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L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré — 8.1875

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https://doi.org/10.11588/diglit.6768#0046
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NOUVELLE

PRIME DE L'ECLIPSE

Tous les nouveaux abonnés de YÉclijtsç, ainsi que
ceux qui renouvelleront par anticipation leur abonne-
ment, auront droit à la prime suivante, qui donnera
la faculté de recevoir, pour un prix extrêmement mo-
dique, deux journaux illustrés chaque semaine.

Cette prime, consistant en un abonnement à prix
très-réduit au Monde Comique, ne sera accordée
qu'aux personnes qui prendront un abonnement pour
une année entière à Y Eclipse.

Le Monde Comique est un journal hebdoma-
daire, illustré, publiant des dessins humoristiques
noirs et coloriés, par les dessinateurs les plus aimés
du public.

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Les abonnements partent du 1" et du 15 de chaque
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—--*>--

LES LETTRES RÉPUBLICAINES

de

GERVAIS MARTIAL

Qu'est-ce donc que Gervais Martial?

Gervàis Martial est un brave ouvrier, carré d'allures, au
parler franc, à la main rude, qui s'est mis en tête de dire
simplement et honnêtement à beaucoup de gens ce qu'il
reiise 4e beaucoup de choses.

Touohatout a recueilli ces cinquante lettres et les publia
en un volume très-pittoresque d'aspect et même un peu bru-
tal de |orme, comme il convient d'ailleurs à une telle œuvre,
par-dessus tout populaire.

Le ton très-curieux et très-original de ces lettres, chaudes,
patriotiques et d'une gouaillerie familière, a fait à ce volume
un véritable succès d'étonnement.

C'esl qu'aussi Gervais Martial n'y va pas de main morte :
il dit à tous des choses vraies et des choses dures, mais il
les dit sans façon comme sans colère.

Il est impossible de rêver une publication dont le fond et
laformje répondent plus exacteme ît aux dispositions actuelles
de l'opdnion publique.

C'est! bien là le langage calme et fort de cet honnête tra-
vailleur, au cœur généreux* et sans fiel, qui voit dans le
triomphe de la République, si longtemps discutée, moins la
revanche d'un passé dont il a souffert que l'espoir d'un ave-
nir plus glor.eux pour son pays.

Dans la première de ses Lettres républicaines, Gervais Mar-
tial s'est adressé au citoyen Petit Prince impérial, qu'il en-
gage « à braquer sa lorgnette d'un autre côté. »

Dans la seconde, Gervais Martial s'adresse à un «bour-
geois, » et démolit avec la jovialité la plus cocasse ce mot
de conservateur, dont le bourgeois s'affuble à tout propos.

Les troisième et quatrième lettres que nous venons délire,
l'une sur l'armée, l'autre sur l'm 'itlérence ; olitique, sont
empreintes d'une grande vigueur que rehausse encore le ton
plébéion et familier du style de ses épîtres.

De toutes les œuvres auxquelles Touchatout a attaché son
nom, $ui est devenu le synonyme de gaieté et d'audace, au-
cune, à notre avis, n'a eu ta portée de ce nouveau volume.

La clarté, le bon sens et la finesse qui dictent les Lettres
républicaines en font une de ces publications joyeuses, mais
surtout saines et utiles, qui se recommandent à tous les ama-
teurs de la gaieté gauloise.

C'est à ce titre que nous signalons à nos lecteurs cette
œuvre de bonne humeur et surtout de bonne foi.

L'ÉCLIPSÉ.

LA MODISTE

Au premier rang', parmi les travailleuses aux doigts do
fée, auj cerveau Intelligent, dont les créations, aussi inces-
santes qu'éphémères, ont fait et soutiennent, depuis un
temps immémorial, dans les cinq parties du monde, la ré-
putation de goût et de fantaisie artistique de Paris, il faut
mettre la modiste.

Plaçons-la donc ici sur un galant piédestal, en tête de ses
compagnes de labeur.

Mais de même qu'il est losrique, en botanique, de décrire
le bouton naissant avant d'examiner la fleur éclose, parlons
tout de suite du Modillon.

Le Modillon, surnommé aussi le Trottin, est la chrysalide
un peu noiraude, un peu gauche, de ce papillon tendre,
léger et brillant qu'on appelle la modiste.

