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Daly, César [Hrsg.]
L' architecture privée au XIXe siècle: nouvelles maisons de Paris et de ses environs (Sér. 1,1): Hotels privés — Paris: Ducher, 1870

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https://doi.org/10.11588/diglit.51410#0030
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22

L’ARCHITECTURE PRIVÉE SOUS NAPOLÉON 111.

rain a pu puiser une multitude d’inspirations nouvelles ;
il a pu introduire dans ses œuvres des formes moins
banales, et importer de toutes pièces chez nous des types
nouveaux : les chalets d’Allemagne ou de Suisse, et les
cottages d’Angleterre. lien est résulté, dans nos construc-
tions rurales, infiniment plus de variété, et chez les archi-
tectes un sens plus vrai des charmes de la nature et des
ressources d’agrément que peut offrir une association plus
intime de l’architecture avec les créations du monde
végétal. Mais il règne aussi dans l’architecture des villas
un peu plus de confusion ; l’architecte n’a pas su encore
s’assimiler si parfaitement ses emprunts qu’il ne les
laisse reconnaître souvent dans l’espèce de marqueterie
que présentent un trop grand nombre de nos habitations.
Il y a des constructeurs (le plus souvent ce ne sont
pas des architectes) qui semblent croire que, sans encou-
rir jamais les censures de l’art, toute villa de proportions
moyennes peut légitimement aspirer à la dignité d’une
sorte de petit Versailles, ou rappeler tout au moins les
lignes grandioses des vastes châteaux des xviT et xvine
siècles, qu’elle peut en singer les grandes dispositions et
le noble style ; et ils paraissent d’avis que la villa de
petites dimensions ne saurait être traitée trop librement,
ici sous la forme d’un chalet fantastique, là en cottage à
tourelles et à créneaux. Ils ne paraissent pas plus soup-
çonner qu’il est ridicule d’imiter avec une façade de 15
à 16 mètres de développement les subdivisions d’une
façade de 50 à 60 mètres, qu’ils ne semblent se douter
que l’irrégularité pittoresque du cottage, au lieu de
naître originairement d’une fantaisie sans règle, est
l’œuvre au contraire d’un calcul fort sérieux et d’un
sentiment d’art très-juste. Ce calcul avait pour objet à la
fois l’utile et l’agréable : la plus grande commodité pos-
sible dans la distribution des pièces de la maison, et la
vue, par les fenêtres, des perspectives les plus agréables
des environs. Le sentiment d’art qui faisait adopter, dans
une habitation rurale modeste, les formes irrégulières du
pittoresque de préférence aux lignes symétriques d’une
beauté plus sévère, était aussi juste et aussi délicat que
le calcul dont nous avons parlé était sage et raisonnable;
on comprenait que le style de l’habitation doit s’accor-
der .avec celui du site où elle est placée; qu’il faut réser-
ver le grand style pour les circonstances qui permettent
l’emploi de grandes ressources, ce qui n’arrive que pour
les monuments et les jardins publics, pour les palais, les
châteaux et les villas importantes; que le cottage, la de-
meure de la fortune médiocre, doit épouser en quelque
sorte les allures libres de la nature, le propriétaire man-
quant de moyens pour contraindre la nature à revêtir
entièrement la livrée de l’art.
A la campagne, où l’espace ne manque pas, où le ter-
rain est d’un prix relativement faible, la construction
peut s’étendre à droite, à gauche, en avant ou en arrière;
il n’y a donc pas de raison pour accumuler étage sur
étage comme en ville. La villa ne se compose le plus sou-
vent, en effet, que d’un rez-de-chaussée surélevé, d’un
premier étage et d’un étage mansardé. A la campagne,
il y a le plus souvent le recul nécessaire de tous côtés
pour bien voir les façades, et l’édifice étant peu élevé, ses
toits sont visibles à peu près de partout. Aussi les toits

des villas, avec leurs cheminées et leurs pignons, ont-ils
une importance décorative plus considérable que dans
les habitations urbaines.
Les toits des maisons à loyer des villes sont placés trop
haut, et les rues n’offrent pas assez de recul pour que le
promeneur les distingue aisément. Les maisons qui bor-
dent les places publiques et les maisons d’angle sont plus
favorablement placées, il est vrai, et les hôtels séparés de
la rue par la cour d’honneur, et comptant beaucoup
moins d’étages que les maisons à loyer, laissent aussi
voir leurs toits de certains points de vue, mais jamais
non plus très-librement et de tous les côtés, comme à
la campagne. Le toit doit donc jouer un rôle décoratif
plus important dans la villa que dans l’hôtel, et surtout
que dans la maison à loyer.
Les fenêtres en saillie sur les murs, interdites en ville
par l’édilité, — défense trop rigoureuse, ou du moins
trop absolue à notre avis, — ont aussi plus de raison
d’être à la campagne qu’en ville. A l’extérieur, elles
accidentent plus avantageusement les façades, et de l’in-
térieur elles permettent de mieux jouir des perspectives
environnantes.
L’humidité du sol étant plus à redouter à la campagne
qu’à la ville, parce que les eaux pluviales y pénètrent
directement au lieu de couler sur les pavés et sur l’as-
phalte des trottoirs, l’exhaussement du rez-de-chaussée
y est plus indispensable, sans compter l’avantage que
peut offrir cet exhaussement pour mieux éclairer le sous-
sol et le plonger moins profondément en terre. A cet
exhaussement plus marqué du rez-de-chaussée de la
villa, correspondent forcément des perrons plus hauts et
architecturalement plus importants.
Pour la villa donc, un petit nombre d’étages, des toits,
des cheminées et des pignons décorés, des fenêtres sail-
lantes et des perrons élevés, peuvent être considérés
comme des traits à peu près généraux, et dont l’habile
ajustement lui donnera son vrai caractère.
Trop souvent ce sont les détails architecturaux des
monuments publics qui fournissent des modèles à l’ar-
chitecture privée, et ces détails, par une sorte de logique
occulte dont l’architecte n’a pas toujours le secret, l’en-
traînent à donner à l’ensemble de la construction privée
des lignes plus sévèrement ordonnées parfois qu’il ne
conviendrait. Cette influence du style monumental est
surtout à craindre pour la villa, et d’autant plus que la
villa est moins importante.
Dans l’architecture suburbaine, plus on s’écarte des
villes et plus on a de liberté, moins on est tenu de se
soumettre à un régime de sévère symétrie: en revanche,
plus on s’approche des villes, et plus l’architecture doit
se ressentir du régime de la discipline urbaine.
A la campagne, plus une résidence est importante, et
moins il convient de la soumettre à un régime de fantai-
sie architecturale ; sa grandeur et son importance même
réclament les formes nobles et élevées de l’art : en re-
vanche, les cottages et les chalets, en adoptant les formes
irrégulières du pittoresque, y trouveront à la fois plus
d’avantages dans la distribution, plus de facilité à épou-
ser les accidents du terrain et à en tirer parti, une asso-
ciation plus intime avec le site et la nature environnante.
 
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