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L' art ornemental: revue hebdomadaire illustrée — 2.1884

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Nr. 87 (27 Septembre 1884)
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https://doi.org/10.11588/diglit.19486#0142

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L'ART ORNEMENTAL.

pour inspirateur l'évêque Jean de Heinsberg, pour protecteur et conseil l'ar-
chidiacre Nicolas de Cusa. Ce sont là de simples hypothèses qui auraient

Avec les Conrade la de'coration change d'aspect, bien que les formes
soient toujours, pour la plupart, celles de l'Italie du xvi° siècle : c'est le

besoin d'être appuyées de quelques preuves. camaïeu bleu, quelquefois rehaussé de manganèse,

Contentons-nous donc d'admirer ces belles tapis
séries sans leur assigner d'origine précise.

Faïence émaillée. (Fabrique de Nevers.)

Ce grand plat rond appartient au Musée de
Sèvres. Il est recouvert d'un émail bleu foncé dit
de Perse : le décor est peint en blanc à la manière
des émaux limousins : au centre, un vase rempli
de fleurs dans lesquelles se jouent des oiseaux,
et, sur le bord, un décor analogue. Le diamètre
de ce plat est de om,587.

Ce n'est qu'au commencement du xvii0 siècle,
dit M. Garnier (1608) que nous trouvons la pre-
mière mention positive d'une fabrique française
un peu importante établie à Nevers, rue Saint-
Genest, 12, celle des frères Conrade, transfuges des
manufactures de Savone, petite ville de la côte
de Gênes renommée pour ses faïences.

Avant cette époque cependant, il avait existé
une autre fabrique sur laquelle les documents
historiques font défaut, mais dont les œuvres
assez rares sont connues et ont pris place dans
nos musées ; cette fabrique devait être dirigée par
Scipion Gambier, pothier, dont on trouve le nom
sur les registres des baptêmes de plusieurs églises
de Nevers, où il figure comme parrain en 1592.
Ce Gambier, appelé sans doute en France par
Louis de Gonzague, parent de Catherine de Mé-
dicis, devenu duc de Nivernais en 1565 par son
mariage avec Henriette de Clèvcs, fille aînée du
dernier duc de Nevers, était bien évidemment
parent de Julien Gambier, originaire de Faenza,
auquel Henri III avait concédé en 1574 l'autorisa-
tion d'établir une fabrique à Lyon. Ainsi s'expli-
querait le style exclusivement italien des premières
faïences fabriquées à Nevers.

Tout en effet, dans ces faïences, les formes, le
décor et l'exécution, rappelle les majoliques de la
décadence d'Urbino et de Faenza ; la couleur seule
en est moins intense, mais cela tient à la suppres-
sion de la couverte avec laquelle les artistes ita-
liens glaçaient leurs peintures, et qui, ainsi que
nous l'avons dit, permettait l'emploi de couleurs •
beaucoup plus variées et d'un ton bien plus franc.
Les sujets, dessinés au violet de manganèse, repré-
sentent toujours, comme dans les faïences ita-
liennes, des scènes mythologiques, des allégories
ou des faits puisés dans l'histoire romaine et dans
l'Ancien Testament; les ornements, inspirés de
l'antique ainsi que presque tous ceux de l'art
italien du xvic siècle, se détachent en jaune sur
un fond bleu. Quoique d'un art relativement infé-
rieur, ces faïences, surtout celles de la première
période, sont assez remarquables comme exécu-
tion; on y sent l'influence et comme un reflet des
artistes italiens de la belle époque. Cette fabrica-
tion paraît avoir cessé avec les Conrade, qui
apportaient de Savone le genre tout à fait nou-
veau du décor en camaïeu bleu; on rencontre
cependant encore dans le milieu du xvic siècle
quelques rares pièces ayant la prétention de conti-
nuer la tradition du décor plein à personnages ;
mais le dessin en est tellement barbare, la colora-

mm-

qui domine dans la décoration dont les motifs,
empruntés aux porcelaines orientales qui com-
mençaient à se répandre en Europe à mesure que
les relations commerciales devenaient plus faciles
avec la Chine et le Japon, sont un peu jetés au
hasard, sans parti pris de décoration et sans aucun
ensemble.

Dominique Conrade, qui paraît avoir été le
fondateur de la fabrique, et qui avait reçu des
lettres de naturalisation à la fin du xvic siècle, eut
pour fils et successeur Antoine Conrade, auquel,
pendant la minorité de Louis XIV, fut accordé un
brevet de faïencier de la maison du roy, « estant
bien informé de son industrie et grande son expé-
rience à faire toutes sortes de vaisseaux en faïence,
quelle science rare et particulière estoit réservée
secrètement de père en fils en la maison de Domi-
nique Conrade ». Celui-ci eut à son tour pour suc-
cesseur un autre Dominique Conrade, que l'on voit
encore en 1672 « maistre faïencier ordinaire de
Sa Majesté ».

Les Conrade ne conservèrent pas longtemps
le privilège exclusif de la fabrication de la faïence;
d'autres potiers établirent bientôt des manufac-
tures rivales, et dès i63z il existait déjà quatre
fabriques, dont une fondée par Pierre Custode,
chef d'une famille de potiers qui occupe dans
l'histoire de l'industrie nivernaise une place au
moins aussi importante que celle des Conrade.

C'est à cette époque, et vraisemblablement
dans la manufacture de Custode, à l'enseigne de
l'Autruche, que furent fabriquées ces belles faïences
à fond bleu de Perse, décorées en blanc fixe par-
fois rehaussé de jaune, d'arabesques élégantes, de
fleurs, d'animaux, dont notre plat est un des spéci-
mens les plus complets. La perfection de ces
objets en fit pendant très longtemps méconnaître
l'origine. Brongniart les mentionne dans son
Traité des arts céramiques comme étant d'origine
orientale, et les premières faïences de ce genre qui
entrèrent au Musée de Sèvres y furent portées au
registre d'inscription comme étant de fabrication
persane. On faisait, en ce genre, non seulement
de charmantes petites pièces, mais aussi de grands
vases décoratifs et de grands plats comme celui
que représente notre gravure.

A partir du commencement du xvmc siècle,
les statuettes de saints et de saintes qui, sous
l'influence italienne, avaient conservé encore un
semblant d'art, devinrent pour la plupart des
figures grotesques; on fit surtout, et par milliers,
des assiettes grossièrement enluminées et portant
toujours, avec des dates, la figure du saint patron
et le nom de la personne à laquelle on les desti-
nait. On fabriqua en grand nombre des gourdes,
des plats ornés de sujets, d'attributs ayant rap-
port à la profession de celui auquel ils étaient
destinés, et principalement des saladiers ornés de
scènes populaires, souvent grivoises jusqu'à la
licence, copiées sur des images communes et
accompagnées d'inscriptions d'un goût douteux et
d'une orthographe de fantaisie. Cette fabrication
avait pris une telle extension, et le commerce qui

tion si terne et si éloignée de celle des faïences de Mars. — Panneau de tapisserie d'Àudran. s'en faisait par les bateliers de la Loire était de-

la première époque, qu'il faut voir là évidemment venu si considérable qu'un Nivernais, Pierre de

Frasnay, auteur d'un poème sur la fayence, publié dans le Mercure de

des œuvres isolées de quelques maladroits ou prétentieux élèves, plutôt que
les produits d'une fabrication courante.

France de juillet i/35, pouvait déjà, dans un accès de lyrisme patriotique,
 
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