REMBRANDT
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de cacique; des arceaux qui n’appartiennent à aucun style sont ornés de rubans de pierre; la courbe qui
allait décrire un plein cintre vise tout à coup à l’ogive. Quelquefois, par une audace inverse, les
fenêtres rectangulaires du style grec se trouvent encadrées entre deux pilastres gothiques, ou bien des
colonnettes du moyen âge sont brusquement interrompues par des saillies de l’ordre toscan. C’était, je crois,
la dernière injure que Rembrandt put faire à l’architecture antique, que de l’admettre parfois dans ses
tableaux.
Quelques auteurs ont pensé que Rembrandt avait fait un voyage à Venise. De Piles l’a même affirmé
LES TROIS ARBRES.
d’après certaines planches où l’on a cru voir gravé : Rembrandt Venetiis, 1635. On peut, en effet, lire ces
mots griffonnés sur trois têtes orientales, coiffées de turbans et couvertes de fourrures; mais si ce n’est
pas là une ruse d’avare, si Rembrandt a fait à Venise un voyage, dont il ne reste aujourd’hui d’autre trace
que ces trois estampes, l’illustre peintre n’a pas séjourné longtemps dans la patrie des coloristes, puisqu’au dire
du chevalier de Claussin1, qui a connu toutes les pièces de l’œuvre, la mention Venetiis se trouve sur les
trois pièces, à cette seule et même date de 1635. Quoi qu’il en soit, ce n’est pas des Vénitiens que Rembrandt
a pu emprunter son style si personnel, si fortement marqué à l’empreinte d’un génie primesautier, si recon-
' Catalogue raisonné des estampes qui composent T œuvre de Rembrandt. Paris, 1824. Cet ouvrage n’est qu’une édition
refondue et augmentée des Catalogues de Gersaint et de Bartsch.
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de cacique; des arceaux qui n’appartiennent à aucun style sont ornés de rubans de pierre; la courbe qui
allait décrire un plein cintre vise tout à coup à l’ogive. Quelquefois, par une audace inverse, les
fenêtres rectangulaires du style grec se trouvent encadrées entre deux pilastres gothiques, ou bien des
colonnettes du moyen âge sont brusquement interrompues par des saillies de l’ordre toscan. C’était, je crois,
la dernière injure que Rembrandt put faire à l’architecture antique, que de l’admettre parfois dans ses
tableaux.
Quelques auteurs ont pensé que Rembrandt avait fait un voyage à Venise. De Piles l’a même affirmé
LES TROIS ARBRES.
d’après certaines planches où l’on a cru voir gravé : Rembrandt Venetiis, 1635. On peut, en effet, lire ces
mots griffonnés sur trois têtes orientales, coiffées de turbans et couvertes de fourrures; mais si ce n’est
pas là une ruse d’avare, si Rembrandt a fait à Venise un voyage, dont il ne reste aujourd’hui d’autre trace
que ces trois estampes, l’illustre peintre n’a pas séjourné longtemps dans la patrie des coloristes, puisqu’au dire
du chevalier de Claussin1, qui a connu toutes les pièces de l’œuvre, la mention Venetiis se trouve sur les
trois pièces, à cette seule et même date de 1635. Quoi qu’il en soit, ce n’est pas des Vénitiens que Rembrandt
a pu emprunter son style si personnel, si fortement marqué à l’empreinte d’un génie primesautier, si recon-
' Catalogue raisonné des estampes qui composent T œuvre de Rembrandt. Paris, 1824. Cet ouvrage n’est qu’une édition
refondue et augmentée des Catalogues de Gersaint et de Bartsch.