CHRISMES.
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Ce semble donc être l'inscription d'une porte d'église (écartée peut-être, où l'on pouvait
échapper aux témoins indiscrets), qui engageait l'âme coupable à ne s'approcher de l'autel
qu'après avoir bien dit son 772^% c22(/3%,* ou même s'être confessé. Le grand escalier qui donne
accès à Notre-Dame du Puy par la porte méridionale (si je ne me trompe) ne parle qu'un peu
plus clairement aux pèlerins en leur faisant lire (je cite de mémoire, après vingt ou trente ans) :
(i Ni caveas crimen, caveas contingere limen;
Nam regina poli vult sine sorde colib H
Quoi qu'il en soit, ce nouveau chrisme se complique en outre d'une couronne centrale dont
nous n'avions pas rencontré l'analogue jusqu'à présent, et rien n'y indique la croix latine.
Il y avait donc suffisants motifs pour lui donner accès dans cette petite collection si peu
prétentieuse qu'elle soit; mais où je me proposais principalement de faire voir comment
le vieux monogramme Gonstantinien s'est transformé peu à peu, dénaturé même, jusqu'à
disparaître (chez nous) dans l'usage populaire, sous la force des choses. Que le xiv° siècle,
en pays limousin, trouvât bon de rapprocher sur un même œuvre (ci-dessus p. 220) l'abrégé
moderne du nom de Jésus et la vieille contraction qui s'appelait chrisme, je ne m'en for-
maliserai point. C'était comme un pont jeté entre la coutume qui venait d'expirer et celle
qui s'emparait de l'avenir. Le passé avait encore de vieux témoins qu'il ne fallait pas dépay-
ser, on leur ménageait la transition vers l'usage nouveau. Mais vouloir aujourd'hui
associer les formes anciennes au signe qui a définitivement prescrit, c'est nous offrir un
livret de musée ; lorsque le spectateur demande sans plus quelque aliment à sa dévotion.
De quel droit viendrait-on alors servir aux fidèles de notre âge une archéologie dont ils
n'ont aucun souci durant l'office divin, et qui n'est même pas complète comme renseigne-
ments utiles sur cette seule question ? Le P. A. Martin ne se refusait guère cette satisfaction
d'amateur dans plusieurs étoffes qui ont été mises en sur ses dessins, et je ne réussis
pas à trouver que ce soit invention louable (A7722CM3 772 ay A 227722'ea
Probablement que d'anciennes pendeloques gothiques ou mérovingiennes (à la façon de
la couronne espagnole que conserve maintenant le musée deCluny) avaient transmis la cou-
tume de voir l'A et l'h) rattachés par des chaînettes à une croix, soit en sautoir, soit à quatre
angles droits. Le fait est que dans les vieux manuscrits, principalement j usqu'au ix" siècle,
le chrisme porte les deux lettres latérales au moyen de cordes ou de chaînes; et des chartes
espagnoles de donation ou d'inventaire en parlent mainte fois. M. Le Blant l'a fait obser-
ver sur des pierres tumulaires de Provence \ et j'en puis citer un autre d'Arles (p. 229)
d'après le P. A. Martin.
1. Nous avons vu ta même recommandation exprimée sur
un corporal par une grande dame du ix° siècle (supra, h. t.,
p. 193; note 4). Les protestants sont donc bien mat venus à
nous chercher noise sur ta manière d'entendre tes dévotions
catholiques (Cf. t, Cor. xt, 27-29), comme actes purement
extérieurs où t'àme n'entrerait pour rien.
2. Inscriptions chrétiennes..., t. I, p. 192; etc. Il semble-
rait que dans ta titurgie on ait fait usage de petites pende-
loques analogues, que supportait la croix entre les mains du
célébrant. Voici un monogramme (flg. A) et une croix (fig. B),
qui ont bien l'air d'avoir été calqués par le P. A. Martin sur
quelque manuscrit espagnol dont la trace m'échappe.
