Blanc, Charles: Histoire des peintres de toutes les écoles: École Vénitienne (Paris: Renouard, 1868)

ALESSANDRO VAROTAR1

dit IL PADOVANINO or LE PADOUAN
NÉ EN 1590; MORT EN 1650


A côté des grands peintres, quand ils ont un génie robuste
et viril, il y a ordinairement quelque imitateur qui est leur
second, mais qui les imite et les reproduit par le côté tendre,
féminin et gracieux. Alessandro Varotari a été un exemple de
ce phénomène assez fréquent dans l’histoire des arts. On peut
le regarder comme un Titien du sexe féminin.
Titien fut en effet la première admiration et le premier modèle
de Varotari, car celui-ci, orphelin dès l’âge de six ans, ne put
apprendre la peinture de son père, Dario Varotari, artiste
véronais, qui était, comme tant d’autres, architecte en même
temps que peintre1. Suivant Ridolfi, Dario descendait de la
famille patricienne et catholique des Varioter de Strasbourg, qui,
se voyant persécutés par les luthériens, dès le commencement
du protestantisme, abandonnèrent leur pays et se réfugièrent
en Italie, où ils choisirent pour résidence la ville de Vérone. C’est
à Vérone que Dario Varotari était né et qu’il avait reçu les leçons
de Paul Véronèse; mais lorsque ce grand maître alla se fixer à

Venise, Dario, qui était valétudinaire, alla lui-même s’établir à Padoue, cherchant un climat favorable à

1 M. Villot, dans sa première Notice des Tableaux du Louvre, avait dit avec raison, à l’article du Padovanino : « Son père,
Dario Varotari, peintre et architecte, étant mort en 1596, lorsqu’il n’avait encore que six ans, ne put lui enseigner les éléments
de la peinture. » M. Mundler, dans son Analyse critique de la Notice des tableaux italiens, fit observer que presque tous les
historiens disaient le contraire, notamment Zanetti, qui, dans la Pittura veneziana, appelle expressément Dario Varotari