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L’ART FRANÇAIS

ménagères, des enfants, qui stationnent à la porte d’une bouche-
rie. Sur le seuil, un vieux garde national examine le papier
qu’une des femmes vient de lui remettre, c’est le bon en vertu
duquel la pétitionnaire recevra tout-à-l’heure quelques grammes
de viande de cheval.

Le projet de M. Arus est visiblement inférieur à, ceux-là et
nous croyons que la lutte se circonscrira entre MM. Adolphe
Binet, Dupray et Gilbert et Paul Delance.

L’OLYMPIA DE MANET

Le célèbre .tableau-de Manet, « Olympia », qui occupait une place
d’honneur à l’Exposition centennale de l’art français en 1889, après avoir
figuré au Salon de 1865 où il souleva de violentes polémiques, vient d’être
acquis par un groupe d’amis des arts et offert à l’Etat.

M. Claude Monet, qui a pris l’initiative de cette manifestation, a écrit
à ce sujet, la lettre suivante à M. le ministre de l’Instruction publique et des
Beaux-Arts :

Paris, le 7 février 1890.

Monsieur le ministre,

Au nom d’un groupe de souscripteurs, j’ai l’honneur d'offrir à l’État Y Olympia,
d’Édouard Manet. Nous sommes certains d’étre ici les représentants et les interprètes
d’un grand nombre dlartistes, d’écrivains et d’amateurs, qui ont reconnu depuis long-
temps déjà quelle place considérable doit tenir dans l’histoire de ce siècle le peintre
prématurément enlevé à son art et à son pays.

Les discussions auxquelles les tableaux de Manet ont servi de sujet, les hostilités
qu’ils eurent à subir sont maintenant apaisées. La guerre serait encore ouverte contre
une telle individualité que nous n’en serions pas moins convaincus de l’importance de
l’œuvre de Manet et de son triomphe définitif. Il nous suffirait de nous rappeler, pour
ne citer que quelques noms, autrefois décriés et repoussés, et aujourd’hui célèbres, ce
qui est advenu à des artistes comme Delacroix, Corot, Courbet, Millet, l’isolement de
leurs débuts et leur incontestable gloire posthume.. Mais de l’aveu de la grande majo-
rité de ceux qui s'intéressent à la peinture française, le rôle d’Édouard Manet a été utile
et décisif. Non seulement il a joué un grand rôle individuel, mais il a été, de plus,
le représentant d’une grande et féconde évolution.

Il nous a donc paru impossible qu’une telle œuvre 11’eût pas sa place dans nos col-
lections nationales, que le maître n’eût pas ses entrées là où sont déjà admis les dis-
ciples. Nous avons, de plus, considéré avec inquiétude le mouvement incessant du
marché artistique, la concurrence d’achat qui nous est faite par l’Amérique, le départ,
facile à prévoir, pour un autre continent, de tant d’œuvres d’art qui sont la joie et la
gloire de la France. Nous avons voulu retenir une des toiles les plus caractéristiques
d’Édouard Manet, celle où il apparaît en pleine lutte victorieuse, maître de sa vision et
de son métier.

C’est Y Olympia que nous remettons entre vos mains, monsieur le ministre. Notre
désir est de la voir prendre place au Louvre, à sa date, parmi les productions de l'école
française. Si lès règlements s’opposent à cette entrée immédiate, s’il est objecté, malgré
le précédent de Courbet, qu’une période de dix ans n’est pas écoulée depuis la mort de
Manet, nous estimons que le musée du Luxembourg est tout indiqué poùr recevoir
YOlympia et la garder jusqu’à l’échéance prochaine. Nous espérons que vous voudrez
bien donner votre appui à l’œuvre à laquelle nous nous sommes attachés avec la satis-
faction d’avoir accompli simplement un acte de justice.

Agréez, etc. Claude Monet.

Voici maintenant la liste des donateurs :

Bracquemond, Philippe Burty, Albert Besnard, Maurice Bouchor, Félix Bouchor,
de Bellio, Jean Béraud Bérend, Marcel Bernstein, Bing, Léon Béclard, Edmond Bazire,
Jacques Blanche, Boldini, Blot, Bourdin.

Cazin, Eugène Carrière, Jules Chéret, Emmanuel Chabrier, Clapîsson, Gustave
Caillebotte, Carriès.

Degas, Desboutins, Dalou, Carolus Duran, Duez, Durand-Ruel, Dauphin, Armand
Dayot, Jean Dolent, Théodore Duret.

Fantin-Latour, Auguste Flameng.

Guérard, Mrac Guérard-Gonzalès, Paul Gallimard, Gervex, Guillemet, Gustave
Geffroy.

J.-K. Huysmans, Maurice Hamel, Harrisson, Heileu.

Jeanniot, Franck-Jourdain.

Lhermitte, Lerolle, M. et M",e Leclanc’né.

Stéphane Mallarmé, Octave Mirbeau, Roger Marx, Moreau-Nélaton, Alexandre
Millerand, Claude Monet.

Oppenheim.

Puvis de Chavannes, Antonin Proust, Camille Pelletan, Camille Pissarro, Portier,
Georges Petit.

Rodin, Th. Ribot, Renoir, J.-F. Raffaëlli, Ary Renan, Roll, Robin, H. Rouart,
l-'élicien Rop$.

J. Sargent, Mme de Scey-Montbéliard.

Thornley.

De Vuillefroy, Van Cutsem.

