
des teints roses, quel morceau séduisant que
celui de l'enfant à la peau de lumière ren-
versée sur les forts genoux du riche coloriste
22g
27
l'Ecole anglaise du XVIIH siècle. Le peintre
s'influençait sans doute plus des tendances
alors écloses chez ses modèles élégants que
du souvenir de Gainsborough et de Reynolds.
C'était l'époque où l'on revenait à ces styles,
et il était
amené à dé-
tacher sur de
telles pers-
pectives d'ap-
partements
les figures,
qui demeu-
raient mo-
dernes etbien
françaises.
C'en futpour-
tant assez
pour qu'on
déclarât M.
Blanche ob-
sédé par les
Anglais. Et
on ne man-
qua pas de
le déclarerdé-
routant et ca-
pricieux lors-
qu'on le vit,
l'année sui-
vante, renon-
cer à ces
essais pour
montrer sur
de sobres et
neutres gri-
sailles un
autre portrait
de sa mère,
des effigies
d'hommes, et
surtout le
beau, le pé-
nétrant portrait de Maurice Barrés, d'une
ressemblance alors si vraie, d'une si fine in-
tuition psychologique. Peut-être, si j'en crois
mes souvenirs, faut-il ajouter à cette même
année les portraits de M. Henri de Régnier
et de M. André Gide, celui-ci tout à fait re-
marquable autant par son étonnante perspi-
cacité que par son harmonie gris perle avivée
des roses d'une touffe d'hortensias.
En i8gq, avec le portrait de M. Pierre
Louys, celui de Barrés, à notre sens
moins heureusement, prétextait un retour aux
fonds distinctement stylisés, qui ne semblent
pas convenir au talent de M. Blanche. Il
n'est ni rêveur, ni suggestif, ni même élégant
malgré le sens généralement donné à ce cliché
sur lui: c'est
un observa-
teur direct
qui ne peint
bien que ce
qu'il voit et
tel qu'il le
voit.
En 18q6,
la /imL/Ze
ThuM/cw le
prouva bien.
Un morceau
de peinture
admirable-
ment vivant
apparut. Le
fond de ciel
orageux était
encore bien
un peu fac-
tice et ((tapis-
series, mais
encore s'ex-
pliquait-ilpar
la composi-
tion mon-
trant le ro-
buste peintre
norvégien
devant son
chevalet de
(( plein - ai-
riste )). Et
quelle vérité
intense, hne-
LA PETITE MANFRED ment diversi-
fiée selon les
êtres, soulignait la consanguinité en ces
enfants groupés autour du blond géant au
corps de Silène, assis, en manches de che-
mise, gilet et culotte de velours à côtes gris
beige, tandis que chantait clair le corsage
rouge brique d'une jeune hile debout der-
rière lui ! Et quelle jolie caractérisation des
tvpes Scandinaves, des cheveux de miel et
des teints roses, quel morceau séduisant que
celui de l'enfant à la peau de lumière ren-
versée sur les forts genoux du riche coloriste
22g
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