C'est le mousse espiège du gracieux équipage qui consti-
tue un atelier de mo les; en un mot, le Modillon, c'est l'ap-
prentie modiste.

C'est ce pauvre petit être de huit à quatorze ans, qui trotte
.sans relâche par les rues, crotté comme un insouciant bar-
bet, un immense carton au bras, chaussé de bottines fortes
ou de brodequins à clous, et qui va, tendant la hanche,
ouvrant une paire de grands yeux candides et malins à la
fois, devant les merveilles dont regorgent les magasins
échelonnés sur sa route.

Quand le Modillon fait son apprentissage dans les grands
quartiers, chez une modiste à nom célèbre, il est ordinaire-
ment ac ;ompagné par un mélancolique et géant porteur de
cartons, à tête étrange, à livrée voyante. Alors, la modisle
en herbe précède fièrement ce subalterne remarquable, et

CE IVEST PAS DE JEU!,..

« Ce n'est pas de jeu !... » Voilà un cri qui retentit terri-
blement depuis quelques jours da s le camp en débandade
des bonapartistes.

Il faut les entendre crier sur tons les tous à la nouvelle
majorité :

— Vous ne voyez donc pas que vos nouveaux alliés les
radicaux se sont servis de vous pour arriver à leurs fins !...
Vous ne voyez donc pas qu'ils vo 'S font hypocritement
patte de velours pour vous amadouer... Vous ne voyez donc
pas qu'ils dissimulent to ,s leurs projets... qu'ils vous acca-
blent de concessions et de sourires pour vous amener à faire
leur ali'lire 1... Vous ne ypya z donc pas que le jour où ils
seront devenus les plus forts, grâc#à votre aide, ils ne feront
de vous qu'une bouchée !... Oui, vous serez mangés... man-
gés... mangés!... et ce sera bien fait!...

xxx, ■mJÈj^^^^MÈ

Puis, se tournant vers les républicains, ils vocifèrent avec
des rugissements de coière :

— Inlâmes gueux !... Traîtres et dissimulés que vous
êtes !... Osez donc regarder en face vos naïfs alliés si vous
ne craignez pas qu'ils lisent dans vos yeux féroces tous les
supplices que vous leur réservez quand ils vous auront aidé
à vaincre!... Quoi!... jusqu'ici vous nous aviez fut biau
jeu en ne transigeant jamais avec vos principes!... Vous
alliez devant vous tout d'une pièce, affirmant carrément vos
espérances, ne contractant avec personne d'alliances finau-
des... Vous ne faisiez aucune concession... Vous ne bm.i ■•/.
jamais... Vous revendiquiez hautement vos droits... Vous
vouliez tout ou rien !...

Ce procédé de votre part nous était excessivement avan-
tageux, puisqu'il nous laissait à nous le monopole des com-
promis et des transact.ons avec vos ennemis.

Nous nous servions avec succès de votre franchise pour
effrayer les gens, et nons pouvions vous présenter comme
de farouches révolutionnaires de qui le parti de la modéra-
tion n'avait jamais rien à attendre.

Votre contenance était excellente pour la marche de nos
petites aff lires, et déji nous en avions pas mal profité.

Quand tout d'un coup, félons que vous êtes, vous vous
mettez à user de notre procédé, à vous rapprocher tout
doucement des g-ns dont nous vous avions fait la terreur, à
leur céder ceci, à leur promettre cela !...

En un mot, vous qui n'aviez jamais su faire que du
radicalisme en discussion,voilà que vous vous mettez à faire
aussi de la politique !...

Ce n'est pas de jeu !...

XXX

Tel est le langage que la réceato évolution qui nou ; a
donné la République, inspire à ceux qui croyaient l'enter-
rer justement par le même système.

Avouons que c'est naïf et lisible. <

XXX

Il est évident que le brusque mouvement de détente qui
vient de se produire dans 1 s i elations entre républic lins et...
conservateurs — puisque ce so it les deux mots adoptés, —
n'est pas fait pour réjouir les bonapartistes qui se trouvent
ainsi dépossèdes de leur meilleur atout : 1 \ division des gens
de bonn:ï volonté.

