L'ART DÉCORATIF
nély laisse au travers des chairs hltrer un
regard sceptique et rieur; cnhn M. Finot,
qui enfonce dans le présent des yeux malins,
piqués d'étonnement, conserve d'abord son
chapeau, puis l'enlève, ne sachant s'il doit
demeurer au spectacle ou s'il est temps de
le quitter. Les trois oeuvres sont d'une nou-
veauté pleine de charme, et par sa vision
malicieuse M. Lévy-Dhurmer se rattache ainsi
aux portraitistes du XVIIL siècle. Comme
Chardin, La Tour ou Saint-Aubin, il ne veut
pour certains qu'il eût fait cette gageure de
fermer les yeux aux banalités, aux laideurs,
aux disgrâces de la terre pour les ouvrir sur
un monde inconnu où les êtres seraient
beaux et les choses d'essence immortelle. Il
paraissait être allé vers des pays chimériques
d'où il rapportait des visions, des féeries et
des éblouissements. Et comme chez beaucoup
le goût des classifications passe avant la
passion de la vérité, ceux-ci octrovaient au
poète les droits qu'ils déniaient au peintre.
AeX — Musée du Luxembourg
pas être dupe, il brandit, ainsi qu'un scalpel,
son crayon ou son pastel; d'un trait il pé-
nètre les fronts, d'une ligne il fixe une
qualité de l'àme ou un don de l'esprit. Il
analyse et il résume. Et ce n'est pas une
banale aventure que de voir le peintre re-
nouer des liens avec l'art du grand siècle
par la seule magie de son art et de sa sin-
cérité.
Je me plais d'autant plus à noter ce
souci scrupuleux de la réalité que l'artiste
passa longtemps et uniquement pour un
merveilleux créateur de songes. Il semblait
Pourtant n'est-il pas absurde de prétendre
que seul le poète ait mission de décrire des
sentiments et de concevoir un idéal. Le
peintre, le musicien, le sculpteur ne peuvent-
ils pas aussi bien que lui, l'un au moven
des lignes et de la couleur, le second du
rythme et de l'harmonie, le dernier de la
matière et des proportions, s'élever au-dessus
des contingences, forcer les portes du réel
U faut seulement que les uns et les autres
subordonnent leur vision à leur art et ne se
servent pour l'atteindre que des moyens
dont celui-ci dispose. Combien de gens
33o
nély laisse au travers des chairs hltrer un
regard sceptique et rieur; cnhn M. Finot,
qui enfonce dans le présent des yeux malins,
piqués d'étonnement, conserve d'abord son
chapeau, puis l'enlève, ne sachant s'il doit
demeurer au spectacle ou s'il est temps de
le quitter. Les trois oeuvres sont d'une nou-
veauté pleine de charme, et par sa vision
malicieuse M. Lévy-Dhurmer se rattache ainsi
aux portraitistes du XVIIL siècle. Comme
Chardin, La Tour ou Saint-Aubin, il ne veut
pour certains qu'il eût fait cette gageure de
fermer les yeux aux banalités, aux laideurs,
aux disgrâces de la terre pour les ouvrir sur
un monde inconnu où les êtres seraient
beaux et les choses d'essence immortelle. Il
paraissait être allé vers des pays chimériques
d'où il rapportait des visions, des féeries et
des éblouissements. Et comme chez beaucoup
le goût des classifications passe avant la
passion de la vérité, ceux-ci octrovaient au
poète les droits qu'ils déniaient au peintre.
AeX — Musée du Luxembourg
pas être dupe, il brandit, ainsi qu'un scalpel,
son crayon ou son pastel; d'un trait il pé-
nètre les fronts, d'une ligne il fixe une
qualité de l'àme ou un don de l'esprit. Il
analyse et il résume. Et ce n'est pas une
banale aventure que de voir le peintre re-
nouer des liens avec l'art du grand siècle
par la seule magie de son art et de sa sin-
cérité.
Je me plais d'autant plus à noter ce
souci scrupuleux de la réalité que l'artiste
passa longtemps et uniquement pour un
merveilleux créateur de songes. Il semblait
Pourtant n'est-il pas absurde de prétendre
que seul le poète ait mission de décrire des
sentiments et de concevoir un idéal. Le
peintre, le musicien, le sculpteur ne peuvent-
ils pas aussi bien que lui, l'un au moven
des lignes et de la couleur, le second du
rythme et de l'harmonie, le dernier de la
matière et des proportions, s'élever au-dessus
des contingences, forcer les portes du réel
U faut seulement que les uns et les autres
subordonnent leur vision à leur art et ne se
servent pour l'atteindre que des moyens
dont celui-ci dispose. Combien de gens
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