LUC VAN UDEN
PEINTRE.
&c. &c. &c.
LUc van Uden naquit à Anvers en 159$. Son père, peintre de la Reine d’Angleterre
malgré la médiocrité de son talent , fut son prémier maître , & ne lui eut inspirc
qu’une maniéré bien commune , si la bonté de son génie suppléant au défaut de l’éduca-
tion, ne lui eut suggeré des moyens plus efficaces pour arriver à la perfection de son art.
Les dispositions naturelles valent bien l’instruétion, & si le désit d’apprendre s’unit à elles,
il n’est point d’obstacle qu’un homme ne surmontc en matière d’art ou de feience. C’est
de quoi Luc van Uden nous fournit une preuve. Surpassànt son père par les pro-
grès, il s’apperçut qu’il avoir besoin d’un maître plus habile pour se former, mais les com-
modités lui manquoient pour en payer un. Dans ces circonstances il eut reçours à la na-
ture. Maître excellent, qui ne refuie ses leçons à personne, Ôc qui en donne des nouvel-
les à chaque instant, quand on prend la peine de le consulter. Ce fut l’occupation de van
Uden, ôc c’est dans cette école qu’il à pris la maniéré grande & moëlleufe par laquelle il
s’est distingué entre les païsâgistes.
Dès le prémier point du jour fe dérobant aux douceurs du sommeil, il alloit parcourir
les campagnes, afin d’obferver les effets merveilleux que la lumière produit sur les objets,
dans des moments heureux & passagers de l’aurore naissante , & lorsque le soleil appro-
chant de l’horison dissipe les vapeurs de la terre par (à clarté & par sà chaleur. Le crayon
à la main, il sàisissoit ces occasions rapides pour ébaucher les beautés qui s’offroient à fes
yeux 6c retournoit au logis l’imagination remplie de fes découvertes. Il passbit la journée
en réssexions utiles sur ce qu’il avoir vu, & en transportant sur la toile ce qu’il avoir pour.
ainsi dire esquissé sur le papier , jusqu’à ce que le coucher du soleil le rappella au vrai at-
telier des grands païsâgistes, pour étudier les nouvelles opérations de la lumière , lorsque
cet astre va fe perdre sous notre horison. Ce fut dans cette bonne école que van Uden for-
ma son goût, prennant les leçons de la prémiere & de la plus excellente main. C’est ce
vaste & fécond original qui lui fournit les pensées enchantées qui le font admirer dans les
cabinets, en le faisant disputer le pas aux Francisques, aux Guaspres, aux Poussins, & à
tout ce que les écoles de l’Europe ont fourni de meilleurs païsâgistes.
Malgré tant de capacité la fortune n’étoit qu’une marâtre pour notre artiste, elle ne lui
donnoit que le nécessaire à la vie. La mort de son père ne le mit point plus â son aife, il
ne lui laissoit qu’une succession fort mince. Cette situation peu heureufe a peut-être con-
tribué â l’excellence, où il a porté son art, dit l’auteur du sùpplément de l’abrégé de la vie
des peintres imprimé à Paris en 1752. Erasme de Rotterdam pensoit autrement, quand le
penchant qui nous porte â l’étude d’un art ou d’une feience, dit-il, ne fait pas plus d’impret
sion sur nous , que les promesses ou l’espérance de parvenir par là à la possession de quel-
que autre objet, c’est une marque qu’il n’avoit point assez d’afcendant sor notre cœur pour
le porter à y exceller: mais quand une inclination naturelle nous entraine & quelleestac-
compagnée de zèle & d’application , c’est alors que l’issue de nos entreprifes est toujours
glorieufe. Cet artiste commença à fe soustraire au sommeil & à s’appliquer avec ardeur
à la peinture , dans un âge où la jeunesse n’a point coutume de s’inquiéter beaucoup l’es-
prit du lendemain.
Le peu d’éducation que van Uden avoit eue , la vie champêtre qu’il avoir menée pen-
dant quelques années, pour fe procurer une connoissance plus exaéte de la nature, & son
assiduité â l’étude l’avoient privé des usàges du monde & l’avoient pour ainsi dire enter-
ré dans son attelier. Bien différent de ces peintres qui ont vu beaucoup de païs, il n’étoic
gueres propre à fe faire valoir par sa préfence. Ses ouvrages lui rendirent ce bon office, ils
ctoient recherchés, tandis qu’il étoit encore inconnu. Le célébré Rubens les vit & conçut
de l’estime pour celui qui les avoit peints. Informé que c’étoit van Uden, 6c apprennant
O z com*
PEINTRE.