XXX

Il est certain que s'ils avaient depuis quelque temps réussi
à rendre leur partie moins désespérée, c'était surtout en
entretenant chez les lépubliciins et les craintifs, ce malen-
tendu funeste qui faisait piesquc ennemis des gens divisés
en somme par bien peu de chose et voulant tous le bien du
pays.

XXX

Mais, franchement, n'est-il pas grotesque de voir les bona-
partistes venir repiocher aujourd'hui aux républicains de
faire à leur tour de, la politique de transaction et de modé-
ration!...

XXX

Eux qui depuis plus de deux ans ont mis leurs loques
d'espérances à la remorque des alliances les plus casca-
deuses.

fi'e sur les trottoirs, d'un air très-grave, voilette baissée,
comme une petit-* dame.

Et c'est un tableau charmant ! Il n'y a q:ue les conduc-
teurs d'omnibus qui ne se laissent jamais attendrir par la
vue du Modillon. Loin de là, ils refusent impitoyablement
l'entrée de leurs voitures aux gigantesques boîtes à cha-
peaux des approuties modistes.

Que le ciel le leur pardonne !

Le Modillon va donc à pied, presque toujours, comme un
Juif Errant en bas âge, nnds avec moins de cinq sous dans
la poche.

Hélas! f nit-il le dire, discrètement, à la honte de la n Ba»
bylooe moderne »? le Modillon, au milieu de la capitale,
se trouve chaque jour dans la position scabreuse du petit
Chaperon rouge au sein des forêts, avec sa galette et son pot
de heurre. Des loups, d'ignobles loups le suivent avec achar-
nement, glissant dans son oreille étonnée des paioles et des
promesses dont la signification exacte lui échappe, heureu-
sement.

Mais la chère petite soTt pure des mille épreuves que lui
fait subir la corruption parisienne, et tous ses petits vices se
résument en un gros péché mignon : la gourmandise!

Par exeniple, ce péché-là, elle le choie volontiers!

Eh! qui pourrait lui en faire un crime? A l'âge où les
autres enfants jouent encore au ménage et à la poupée sous
les marronniers des jardins publics, le frêle Modillon, ôreinté,
ahuri, arpente les intermin^es voies de la ville, chargé
comme un âuon, se levant tôt, se couchant tard.

Et puis, quand l'apprentie ne va pas en ville, au lieu de
s'amuser comme ses riches contemporaines, et de faire la
madame aux Tuileries, soDëcz ('onc qu'on la comble de kilo-
mètres do blonde à nicher, à 1 atelier!

Aussi, quand elle possède quelques sous, quand les clientes
lui ont donné des pour boire, au lieu ^ se f;sjre une bourse

De quels procédés ces gens-là n'ont-ils p is dû us-r et abu-
ser pour se faire admettre dans des combinaisons poliliques
d'une netteté plus ou moins douteose?.

N'a-t-il pas fallu qu'ils mettent en toutes circonstances
leur drapeau dans leur poche?

N'ont-ils pas dû s'enrôler frauduleusement sous l'étiquette
de : conservateurs, pour être admis à porter aux républicains
leur part de oups de pied et de horions !...

XXX

Et quand ils viennent dire aux modérés :

— Vous serez mangés !...

Ne peut-on pas leur répondre :

— Et vous... quel sort réserviez-vous donc, après la vic-
toire, à ces modérés dont vous aviez fait vos alliés?... Est-
ce que par hasarl vous ne caressiez pas l'espoir de les man-
ger vous-mêmes?

XXX

A qui espériez-vous faire accroire que vous combattiez
avec eux dans l'intention de leur offrir la part du butin?

Une fois les républicains éc as^s en collaboration, l'empire
eût-il proposé aux légitimistes et aux orléanistss de jouer
loyalement à pile ou f ice lequel d'entre vous régnerait sur
la France ?

xxx

Allons donc!.,, votre-tactique était claire comme le jour :
Vous vouliez biea vaincre à trois; mais pour triompher
tout seuls.

i XXX

On ne vous en f .it point un crime. C'est là le jeu de la.
politique, à ce qu'il paraît.

Et vous avez fait votre jeu du mieux que vous avez pu.