Anonyme, Double Incognito, A. H., H. H., L. N., R. G.

Ajoutons que ce n’est nullement, comme on l’avait prétendu, la préoccu-
pation de venir en aide à Mme Manet qui a décidé de l’achat de« l’Olympia. »
Le tableau était presque vendu lorsque M. Claude Monet et ses amis inter-
vinrent. Voici exactement comment les choses se seraient passées : Claude

MÊmct se trouvait avec les peintres Heileu et John Sargent, lorsque ce der-
nier annonça qu’il avait décidé un de ses compatriotes américains à acheter
«l’Olympia». En donnant cette nouvelle, M. Sargent ne pouvait s’empêcher
de regretter qu'un tableau, qui faisait partie de l’histoire de la peinture fran-
çaise au dix-neuvième siècle, fût ainsi exilé.

L’idee vint alors aux amis de Manet d’empêcher ce départ. Ils convinrent
de former un syndicat de vingt personnes qui donneraient chacune un billet
de mille francs et achèteraient « l’Olympia » pour l’offrir à l’Etat. Ce fut
1 idée première. Puis, à la réflexion, M. Monet tint à associer à son oeuvre
des amis et des admirateurs d’Edouard Manet, auxquels il était impossible de
souscrire une aussi grosse somme. De plus, certains qui entendirent parler
de la souscription vinrent spontanément offrir leur concours à l’initiateur.
C’est ainsi que fut formée cette liste de quatre-vingt-deux noms, que nous
publions plus haut à la suite de la lettre de M. Claude Monet, remise derniè-
rement par lui et par M. Camille Pelletan entre les mains du ministre des
Beaux-Arts.

M. Monet a ajouté qu’il considérait l’affaire comme terminée. Le ministre,
a-t-il dit, a maintenant entre les mains la liste des donateurs ; il va soumettre
aux conservateurs du Louvre le tableau de Manet, et il communiquera les
raisons qui nous ont déterminés à l’acquisition.

On dit partout que le Louvre refusera, comme on disait depuis quinze
jours que nous offrions le tableau au Louvre, alors que l’on n’en savait rien
et que nous voulions, l’évènement l’a prouvé, l’offrir purement et simplement
a l’Etat. En tout cas, si le Louvre refuse pour la raison des dix ans non
encore révolus depuis la mort de Manet et malgré ce qui a été fait pour
Courbet, reste le Luxembourg.

Il serait extraordinaire que tous ceux qui ont profité de Manet fussent
admis dans les collections nationales et que le peintre original fût consigné
à la porte. C’est un tort de croire que nous avons choisi « l’Olympia » pour
son passé batailleur. Nous l’avons choisie parce que c’est un chef-d’œuvre
de peinture et parce que c’est une peinture très caractéristique de Manet.

Enfin, voici les noms des membres du comité consultatif des musées, à qui
M. le ministre de l’ihstruction publique va soumettre la question de l’accep-
tation « d'Olympia ».

Ce comité comprend les conservateurs et les conservateurs-adjoints des
musées du Louvre, du Luxembourg, de Saint Germain et de Versailles, sous
la présidence du directeur des musées nationaux.

Il se compose donc de :

MM. Kaempfen, directeur des musées nationaux, président ; Lafenestre,
conservateur du département de la peinture et des dessins au musée du
Louvre ; Paul Durrieu et Henry de Chennevières, conservateurs-adjoints ;
AragoJConservateur du musée du Luxembourg, Gosselin, conservateur du
musée de Versailles ; Bertrand, conservateur du musée de Saint-Germain.

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SOCIÉTÉ NATIONALE DES BEAUX-ARTS

La Société nationale des Beaux-Arts a tenu mardi soir, chez Ledoyen, une
assemblée générale, sous la présidence de M. Meissonier.

Soixante-quinze sociétaires —- sur cent dix-neuf — assistaient à cette
séance, qui ne s’est terminée qu’à minuit.

Les statuts de la Société et le règlement de l'exposition ont été lus et
et adoptés à l’unanimité.

On a nommé ensuite un comité de trente menbres qui devra, pendant trois
ans. préparer et arrêter le règlement des expositions, fixer l’ordre du jour des
assemblées générales et, en outre, gérer les affaires de la société. Ce comité
est ainsi composé :

MM. Meissonier, Puvis de Chavannes, Carolus-Duran, Bracquemond,
Dalou, Roll, Cazin, Gervex, Duez, Dagnan-Bouveret, Besnard, Rodin, J. Bé-
raud, Rixens, Waltner, Billotte, Montenard, Lhermitte, Damoye, Bamu,
Courtois, Carrière, Boilvin, Renouard, Ribot, Guignard, Lerolle, Desboi
Friant, Mathey.

bix membres d’honneur ont été nommés : MM. Waldeck-Rousseau, Devès,
Mav, Eynard, DiouvilLe et Thierry-Delanoue. I.es trois premiers auront voix
consultative dans le comité, MM. Desbois, Friant et Mathey n’ayant été
nommés qu’à titre de membres supplémentaires.

Avant de se séparer, l’assembiée a encore ap prouvé le choix fait par le
comité, pour la charge de secrétaire-administrateur de la société, de M. Du-
rand-Taillez, secrétaire de la rédaction de la revue « Art et Critique ».

Le Gérant : SILVESTRE

Paris. — Glyptoçraphie SILVESTRE 4 Cie, rue Oberkampf, 97.
 
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