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MÉLANGES D'ARCHÉOLOGIE.
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Cicéron parie de préparatifs de guerre faits dans ia paix et ie loisir : Ædire capio. <yai IN
PACE et otio, ^aam manam /ecciàt, copine pararit, uiaititadinem Aomiaavr coeyeiàt, aruiarit,
iustraxerit, etc. Cic. 7 70 yf. C^cc. xn.
Mais tous ces passages, et quelques autres qu'on pourrait peut-être y joindre, ont-ils quel-
que rapport, quelque ressemblance avec la formule elliptique Afa^asta iapace ? Cette forme
n'est-elle pas exactement celle des épitaphes chrétiennes? G est sur ces épitaphes quon trouve
une quantité d'exemples du nom propre du défunt, seul, isolé, sans être accompagné d'un
verbe, suivi simplement des mots in pace. Pour attribuer à Salonine vivante la légende moné-
taire que j'examine, il faut nécessairement sous-entendre un verbe, deyere, vivere, ^aiescere, etc.
Mais peut-on citer un seul exemple analogue de cette forme elliptique, tiré de quelque écri-
vain latin ? Je ne le pense pas. Et puis les mots ^a<ya$tn ia pace peuvent-ils avoir le sens qu'on
leur attribue? Peuvent-ils s'entendre de la paix qui règne entre les vivants ou entre les peu-
ples? Ce serait une chose étrange que sous aucun autre règne on n'eût employé cette locu-
tion, tandis que les exemples d'allusion à la paix surabondent dans la suite impériale latine.
C'est toujours PAX AVG. ou AVGG. (Pax ^ayasti, ^fayastn? ou Æyastornai) qui est la forme habi-
tuelle des légendes tracées près de la figure de la Pavx personnifiée.
Comme les Romains n'ont jamais employé l'expression ia pace dans le sens que les inscrip-
tions chrétiennes lui donnent, c'est-à-dire de repos paisiêie dans la tombe, on ne peut guère
se refuser, ce me semble, à adopter l'explication que j'ai proposée.
Et d'ailleurs, le souhait de la paix, adressé aux vivants comme aux morts, est une expression
si éminemment chrétienne, si éminemment biblique qu'à chaque instant on en trouve des
exemples dans 1 ancien comme dans le nouveau Testament. L'ange dit à Tobie : Æe craignez
point, /a paix soit avec vous '. Dans l'Évangile, à la naissance de Notre-Seigneur, les anges chan-
tent l'hymne : G/oria ia a/tissâais Deo et ia terra pax Aoaiiaiàas àona? vo/aatatis\ Quand Jésus-
Christ, après sa résurrection, apparaît aux apôtres assemblés, la première parole qu'il leur dit
est: La paix soit avec voas^. Je pourrais multiplier ces citations, mais les passages que je viens
de rappeler suffisent surabondamment pour faire apprécier la valeur du mot paix dans le
langage chrétien, surtout si on rapproche ces passages de ce que j'ai dit plus haut^, à savoir
que le mot pax indiquait formellement la communion de l'Église. Aussi, dans les épitaphes
chrétiennes, trouve-t-on non-seulement DORMIT IN PACE, mais aussi quelquefois ces expres-
sions : QVI VIXIT IN PACE.
Je persiste donc à regarder la monnaie de Salonine portant la légende : AVGVSTA IN PACE,
comme une monnaie commémorative frappée en l'honneur de Salonine après sa mort, par
' Paæwoèû, Toi/. xn, 17,
- S. Luc., n, IA.
3 S. Luc., xxiv, 36; S. Joann., xx, 19.
^ Nvpm, p. 177.
MÉLANGES D'ARCHÉOLOGIE.
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Cicéron parie de préparatifs de guerre faits dans ia paix et ie loisir : Ædire capio. <yai IN
PACE et otio, ^aam manam /ecciàt, copine pararit, uiaititadinem Aomiaavr coeyeiàt, aruiarit,
iustraxerit, etc. Cic. 7 70 yf. C^cc. xn.
Mais tous ces passages, et quelques autres qu'on pourrait peut-être y joindre, ont-ils quel-
que rapport, quelque ressemblance avec la formule elliptique Afa^asta iapace ? Cette forme
n'est-elle pas exactement celle des épitaphes chrétiennes? G est sur ces épitaphes quon trouve
une quantité d'exemples du nom propre du défunt, seul, isolé, sans être accompagné d'un
verbe, suivi simplement des mots in pace. Pour attribuer à Salonine vivante la légende moné-
taire que j'examine, il faut nécessairement sous-entendre un verbe, deyere, vivere, ^aiescere, etc.
Mais peut-on citer un seul exemple analogue de cette forme elliptique, tiré de quelque écri-
vain latin ? Je ne le pense pas. Et puis les mots ^a<ya$tn ia pace peuvent-ils avoir le sens qu'on
leur attribue? Peuvent-ils s'entendre de la paix qui règne entre les vivants ou entre les peu-
ples? Ce serait une chose étrange que sous aucun autre règne on n'eût employé cette locu-
tion, tandis que les exemples d'allusion à la paix surabondent dans la suite impériale latine.
C'est toujours PAX AVG. ou AVGG. (Pax ^ayasti, ^fayastn? ou Æyastornai) qui est la forme habi-
tuelle des légendes tracées près de la figure de la Pavx personnifiée.
Comme les Romains n'ont jamais employé l'expression ia pace dans le sens que les inscrip-
tions chrétiennes lui donnent, c'est-à-dire de repos paisiêie dans la tombe, on ne peut guère
se refuser, ce me semble, à adopter l'explication que j'ai proposée.
Et d'ailleurs, le souhait de la paix, adressé aux vivants comme aux morts, est une expression
si éminemment chrétienne, si éminemment biblique qu'à chaque instant on en trouve des
exemples dans 1 ancien comme dans le nouveau Testament. L'ange dit à Tobie : Æe craignez
point, /a paix soit avec vous '. Dans l'Évangile, à la naissance de Notre-Seigneur, les anges chan-
tent l'hymne : G/oria ia a/tissâais Deo et ia terra pax Aoaiiaiàas àona? vo/aatatis\ Quand Jésus-
Christ, après sa résurrection, apparaît aux apôtres assemblés, la première parole qu'il leur dit
est: La paix soit avec voas^. Je pourrais multiplier ces citations, mais les passages que je viens
de rappeler suffisent surabondamment pour faire apprécier la valeur du mot paix dans le
langage chrétien, surtout si on rapproche ces passages de ce que j'ai dit plus haut^, à savoir
que le mot pax indiquait formellement la communion de l'Église. Aussi, dans les épitaphes
chrétiennes, trouve-t-on non-seulement DORMIT IN PACE, mais aussi quelquefois ces expres-
sions : QVI VIXIT IN PACE.
Je persiste donc à regarder la monnaie de Salonine portant la légende : AVGVSTA IN PACE,
comme une monnaie commémorative frappée en l'honneur de Salonine après sa mort, par
' Paæwoèû, Toi/. xn, 17,
- S. Luc., n, IA.
3 S. Luc., xxiv, 36; S. Joann., xx, 19.
^ Nvpm, p. 177.