Pas trop mat, même, il faut bien l'avouer, puisqu'en
moins de deux années, vous en étiez arrivés, vous qui
n'étiez au début qu'un insignifiant appoint, à devenir déjà
dangereux pour vos associés qui avaient pourtant .apporté
trente fois plus de re sources dans l'entreprise.

XXX

Ils Si sont aperçus qu'ils avaient fait avec vous un vérita-
ble marché de dupes.

Et ils ont résilié à temps.

C'est dommage pour vous.
• Mais ne venez pas faire les l égueules et les dégoûtés en
voyant les autres faire — honnêtement en somme — ce que
vous avez vous-mêmes tenté avvc toute la mauvaise foi dont
vous êtes capables.

XXX

D'ai leurs, la nouvelle alliance que viennent de conclure
les républicains avec une partie de vos anciens partenaires,
ne peut être comparée à celle que vous avez vous-mêmes
ébauchée.

Pour qu'un traité soit respectable, il faut que ceux qui le
sigiei.t aient — sinon des intérêts absolument identiques —
du moins un but commun et honnête.

Etait ce votre cas à vous, bonapartistes, quand vous avez
conclu avec les hommes de.ee que vous appelez le parti de
l'ordre ?

Non.

Eux visaient avec plus ou moins de coup d'œil, le bon-
heur de leur pays,

Vous, vous visiez son porte-monnaie.

Vainqueuis, le règlement de vos comptes eût été terri-
ble pour vos anciens exploités et leurrés.

XXX

L'entente qui vient de s'établir entre les conservateurs et
les républicains n'est point entachée de cette convoitise cou-
p hle ni d'un côté ni de l'autre.

Sans doute les deux alliés ne sont pas complètement d'ac-
cord sur les moyens ; mais ils le sont du moins sur le but à
a teindre.

Et ce but est aussi noble que le vôtre était vénal :
C'est leîelcvement delà France.

Quoi que vous en disiez dans vatre mauvaise humeur,
cette alliance sera féconde; et, le résultat obtenu, ni l'un ni
l'autre ne « mangera » ni ne cherchera à « manger » son
associé.

XXX

Tant que les républicains n'ont fait que de la politique de
principe : ce que vous appelez, vous, de radicalisme, ça vous
faisait beaucoup rire parce que vous vous disiez :

ou d'engraisser une tirelire, comme papa et maman le lui
recommandant, elle se gave de flan, de brioches et autres
friandises saupoudrées de poussière.

Parfois aussi, quand sa coquetterie naissante l'aiguillonne,
elle se paie des bagues en fausse cornaline couleur de melon
ou des boucles d'oreille en émail bleu tendre. ..

Ces riches joyaux, joints aux bouts de rubans et aux
pointes de soie dont les commis des magisins, qui ont la
pratique de la patronne, lui font cadeau de temps à autre,
lui composent une toilette qui la rend très-heureuse.

Cela rend plus présentable les robes du Modillon, robes
qui sont les Réduction-Collas de la défroque de maman;
car on a beau avoir quatorze ans, on tient à ne pas faire
tache au milieu de ces demoiselles du magasin.

C pendant le goût du Modillon pour la cravate de soie,
les cols de fausse guipure, ou les tours de coa éclatants,
baisse presque toujours pavillon devant l'envie démesurée
davaler une tarte imb'bée d'antique marmelade, ou bien
un luisant éclair au chocolat, .

Le Modillon enfin, traînant partout et toujours son in-
commensurable carton, comme un forçat son boulet, fait
en grande p .rtie la fortune des industriels qui colportent
ces noix d'Amérique que personne n'a jamais pu casser, ou
ces tranches de coco qui puent l'huile de ricin, ou ces équi-
voques nougats rouges comme un muscle d'écorchô artificiel.

Dieu lui prêtant vie, le Modillon e.>t devenu grand. Le
voilà, son apprentissage fini, passé au rang de modiste en
pied, devenue apprêteuse ou parnisseuse, etc., n'ayant pluS
qu'un but : ttre première, et gagnant par mois de trente à
soixante-dix francs, et même davantage, selon le quartier
et la clientèle. ;

La jeune fille alors se permet des robes d'un joli prix, W
même elle endosse enfin la bienheureuse soie taillée à la
dernière des modes les plus folles. Elle l'a bien gagné ! Ses
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