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La chronique des arts et de la curiosité — 1883

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Nr. 30 (29 Septembre)
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https://doi.org/10.11588/diglit.17399#0251
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N° ?.0

— 1883.

BUREAUX, 8, RUE FAVART.

29 Septembre

LA

CHRONIQUE DES ARTS

ET DE LA CURIOSITÉ

SUPPLÉMENT A LA GAZETTE DES BEAUX-ARTS

PARAISSANT LE SAMEDI MATIN

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la Chronique des Arts et do la Curiosité.

PARIS ET DÉPARTEMENTS :

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LA CONSERVATION DES PEINTURES
au Louvre

Les conservateurs des peintures du Louvre
ont fait depuis quelque tûmps des tentatives
de conservation particulièrement malheureu-
ses. Trois ouvrages importants en ont beau-
coup souffert. Il est temps de cesser des prati-
ques dont le résultat apparaît si de'plorable.

On a commencé par laver la Femme hydro-
pique de Gérard Dow. Ce chef-d'œuvre rte
l'art bourgeois se présente aujourd'hui à l'ad-
miration des visiteurs cosmopolites sous un
aspect qui pourrait bien ébranler sa vieille
réputation ; la peinture, dépouillée de la riche
enveloppe dont le temps avait masqué ses
faiblesses, apparaît veule et blafarde; encore
une toilette de ce genre et l'on se trouvera en
présence d'une toile vierge.

Un si beau résultat était bien fait pour en-
courager de nouveaux essais; la « conserva-
tion », désireuse sans doute d'établir que ses
soins vigilants s'étendent à toutes les écoles, a
fait choix, pour continuer ses expériences, du
Magistrat florentin, de Ghirlandajo. 11 est
inutile de décrire cette peinture : la Gazette
l'a gravée en 1881, peu de jours après son en-
trée au Louvre, et elle est déjà célèbre autant
à cause de sa valeur propre que de l'extraor-
dinaire protubérance nasale du personnage
représenté. Ce panneau, d'un éclat et d'une
fraîcheur remarquables, semblait jouir d'une
excellente santé : il est aujourd'hui bien ma-
lade des suites du traitement qu'on lui a fait
subir. Nettoyé comme une peinture à l'huile,
alors qu'il a été peint à la détrempe, il offre
aux regards attristés les traces de restaurations
nouvelles et maladroites, à la place des res-
taurations anciennes, qui avaient le mérite de

passer inaperçues, ou, du moins, de ne cho-
quer personne.

Après le tableau hollandais et le tableau
italien- il fallait, de toute justice, s'adresser
à un tableau français.

Cette fois, la « conservation » a cru devoir
choisir un chef-d'œuvre incontesté.

Les personnes qui ont conservé le souvenir
des Bergers d'Arcadie, si chaudement enve-
loppés des rayons dorés dont toute la toile
était illuminée, peuvent aller voir ce qu'il en
reste. Cette malheureuse peinture, saignée à
blanc, semble l'ombre d'elle-même : vidée,
pâlie, elle détonne dans l'ensemble du Pous-
sin et des autres tableaux de la galerie fran-
çaise, qui pourtant ont été soumis à un lavage
général, il y a peu temps.

N'avons-nous pas raison de jeter le holà et
d'attirer l'attention du public sur la singulière
façon dont on pratique la conservation de cer-
taines de nos richesses nationales, au musée
du Louvre ? Peut-être l'administration supé-
rieure voudra-t-elle comprendre la nécessité
de ne confier qu'à des gens experts une tâche
aussi délicate que la conservation et la restau-
ration des tableaux? L'expérience est décisive ;
le moins que l'on doive faire, c'est de mettre
les expérimentateurs dans l'impossibilité de la
renouveler.

Quant à nous, nous ne cesserons de protester
contre des manœuvres dont le résultat le plus
clair est d'écorcher, de dépouiller à jamais de
précieuses peintures; ce genre de vivisection,
plus cruellement stupide que celui dont les
animaux sont victimes, n'a même pas le mérite
de servir à quelque chose : il est simplement
et naïvement destructeur.

Alfred de Lostalot
 
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