B représente sans doute quelque cérémonie où le prêtre
porte solennellement une croix avec une cassolette peut-
être, ou un petit encensoir (si ce n'est un vase pour le saint
chrême) ; et il est facile de voir que l'A et l'w sont suspen-
dus aux bras de la croix, comme le montrent bien d'autres
peintures ou sculptures du haut moyen âge. J ignore s'il
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Ce semble donc être l'inscription d'une porte d'église (écartée peut-être, où l'on pouvait
échapper aux témoins indiscrets), qui engageait l'âme coupable à ne s'approcher de l'autel
qu'après avoir bien dit son 772^% c22(/3%,* ou même s'être confessé. Le grand escalier qui donne
accès à Notre-Dame du Puy par la porte méridionale (si je ne me trompe) ne parle qu'un peu
plus clairement aux pèlerins en leur faisant lire (je cite de mémoire, après vingt ou trente ans) :
(i Ni caveas crimen, caveas contingere limen;
Nam regina poli vult sine sorde colib H
Quoi qu'il en soit, ce nouveau chrisme se complique en outre d'une couronne centrale dont
nous n'avions pas rencontré l'analogue jusqu'à présent, et rien n'y indique la croix latine.
Il y avait donc suffisants motifs pour lui donner accès dans cette petite collection si peu
prétentieuse qu'elle soit; mais où je me proposais principalement de faire voir comment
le vieux monogramme Gonstantinien s'est transformé peu à peu, dénaturé même, jusqu'à
disparaître (chez nous) dans l'usage populaire, sous la force des choses. Que le xiv° siècle,
en pays limousin, trouvât bon de rapprocher sur un même œuvre (ci-dessus p. 220) l'abrégé
moderne du nom de Jésus et la vieille contraction qui s'appelait chrisme, je ne m'en for-
maliserai point. C'était comme un pont jeté entre la coutume qui venait d'expirer et celle
qui s'emparait de l'avenir. Le passé avait encore de vieux témoins qu'il ne fallait pas dépay-
ser, on leur ménageait la transition vers l'usage nouveau. Mais vouloir aujourd'hui
associer les formes anciennes au signe qui a définitivement prescrit, c'est nous offrir un
livret de musée ; lorsque le spectateur demande sans plus quelque aliment à sa dévotion.
De quel droit viendrait-on alors servir aux fidèles de notre âge une archéologie dont ils
n'ont aucun souci durant l'office divin, et qui n'est même pas complète comme renseigne-
ments utiles sur cette seule question ? Le P. A. Martin ne se refusait guère cette satisfaction
d'amateur dans plusieurs étoffes qui ont été mises en sur ses dessins, et je ne réussis
pas à trouver que ce soit invention louable (A7722CM3 772 ay A 227722'ea
Probablement que d'anciennes pendeloques gothiques ou mérovingiennes (à la façon de
la couronne espagnole que conserve maintenant le musée deCluny) avaient transmis la cou-
tume de voir l'A et l'h) rattachés par des chaînettes à une croix, soit en sautoir, soit à quatre
angles droits. Le fait est que dans les vieux manuscrits, principalement j usqu'au ix" siècle,
le chrisme porte les deux lettres latérales au moyen de cordes ou de chaînes; et des chartes
espagnoles de donation ou d'inventaire en parlent mainte fois. M. Le Blant l'a fait obser-
ver sur des pierres tumulaires de Provence \ et j'en puis citer un autre d'Arles (p. 229)
d'après le P. A. Martin.
1. Nous avons vu ta même recommandation exprimée sur
un corporal par une grande dame du ix° siècle (supra, h. t.,
p. 193; note 4). Les protestants sont donc bien mat venus à
nous chercher noise sur ta manière d'entendre tes dévotions
catholiques (Cf. t, Cor. xt, 27-29), comme actes purement
extérieurs où t'àme n'entrerait pour rien.
2. Inscriptions chrétiennes..., t. I, p. 192; etc. Il semble-
rait que dans ta titurgie on ait fait usage de petites pende-
loques analogues, que supportait la croix entre les mains du
célébrant. Voici un monogramme (flg. A) et une croix (fig. B),
qui ont bien l'air d'avoir été calqués par le P. A. Martin sur
quelque manuscrit espagnol dont la trace m'échappe.
B représente sans doute quelque cérémonie où le prêtre
porte solennellement une croix avec une cassolette peut-
être, ou un petit encensoir (si ce n'est un vase pour le saint
chrême) ; et il est facile de voir que l'A et l'w sont suspen-
dus aux bras de la croix, comme le montrent bien d'autres
peintures ou sculptures du haut moyen âge. J ignore s'il