PEINTRE.
&c. &c. &c.
CEux qui ont écrit la vie de Jean Wildens marquent différemment le tems delà naissan-
ce. Quelques-uns disènt qu’il naquit en 1600 , un autre le fait contemporain de
Rubens, la chose est incontestable & ajoute qu’il étoit à peu près de même âge, & par con-
séquent environ douze à treize ans plus vieux que ceux-là ne le font, Sa maniéré ne mon-
tre point qui a été Ion maître , & si on la conlultoit uniquement sur ce sujet > elle don-
nerait occasion de croire qu’il n’en eût pas d’autre que la nature. C’est elle qu’on voit re-
tracée dans lès ouvrages. Ceux qui ont cru reconnoîcre le goût de Paul Bril dans lès ar-
bres & dans lès lointains , ont eu raisdn de ne point dire qu’il ait été éleve de ce peintre,
puisque çelusci partit dès sà jeunesse pour aller lè former â Rome sous Ion frère Matthieu
Bril, & qu’il s’y fixa jusqu’à la mort, tandis qu’on laisse Wildens dans les Païs-Bas.
Il apporta en naissant un génie heureux. Dès sa tendre jeunesse il montra un grand pen-
chant pour la peinture. Saisissànt l’occasion de s’y avancer, il luivit la nature pas â pas, l’exa-
mina avec attention, &; s’efforça de la copier. La campagne étoit plus propre pour l’ob-
server que la ville, il s’y tranlportoit le plus sbuvent qu’il lui étoit possible , afin de l’étu-
dier dans tous les objets quelle offrirait â sès yeux. Là jettant les yeux vers le ciel,ilcon-
fidéroit l’admirable variété des nuages qui nous le montrent & nous le cachent successive-
ment, nous le laissent voir â tout moment sous différentes figures, nous instruisènt des ef-
fets de l’ombre sur les objets, de ceux de la lumière , de sa réfraction & de sà réssexion.
Ramenant lès regards vers la terre, il resséchissoit sur la legéreté des arbres, la couleur des
eaux & sur les différents aspeôts que les uns & les autres présèntoient, étant agités par le
vent. Les villes, les tours, les villages, les hameaux , & tout ce que l'induslriedes hom-
mes où le hazard y introduisbit, n’échappoit point â sès obsèrvations. C’ell-là qu’il rem-
plit sbn esprit de ces belles idées, dont son pinceau devint dans la suite le sincére & char-
mant interprête, dans les ravissànts paysàges qui en sont sortis.
Wildens ayant jetté des fondements aussi solides, commença â édifier. On vit paroître
des paysàges de sà composition , l’envie sè déclara presque aussi-tôt , marque qu’ils ressen-
toient leur bon artiste , cette lâche passion ayant coutume de s’en prendre au beau ou au
bon, & de ne point s’irriter du commun. Mais si d’un côté il vit les envieux s’élever con-
tre sès ouvrages, de l’autre il eut la satisfaélion de voir paroître des connoisseurs de profèsi
sîon & de probité, qui les estimoient. Rubens fut de ce nombre. Ce grand homme ac-
coutumé â rendre justice au vrai mérite, trouvant beaucoup de génie, une belle expression
& un coloris solide dans les productions de Wildens voulut lui donner des marques publi-
ques du cas qu’il faisoit de sbn talent, en l’employant â peindre les fonds , les ciels, les
arbres & les lointains de sès tableaux. Cette occupation réussit â tous égards â nôtre jeu-
ne peintre , il fit voir qu’il sàvoit accommoder sà touche & sbn pinceau aux pensees & â
la couleur des prémiers maîtres, & découvrit avec joie combien une belle figure vient ajoû-
ter au mérite d’un paysàge par sà présènce. Cette remarque le porta â de nouvelles résse-
xions. De lâ il passà â une nouvelle étude & bientôt â de nouvelles entreprisès. Il n’y a
qu’à profiter en sè mêlant avec les gens à talents.
Instruit par expérience que les figures pourraient reléver beaucoup sbn talent de paysà-
giste , il s’adonna à l’étude de l’histoire , afin de puisèr dans ces relies du tems les idées
propres â varier agréablement l’uniformité des vues, & à les rendre intéressàntes. L’esprit
du peintre ne le fait jamais avec plus de siiccès , que lorsqu’il a parcouru cette vaste car-
rière d’un œil attentif. La maniéré, dont Rubens trairait les sujets lui avoir donné cette le-
çon , il ne lui en fallut point davantage pour la mettre en pratique, & il en recueillit des
fruits auffi avantageux à Ibn art qu’à sa réputation. Une seule occasion lui suffit pour l’é¬
tablir & pour faire voir que sbn génie sàvoit renchérir sur ce que les plus habiles avoient
L z trai-
&c. &c. &c.
