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Faure, Élie
Histoire de l'art (5): L'esprit des formes — Paris: Éditions d'histoire et d'art, Librarie Plon, 1949

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https://doi.org/10.11588/diglit.71100#0301
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plan, du profil au profil, de la masse à la masse, l'allégorie
se plaquera sur elle, comme une orthopédie morale destinée
à soutenir son architecture intérieure oubliée en même temps
que l'émotion mystique qui attacha sur elle les regards. Je
ne sais guère, dans la peinture, que Rubens qui ait eu de
la vie un sentiment assez puissant pour entraîner dans son
mouvement général les figures allégoriques, et Giotto qui
ait eu l'âme assez pure et l'intelligence assez souple pour
les leur prêter.
VI
Je crois que ce sont en partie les méfaits de l'allégorie
qui ont déterminé l'Occident, privé une première fois après
Phidias, une seconde fois après Giotto et la cathédrale fran-
çaise, du symbolisme universel selon lequel il se représentait
le monde des apparences, à rechercher les éléments d'un
symbolisme individuel dans cette conception naturaliste de
la forme qui l'a le plus éloigné de l'Orient. Le besoin gréco-
chrétien de vérité, qui s'est traduit deux fois, grâce à la Grèce
et à Rome d'abord, grâce à la Renaissance italienne ensuite,
par la poursuite de l'expression anatomique, a déterminé
partout ce rationalisme naturaliste qui a sauvé l'architecture
de l'Europe et, en introduisant le modelé dans sa peinture,
lui a conféré en fin de compte le privilège parfois grandiose
et le plus souvent terre à terre de transporter l'illusion de la
vie — par la valeur et la perspective — dans un espace à
deux dimensions. L'art grec, et avec lui une grande partie
de l'art européen après le xive siècle, est plus monstrueux,
en vérité, que ces monstres égyptiens, chinois, hindous,
aztèques même qui combinent, pour d'horribles ou tendres
communions mystiques, les formes de l'homme aux formes
de la bête, les formes de la bête aux formes de la plante, les
formes de la vie aux formes de la mort. Monstrueux, parce
qu'il n'ose pas, comme eux, transporter la vie spirituelle
dans une forme résolument et pleinement symbolique qui
l'intronise sur un plan mystique, hors du réel, et qu'il nous

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