DOI article:
Klingsor, Tristan: Les dessins de Paul Renouard au Musée de Luxembourg
DOI Page / Citation link: https://doi.org/10.11588/diglit.36674#0088
L'ART DECORATIF
lui convient le mieux c'est la pointe-sèche.
Nul moyen ne donne les mêmes finesses de
trait à côté des plus beaux noirs. Si dans
ses premières planches Rcnouard reste
timide et hésitant, on voit vite sa main plus
assurée à rayer et à creuser le cuivre. Il
garde dans cette manière la verdeur qu'on
trouve en ses croquis. Et chose assez inat-
tendue, à disposer ainsi vingt croquis diffe-
rents d'un meme modèle sur une seule
planche, il fait prendre à celle-ci un aspect
en quelque sorte décoratif. Scs coqs en
train de se battre m'en paraissent un des
exemples les plus significatifs.
Renouard a réuni ces planches dans un
album de Cez-fM, Afozme77?e7z?.y,
Toutes sont des planches originales, sauf
une vingtaine de têtes d'expressions gravées
au burin par Florian, avec une délicatesse
qui rend excellemment le charme du crayon
du dessinateur, charme léger qui n'est pas
sans faire songer parfois à Toulouse-Lau-
trec. Car Rcnouard, dessinateur méthodique
et patient à ses débuts, atteint dans ses plus
récentes pages à l'intensité de cet excep-
tionnel artiste. Comme lui, il arrive à une
simplification extrême des moyens d'expli-
quer les formes sans cesser pour cela de
les expliquer parfaitement. C'est en quoi,
de même que Toulouse-Lautrec, il se rap-
proche un peu de la méthode des Japo-
nais, de la méthode seulement, non de la
manière. Et peut-être même allons-nous par
Renouard rendre aux Japonais un peu de ce
que nous leur devons. Leur influence n'a
pas été sans rajeunir notre art occidental
prêt de s'anémier; la nôtre sera susceptible
à son tour de rajeunir le leur. M. Tada-
masa Hayashi a en effet acquis en 1894
toute une collection de dessins et d'eaux-
fortes de Renouard, pour les donner à un
musée de Tokio. Les artistes du pays
d'Hokousaï n'essaieront pas, je l'espère,
d'en faire des pastiches, mais ils y pourront
trouver cet éternel exemple du rajeunisse-
ment de l'art par l'observation de la vie.
60
lui convient le mieux c'est la pointe-sèche.
Nul moyen ne donne les mêmes finesses de
trait à côté des plus beaux noirs. Si dans
ses premières planches Rcnouard reste
timide et hésitant, on voit vite sa main plus
assurée à rayer et à creuser le cuivre. Il
garde dans cette manière la verdeur qu'on
trouve en ses croquis. Et chose assez inat-
tendue, à disposer ainsi vingt croquis diffe-
rents d'un meme modèle sur une seule
planche, il fait prendre à celle-ci un aspect
en quelque sorte décoratif. Scs coqs en
train de se battre m'en paraissent un des
exemples les plus significatifs.
Renouard a réuni ces planches dans un
album de Cez-fM, Afozme77?e7z?.y,
Toutes sont des planches originales, sauf
une vingtaine de têtes d'expressions gravées
au burin par Florian, avec une délicatesse
qui rend excellemment le charme du crayon
du dessinateur, charme léger qui n'est pas
sans faire songer parfois à Toulouse-Lau-
trec. Car Rcnouard, dessinateur méthodique
et patient à ses débuts, atteint dans ses plus
récentes pages à l'intensité de cet excep-
tionnel artiste. Comme lui, il arrive à une
simplification extrême des moyens d'expli-
quer les formes sans cesser pour cela de
les expliquer parfaitement. C'est en quoi,
de même que Toulouse-Lautrec, il se rap-
proche un peu de la méthode des Japo-
nais, de la méthode seulement, non de la
manière. Et peut-être même allons-nous par
Renouard rendre aux Japonais un peu de ce
que nous leur devons. Leur influence n'a
pas été sans rajeunir notre art occidental
prêt de s'anémier; la nôtre sera susceptible
à son tour de rajeunir le leur. M. Tada-
masa Hayashi a en effet acquis en 1894
toute une collection de dessins et d'eaux-
fortes de Renouard, pour les donner à un
musée de Tokio. Les artistes du pays
d'Hokousaï n'essaieront pas, je l'espère,
d'en faire des pastiches, mais ils y pourront
trouver cet éternel exemple du rajeunisse-
ment de l'art par l'observation de la vie.
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