&c. &c. &c.
LUc van Uden naquit à Anvers en 159$. Son père, peintre de la Reine d’Angleterre
malgré la médiocrité de son talent , fut son prémier maître , & ne lui eut inspirc
qu’une maniéré bien commune , si la bonté de son génie suppléant au défaut de l’éduca-
tion, ne lui eut suggeré des moyens plus efficaces pour arriver à la perfection de son art.
Les dispositions naturelles valent bien l’instruétion, & si le désit d’apprendre s’unit à elles,
il n’est point d’obstacle qu’un homme ne surmontc en matière d’art ou de feience. C’est
de quoi Luc van Uden nous fournit une preuve. Surpassànt son père par les pro-
grès, il s’apperçut qu’il avoir besoin d’un maître plus habile pour se former, mais les com-
modités lui manquoient pour en payer un. Dans ces circonstances il eut reçours à la na-
ture. Maître excellent, qui ne refuie ses leçons à personne, Ôc qui en donne des nouvel-
les à chaque instant, quand on prend la peine de le consulter. Ce fut l’occupation de van
Uden, ôc c’est dans cette école qu’il à pris la maniéré grande & moëlleufe par laquelle il
s’est distingué entre les païsâgistes.
Dès le prémier point du jour fe dérobant aux douceurs du sommeil, il alloit parcourir
les campagnes, afin d’obferver les effets merveilleux que la lumière produit sur les objets,
dans des moments heureux & passagers de l’aurore naissante , & lorsque le soleil appro-
chant de l’horison dissipe les vapeurs de la terre par (à clarté & par sà chaleur. Le crayon
à la main, il sàisissoit ces occasions rapides pour ébaucher les beautés qui s’offroient à fes
yeux 6c retournoit au logis l’imagination remplie de fes découvertes. Il passbit la journée
en réssexions utiles sur ce qu’il avoir vu, & en transportant sur la toile ce qu’il avoir pour.
ainsi dire esquissé sur le papier , jusqu’à ce que le coucher du soleil le rappella au vrai at-
telier des grands païsâgistes, pour étudier les nouvelles opérations de la lumière , lorsque
cet astre va fe perdre sous notre horison. Ce fut dans cette bonne école que van Uden for-
ma son goût, prennant les leçons de la prémiere & de la plus excellente main. C’est ce
vaste & fécond original qui lui fournit les pensées enchantées qui le font admirer dans les
cabinets, en le faisant disputer le pas aux Francisques, aux Guaspres, aux Poussins, & à
tout ce que les écoles de l’Europe ont fourni de meilleurs païsâgistes.
Malgré tant de capacité la fortune n’étoit qu’une marâtre pour notre artiste, elle ne lui
donnoit que le nécessaire à la vie. La mort de son père ne le mit point plus â son aife, il
ne lui laissoit qu’une succession fort mince. Cette situation peu heureufe a peut-être con-
tribué â l’excellence, où il a porté son art, dit l’auteur du sùpplément de l’abrégé de la vie
des peintres imprimé à Paris en 1752. Erasme de Rotterdam pensoit autrement, quand le
penchant qui nous porte â l’étude d’un art ou d’une feience, dit-il, ne fait pas plus d’impret
sion sur nous , que les promesses ou l’espérance de parvenir par là à la possession de quel-
que autre objet, c’est une marque qu’il n’avoit point assez d’afcendant sor notre cœur pour
le porter à y exceller: mais quand une inclination naturelle nous entraine & quelleestac-
compagnée de zèle & d’application , c’est alors que l’issue de nos entreprifes est toujours
glorieufe. Cet artiste commença à fe soustraire au sommeil & à s’appliquer avec ardeur
à la peinture , dans un âge où la jeunesse n’a point coutume de s’inquiéter beaucoup l’es-
prit du lendemain.
Le peu d’éducation que van Uden avoit eue , la vie champêtre qu’il avoir menée pen-
dant quelques années, pour fe procurer une connoissance plus exaéte de la nature, & son
assiduité â l’étude l’avoient privé des usàges du monde & l’avoient pour ainsi dire enter-
ré dans son attelier. Bien différent de ces peintres qui ont vu beaucoup de païs, il n’étoic
gueres propre à fe faire valoir par sa préfence. Ses ouvrages lui rendirent ce bon office, ils
ctoient recherchés, tandis qu’il étoit encore inconnu. Le célébré Rubens les vit & conçut
de l’estime pour celui qui les avoit peints. Informé que c’étoit van Uden, 6c apprennant
O z com*