Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

La chronique des arts et de la curiosité — 1907

DOI Heft:
Nr. 12 (23 Mars)
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.19764#0108
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
98

LA CHRONIQUE! DES ARTS

PETITES EXPOSITIONS

EXPOSITION DE PEINTRES ET DE SCULPTEURS
(Galerie Georges Petit)

Ces peintres et ces sculpteurs, en acquérant
l’enviable honneur cl’être présidés par M. Rodin,
ont perdu le droit de porter officiellement le nom
de « Société Nouvelle » sous lequel le public con-
tinuera longtemps à les désigner. Ils n’ont jamais
mieux rempli le rôle qu’ils se sont dès le début
assigné : ils nous offrent un expressif raccourci de
la figure qu’aura, un mois plus tard, le Salon de la
Société Nationale. Ces artistes, en effet, ne sont-ils
pas, si nous mettons à part M. Maurice Denis,
M. Charles Guérin et quelques autres fort peu
nombreux qui s’y sentent généralement dépaysés,
ceux qui vont apporter aux galeries de l’avenue
d’Antin ce qu’elles attendent de meilleur ? La plu-
part n’y figureront pas sans doute par de plus
significatifs morceaux.

Que demanderions-nous à M. Besnard de plus
que ces œuvres, de formats inégaux, où sa jaillis-
sante fécondité se manifeste à nos yeux fidèles et
charmés? Ici, dansZes Caryatides, c’est l’auteur de
Vile heureuse, l’ingénieux inventeur de composi-
tions décoratives où s’expriment, par la ligne au-
tant que par la couleur, la grâce de la nature et
la volupté de vivre ; là, dans la Liseuse, c’est
le peintre de la femme ; et, plus subtil encore, l’ob-
servateur des jeux de la lumière sur cette chair de
la chair qu’est la nudité féminine s’affirme dans
deux études de Romaines, dignes de la fameuse
Femme qui se chauffe du Luxembourg. M. Lu-
cien Simon peut nous donner aussi bien, mais
non pas mieux que ces deux morceaux où la
science et la conscience revêtent par miracle la sé-
duction de la spontanéité : Balcon de théâtre et
La Petite Violoniste. La jeune fille au corsage
bleu et au collier d’ambre, par laquelle M. Gottet
nous montre un raffinement égal et une sûreté
croissante, associe nos plus vives sympathies à
des efforts dont la nouveauté nous fut révélée à
cette même place, il y a juste un an. Une chapelle
de cathédrale, que magnifie l’obscure transpa-
rence d’un vitrail bleu, est une des œuvres les plus
parfaites de M. Lobre. Et il y a le Nu dans un
intérieur, de M. Ménard, à côté d’une jolie et di-
recte étude delà Voie Appienne; il y a la virtuosité
de M. Blanche, pareille dans un bouquet de fleurs
et dans le portrait d’un Anglais à l’air bourru et
ravagé, qui est l’éminent romancier M. Thomas
Hardy; il y a l’arabesque mélancolique avec les
harmonies atténuées de M. Aman Jean, et la di-
versité pleine de zèle de M. Prinet, et, pour rendre
hommage à l’artiste disparu, une Place à Cor-
doue qui tranche heureusement sur la production
ordinaire de Thaulow; et il y a les galanles images
de M. La Touche, les morbides jardins de M. de
La Gandara, et les études de nature plus simples
de MM. Claus et Duhem.

Avec le meilleur de leur talent éprouvé, M. Walter
Gay peint la porte ouverte à deux battants sur
une antichambre de château que décorent deux
grands vases bleus de la Chine ; M. Daucliez le
village dont les toits dépassent la houle molle des
dunes tachées d’herbes grises et noires. M. Le Si-

1 duner est aussi brillant quand il chante le parc
aux vives verdures ensoleillées, qu’il est délicat
quand il orchestre en sourdine le blanc mystère
du Petit Trianon sous la neige. Tenant de la
peinture claire, il a une tendance à s’isoler avec
son camarade M. Henri Martin, qui nous apparaît
ici comme un paysagiste éclatant et vibrant avec
ses Rochers de Ploumanach et son Vieux Port
de Marseille.

Autour d’un glorieux plâtre de M. Rodin se
groupent une tête d’homme en bronze de M. La-
gare, un bas-relief en marbre de M. Dejcan, la
Jeune fille à la source de M. Lucien Schnegg
et les statuettes-portraits de M. Troubetzkoï.
Sauf Thaulow, qui n’est plus, et sauf M. Henri
Martin, qui est resté fidèle à la vieille Société des
Artistes français, nous reverrons tous ces artistes
aimés dans les salles de l’avenue d’Antin. Mais y
verrons-nous rien de pareil aux délicieux pan-
neaux peints sur soie, il y a quelques année's,
par M. Charles Couder, et par lesquels on rappelle
à notre mémoire un artiste dont les apparitions
furent trop rares, compatriote de Beardsley, étant
lui-même comme un Beardsley décorateur et colo-
riste, dont l’humour s’adoucirait d’une sorte d’ingé-
nuité voluptueuse ? Enfin le prochain Salon est-il
assuré d’une autre participation venue d’Angle-
terre, celle de l’homme qui est probablement le plus
prestigieux virtuose et le peintre le plus instinctif
de notre temps, M. John Sargent ? Le portrait de-
femme drapé d’un grand manteau noir, théâtral
sans doute, mais si élégant, et sincère malgré tout,,
est une des gloires de l’exposition de cette année ;
et le troupeau de chèvres qui, pour s’abriter du
soleil de Syrie, se presse dans l’ombre bleue d’un
talus rocheux, vaut presque certaines aquarelles-
qu’il nous fut donné récemment d’admirer.

* EXPOSITION HENRY BROKMAN

(Galerie des Artistes modernes)

Un peintre danois, M. Brokman, se signale à
l’attention par un goût, qui n’est pas fort répandu
chez les paysagistes de notre temps, pour l’inter-
prétation plastique des mythes et. des poèmes de
l’antiquité grecque. C’est sur la côte de la mer
Tyrrhénienne qu’il suit Homère et qu’il veut re-
trouver, à sa manière, les impressions d’Ulysse.
Ses ambitions paraissent s’efforcer plutôt vers
Claude Lorrain ou Turner que vers Bœcklin. Mais
on lui reprochera de n’avoir su se donner entière-
ment ni à la fiction ni à la réalité, et l’on remar-
quera qu’il n’y a guère de différence entre le tableau
qui retrace VArrivée du vapeur à Sorrente et
celui qui, intitulé Insulae Syrenum[sic), est, nous
dit le catalogue, une « représentation paysagiste
des lignes de Homère ».

& &

Dans une salle des galeries Petit, M. Henri
Jourdain montre une quarantaine d'aquarelles ;
elles relèvent des mêmes procédés et du même
idéal qui ont valu une certaine vogue à ses eaux-
fortes en couleurs.

Paul Jamot.
 
Annotationen