CEux qui ont écrit la vie de Jean Wildens marquent différemment le tems delà naissan-
ce. Quelques-uns disènt qu’il naquit en 1600 , un autre le fait contemporain de
Rubens, la chose est incontestable & ajoute qu’il étoit à peu près de même âge, & par con-
séquent environ douze à treize ans plus vieux que ceux-là ne le font, Sa maniéré ne mon-
tre point qui a été Ion maître , & si on la conlultoit uniquement sur ce sujet > elle don-
nerait occasion de croire qu’il n’en eût pas d’autre que la nature. C’est elle qu’on voit re-
tracée dans lès ouvrages. Ceux qui ont cru reconnoîcre le goût de Paul Bril dans lès ar-
bres & dans lès lointains , ont eu raisdn de ne point dire qu’il ait été éleve de ce peintre,
puisque çelusci partit dès sà jeunesse pour aller lè former â Rome sous Ion frère Matthieu
Bril, & qu’il s’y fixa jusqu’à la mort, tandis qu’on laisse Wildens dans les Païs-Bas.
Il apporta en naissant un génie heureux. Dès sa tendre jeunesse il montra un grand pen-
chant pour la peinture. Saisissànt l’occasion de s’y avancer, il luivit la nature pas â pas, l’exa-
mina avec attention, &; s’efforça de la copier. La campagne étoit plus propre pour l’ob-
server que la ville, il s’y tranlportoit le plus sbuvent qu’il lui étoit possible , afin de l’étu-
dier dans tous les objets quelle offrirait â sès yeux. Là jettant les yeux vers le ciel,ilcon-
fidéroit l’admirable variété des nuages qui nous le montrent & nous le cachent successive-
ment, nous le laissent voir â tout moment sous différentes figures, nous instruisènt des ef-
fets de l’ombre sur les objets, de ceux de la lumière , de sa réfraction & de sà réssexion.
Ramenant lès regards vers la terre, il resséchissoit sur la legéreté des arbres, la couleur des
eaux & sur les différents aspeôts que les uns & les autres présèntoient, étant agités par le
vent. Les villes, les tours, les villages, les hameaux , & tout ce que l'induslriedes hom-
mes où le hazard y introduisbit, n’échappoit point â sès obsèrvations. C’ell-là qu’il rem-
plit sbn esprit de ces belles idées, dont son pinceau devint dans la suite le sincére & char-
mant interprête, dans les ravissànts paysàges qui en sont sortis.
Wildens ayant jetté des fondements aussi solides, commença â édifier. On vit paroître
des paysàges de sà composition , l’envie sè déclara presque aussi-tôt , marque qu’ils ressen-
toient leur bon artiste , cette lâche passion ayant coutume de s’en prendre au beau ou au
bon, & de ne point s’irriter du commun. Mais si d’un côté il vit les envieux s’élever con-
tre sès ouvrages, de l’autre il eut la satisfaélion de voir paroître des connoisseurs de profèsi
sîon & de probité, qui les estimoient. Rubens fut de ce nombre. Ce grand homme ac-
coutumé â rendre justice au vrai mérite, trouvant beaucoup de génie, une belle expression
& un coloris solide dans les productions de Wildens voulut lui donner des marques publi-
ques du cas qu’il faisoit de sbn talent, en l’employant â peindre les fonds , les ciels, les
arbres & les lointains de sès tableaux. Cette occupation réussit â tous égards â nôtre jeu-
ne peintre , il fit voir qu’il sàvoit accommoder sà touche & sbn pinceau aux pensees & â
la couleur des prémiers maîtres, & découvrit avec joie combien une belle figure vient ajoû-
ter au mérite d’un paysàge par sà présènce. Cette remarque le porta â de nouvelles résse-
xions. De lâ il passà â une nouvelle étude & bientôt â de nouvelles entreprisès. Il n’y a
qu’à profiter en sè mêlant avec les gens à talents.
Instruit par expérience que les figures pourraient reléver beaucoup sbn talent de paysà-
giste , il s’adonna à l’étude de l’histoire , afin de puisèr dans ces relies du tems les idées
propres â varier agréablement l’uniformité des vues, & à les rendre intéressàntes. L’esprit
du peintre ne le fait jamais avec plus de siiccès , que lorsqu’il a parcouru cette vaste car-
rière d’un œil attentif. La maniéré, dont Rubens trairait les sujets lui avoir donné cette le-
çon , il ne lui en fallut point davantage pour la mettre en pratique, & il en recueillit des
fruits auffi avantageux à Ibn art qu’à sa réputation. Une seule occasion lui suffit pour l’é¬
tablir & pour faire voir que sbn génie sàvoit renchérir sur ce que les plus habiles avoient
L z trai-