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L' art ornemental: revue hebdomadaire illustrée — 2.1884

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Nr. 82 (23 Août 1884)
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https://doi.org/10.11588/diglit.19486#0122

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u8

L'ART ORNEMENTAL.

EXPLICATION DES PLANCHES

Fontaine en stuc, par Alessandro Vittoria. (Villa Barbare)

La fondation de la villa Barbaro remonte à l'année 1565 ; elle a été
ordonnée par Marco-Antonio Barbaro, chevalier procurateur, ancien ambas-
sadeur de la Sérénissime République auprès du roi de France, et ambassadeur
à Constantinople. Daniel Barbaro, son frère, ambassadeur de la République
en Angleterre, et qui mourut patriarche d'Aquilée, en surveilla l'exécution,
confiée, pour l'architecture au Palladio, pour la décoration à fresque au
Véronèse, et pour la sculpture à Alessandro Vittoria, le grand sculpteur de
Saint-Zacharias.

La villa, dit M. Charles Yriarte, dans une notice qu'il lui consacre,
s'élève au pied des premiers contreforts des Alpes Juliennes, dans la pro-
vince de Trévise, dans un petit bourg appelé Masère, près d'Asolo. Les
habitants de la province la désignent souvent sous le nom de villa Masère,

lonnement à l'autre, les chapiteaux sont reliés par des guirlandes de fruits
sculptés en ronde bosse.

Quelque cent mètres avant d'arriver au temple, sur la droite et faisant
rond-point sur la route même, s'élève une fontaine.monumentale à large
vasque, surmontée d'une statue très mouvementée, dans le goût de celles
de Jean de Bologne.

Le Palladio a choisi pour asseoir sa villa un terrain légèrement incliné,
un fond de collines boisées sur lesquelles la blanche architecture des fron-
tons prend toute sa valeur. Il a fait hardiment tailler la colline jusqu'à la
hauteur à laquelle devait arriver son premier étage. Un avant-corps d'une
proportion grandiose fait au centre une large saillie ; sur un arrière-plan,
à droite et à gauche, un grand portique à larges arcades vient buter à
chaque extrémité contre un pavillon qui ferme les lignes. La partie
centrale affecte la forme d'un temple d'ordre ionique et rappelle \& Fortune
virile, type cher au Palladio. Dans le fronton, le Vittoria a modelé en stuc
deux figures agenouillées, d'une grande tournure, qui portent l'écusson dé
la famille entouré de rinceaux. L'aigle à deux têtes rappelle le patriarcat
d'Aquilée, apanage du frère aîné du patricien.

Le rez-de-chaussée n'a pas reçu de décoration et rien de monumental
ne sollicite l'attention du visiteur; mais dès qu'on arrive à l'étage noble,
on est frappé de la grandeur du parti pris. Le plan de la villa affecte la

d'autres l'appellent encore villa Manin, parce qu'elle passa de la famille
Barbaro dans celle de Lodovico Manin, le dernier doge de Venise.

Quoique trois des plus grands artistes de Venise, ainsi que nous l'avons
déjà dit, se soient réunis pour élever et orner cette demeure, la plupart
des Vénitiens eux-mêmes en ignoraient l'existence il y a peu de temps
encore.

On entre dans le village de Masère par une route large et monumentale,
ornée de distance en distance de piédestaux, de pierres d'attente, posées
comme des prémices d'architecture qui, longtemps à l'avance, annoncent
une habitation construite par un grand artiste et un grand personnage. Le
caractère général de la résidence est un caractère rustique; ce n'est pas
pompeux, mais simplement décent et noble de lignes. Le Palladio a fran-
chement abordé dans sa façade l'expression des services divers et n'a pas
songé à les dissimuler comme on le fait trop souvent de nos jours. La villa
s'élève sur la gauche de la route ; avant d'y arriver, on voit se découper
sur le ciel un petit temple de forme antique, surmonté de dômes et de clo-
chetons. Le portique, par ses proportions, rappelle celui du temple de
Vesta, mais, par une fantaisie qui dénonce la Renaissance, d'un entreco-

forme d'une croix dont le bras principal tout entier n'est qu'une immense
galerie dont la perspective n'est coupée par aucun appendice, ni même par
des colonnes ou pilastres de haut-relief. La seule décoration de la galerie
consiste en huit figures allégoriques garnissant des niches simulées et
peintes dans la gamme blonde de Véronèse.

Les peintures à fresque de la villa des Patriciens sont une des plus
hautes manifestations du maître incomparable auquel elles sont dues. Le
Jugement de Paris, la Mère des Amours, Apollon et Vénus, Cérès et Plutus
constituent un ensemble décoratif des plus remarquables que nous aurions
voulu reproduire tout entier. Mais nous sommes obligé de nous restreindre
à l'œuvre capitale dont nous donnons le spécimen bien imparfait à notre
troisième page. Elle décore une voûte qui affecte la forme dite anse de panier.
Le centre est occupé par un beau motif-milieu en plafond octogone, repré-
sentant l'Olympe encadré dans tout un système d'architecture qui repose sur
des colonnes torses reliées à leur base par un balcon courant tout autour de
la salle. Des panneaux ménagés entre ces doubles entablements sont ornés
de petites figures allégoriques exécutées en grisailles et en camaïeux. Aux
angles, les quatre éléments sont logés dans les retombées. Accoudés aux
balcons de cette galerie supérieure, des personnages vivants circulent et
se jouent, faisant des épisodes réels qui produisent le plus singulier
contraste avec les épiques figures qui reposent majestueusement sur les

Fontaine en stuc, par Alessandro Vittoria.
(Jardin de la villa Barbaro.)
 
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