SEPTEMBRE 1002
G. ROMAGNOLI FONTAINE
vase. Aujourd'hui le modèle se surcharge ei
se complique ; des Aeurs ou des serpents
de verre viennent se poser sur les parois ;
les couleurs s'entremêlent. Il ne suAIt plus
de soufAer une forme harmonieuse; l'ouvrier
veut utiliser toutes les richesses de colo-
rations possibles, toutes les ressources des
pastilles et du Alage. Son travail entend riva-
liser avec celui du conhseur construisant ses
pièces montées.
Quelques hommes de bon sens, d'ini-
tiative et de goût sûr ont profondément senti
la voie de décadence où se précipitaient l'art
et l'industrie italienne, du moment que le
sentiment du beau se perdait pour faire place
à celui du curieux et du plaisant. Tandis
qu'il en était temps encore, ils ont voulu
entraver cette ruine de tout un noble passé,
de tout un patrimoine dont l'Europe entière
a fait son proht. C'est de ce sentiment de
honte et de révolte contre l'apathie générale
que sont nés, ces dernières années, en Italie
les efforts de renaissance sérieuse ; et c'est
dans la caricature. A quoi ont abouti les
meubles sculptés, d'une forme souple dans
leur richesse, qui avaient fait la renommée
de quelques ateliers vénitiens ? Ils sont
devenus ces bahuts ou ces fauteuils gri-
maçants et bossués, où se tordent des corps
étranges de gnomes et de chimères, et dont
il semble que M. Carabin veuille renouveler
chez nous une déplorable tentative. Ils ont
abouti encore à ces nègres porte-plateaux
ou à ces diables en habit rouge, destinés à
mettre dans les antichambres de fantaisistes
siihouettes. Dans les mains de ces artisans,
tout devient joujou ; l'esprit d'ingéniosité,
qui anime tout l'art authentique de la race,
ne serait plus avec eux que de la gageure
et de la plaisanterie.
Pareille aventure n'arrive-t-elle pas encore
dans un autre domaine de l'antique pro-
duction vénitienne? Les verriers de Murano
nous ont laissé des formes admirables, dont
tout le sentiment réside dans l'évasement du
calice, inspiré de Aeurs diverses, dans l'é-
lancement du pied, dans les légères cane-
lures qui donnent parfois du mouvement au L'ÆMiLiA ARS
ENCADREMENT DE PORTE
G. ROMAGNOLI FONTAINE
vase. Aujourd'hui le modèle se surcharge ei
se complique ; des Aeurs ou des serpents
de verre viennent se poser sur les parois ;
les couleurs s'entremêlent. Il ne suAIt plus
de soufAer une forme harmonieuse; l'ouvrier
veut utiliser toutes les richesses de colo-
rations possibles, toutes les ressources des
pastilles et du Alage. Son travail entend riva-
liser avec celui du conhseur construisant ses
pièces montées.
Quelques hommes de bon sens, d'ini-
tiative et de goût sûr ont profondément senti
la voie de décadence où se précipitaient l'art
et l'industrie italienne, du moment que le
sentiment du beau se perdait pour faire place
à celui du curieux et du plaisant. Tandis
qu'il en était temps encore, ils ont voulu
entraver cette ruine de tout un noble passé,
de tout un patrimoine dont l'Europe entière
a fait son proht. C'est de ce sentiment de
honte et de révolte contre l'apathie générale
que sont nés, ces dernières années, en Italie
les efforts de renaissance sérieuse ; et c'est
dans la caricature. A quoi ont abouti les
meubles sculptés, d'une forme souple dans
leur richesse, qui avaient fait la renommée
de quelques ateliers vénitiens ? Ils sont
devenus ces bahuts ou ces fauteuils gri-
maçants et bossués, où se tordent des corps
étranges de gnomes et de chimères, et dont
il semble que M. Carabin veuille renouveler
chez nous une déplorable tentative. Ils ont
abouti encore à ces nègres porte-plateaux
ou à ces diables en habit rouge, destinés à
mettre dans les antichambres de fantaisistes
siihouettes. Dans les mains de ces artisans,
tout devient joujou ; l'esprit d'ingéniosité,
qui anime tout l'art authentique de la race,
ne serait plus avec eux que de la gageure
et de la plaisanterie.
Pareille aventure n'arrive-t-elle pas encore
dans un autre domaine de l'antique pro-
duction vénitienne? Les verriers de Murano
nous ont laissé des formes admirables, dont
tout le sentiment réside dans l'évasement du
calice, inspiré de Aeurs diverses, dans l'é-
lancement du pied, dans les légères cane-
lures qui donnent parfois du mouvement au L'ÆMiLiA ARS
ENCADREMENT DE PORTE