LA HAUTE ÉGYPTE PRIMITIVE
45
Citons encore les vases en pierre dure, qui constituent certainement
une des industries les plus surprenantes des indigènes de la Haute-
Égypte. La matière première était partout à leur disposition, mais
par ce qu’on pourrait appeler peut-être l’attraction de la difficulté,
il semble qu’ils se soient attachés le plus souvent à creuser avec une
minutie stupéfiante les roches précisément les plus résistantes. Sans
vouloir étudier d’une façon particulière cette catégorie d’objets, deux
remarques s’imposent cependant. Plusieurs des formes les plus fré-
quentes sont des copies des vases en terre de la seconde période,
vases globulaires à anses cylindriques, dont la forme se justifie dans
l’argile seulement. Car une anse cylindrique en pierre est très difficile
à creuser et elle est inutile : on n’a pas à craindre, en effet, que la
corde de suspension finisse par user le granit, tandis que dans la
terre, la largeur même de l’anse est une garantie d’un long usage du
vase. La seconde remarque à faire est que, dès les premières dynasties,
si l’on continue à faire des vases en pierre, on abandonne cependant
petit à petit les roches les plus dures pour se rejeter sur les matières
plus tendres et particulièrement sur l’albâtre. Les Égyptiens des
premières dynasties possédaient de beaux vases en métal, dont
l’usage remplaçait avantageusement les vases en pierre, qui furent
abandonnés.
Il en va de même pour l’industrie du silex. A l’époque primitive, les
tombeaux fournissent d’admirables couteaux en silex, taillés avec une
virtuosité vraiment déconcertante 1. Vers la fin de la seconde période,
brusquement les belles lames font place à des produits beaucoup plus
grossiers 2 et dont plusieurs imitent manifestement des formes d’outils
en métal, par exemple le couteau à manche 3. L’explication n’est pas
difficile à trouver : une nouvelle industrie, apportée par les enva-
hisseurs^ déprécié les chefs-d’œuvre exécutés en une matière qui ne
servira plus dorénavant qu’aux besoins des classes inférieures de la
population.
Jusqu’à présent, nous n’avons examiné que des produits de 1 art
industriel, et cependant les sépultures ont révélé des objets qui per-
mettent d’apprécier les capacités des primitifs comme sculpteurs et
comme dessinateurs 4.
1. Capart, J., les Débuts de l’Art en Égypte. Bruxelles, 1904, fig. 32-
2. Petrie,’ W.-M.-F., Diospolis parva. Londres, 1901, p. 23 et pl. IV.
3’ Id„ Abydos. Part I, Londres, 1902, pl. XVIII, XIX.
4. En général, sur l’art de cette période, voir Peet, T.-E., theArt of the ^^yna^tw
period, dans le Journal of Egyptian Archeology, t. II, iqi.5> PP- '94> e P
45
Citons encore les vases en pierre dure, qui constituent certainement
une des industries les plus surprenantes des indigènes de la Haute-
Égypte. La matière première était partout à leur disposition, mais
par ce qu’on pourrait appeler peut-être l’attraction de la difficulté,
il semble qu’ils se soient attachés le plus souvent à creuser avec une
minutie stupéfiante les roches précisément les plus résistantes. Sans
vouloir étudier d’une façon particulière cette catégorie d’objets, deux
remarques s’imposent cependant. Plusieurs des formes les plus fré-
quentes sont des copies des vases en terre de la seconde période,
vases globulaires à anses cylindriques, dont la forme se justifie dans
l’argile seulement. Car une anse cylindrique en pierre est très difficile
à creuser et elle est inutile : on n’a pas à craindre, en effet, que la
corde de suspension finisse par user le granit, tandis que dans la
terre, la largeur même de l’anse est une garantie d’un long usage du
vase. La seconde remarque à faire est que, dès les premières dynasties,
si l’on continue à faire des vases en pierre, on abandonne cependant
petit à petit les roches les plus dures pour se rejeter sur les matières
plus tendres et particulièrement sur l’albâtre. Les Égyptiens des
premières dynasties possédaient de beaux vases en métal, dont
l’usage remplaçait avantageusement les vases en pierre, qui furent
abandonnés.
Il en va de même pour l’industrie du silex. A l’époque primitive, les
tombeaux fournissent d’admirables couteaux en silex, taillés avec une
virtuosité vraiment déconcertante 1. Vers la fin de la seconde période,
brusquement les belles lames font place à des produits beaucoup plus
grossiers 2 et dont plusieurs imitent manifestement des formes d’outils
en métal, par exemple le couteau à manche 3. L’explication n’est pas
difficile à trouver : une nouvelle industrie, apportée par les enva-
hisseurs^ déprécié les chefs-d’œuvre exécutés en une matière qui ne
servira plus dorénavant qu’aux besoins des classes inférieures de la
population.
Jusqu’à présent, nous n’avons examiné que des produits de 1 art
industriel, et cependant les sépultures ont révélé des objets qui per-
mettent d’apprécier les capacités des primitifs comme sculpteurs et
comme dessinateurs 4.
1. Capart, J., les Débuts de l’Art en Égypte. Bruxelles, 1904, fig. 32-
2. Petrie,’ W.-M.-F., Diospolis parva. Londres, 1901, p. 23 et pl. IV.
3’ Id„ Abydos. Part I, Londres, 1902, pl. XVIII, XIX.
4. En général, sur l’art de cette période, voir Peet, T.-E., theArt of the ^^yna^tw
period, dans le Journal of Egyptian Archeology, t. II, iqi.5> PP- '94> e P